Pierrick Gardien

Pierrick Gardien

Avocat Droit Public
Enseignant aux Universités de Lyon

Ligne directe : 07.80.99.23.28

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Le 21 juin marque chaque année le coup d'envoi de l’été. C’est le moment d’enfiler vos claquettes-chaussettes et de foncer à la plage. Lieu de détente et de farniente, la plage est également le point de convergence de nombreuses problématiques juridiques, qu’il serait imprudent d’ignorer.

Je me propose de démêler le vrai du faux en la matière pour sécuriser vos vacances, sur la base de la série d’affirmations suivantes :

« Je peux dormir à la belle étoile sur la plage »
« Je peux faire un feu le soir sur la plage »
« Je peux faire la fête le soir sur la plage »
« Je peux bronzer topless sur la plage »
« Je peux emmener mon animal à la plage avec moi »
« J’ai le droit de m’alcooliser sur la plage »
« Je suis obligé de porter le masque à la plage »
« Je peux réserver ma place à l’avance sur la plage en déposant une serviette »
« Je peux avoir des relations sexuelles discrètes à la plage »
« Je peux utiliser librement mon drone à la plage »
« Je peux me baigner en burkini à la plage »
« On peut m'interdire l'accès à une plage sous prétexte qu'elle est privée »
« Il me faut un permis B pour louer un jet ski ou un petit bateau »
« Je peux écouter de la musique / jouer au ballon / avec un cerf-volant / avec un énorme matelas pneumatique… »
« La mairie est responsable si j'attrape une maladie à la suite d'une baignade »
« J’ai le droit de pêcher depuis la jetée / ramasser tous les coquillages trouvés sur la plage »
« Toute plage doit mettre à disposition un point d'eau douce »
« Un maître-nageur sauveteur ne peut m’interdire de me baigner, ce n’est pas dans ses attributions »
« J'ai le droit de traverser une propriété privée lors d'une promenade en bord de mer »
« Je risque une amende si je laisse des déchets/mes mégots sur le sable »
« La baignade peut être interdite en raison de la pollution »
« J’ai le droit de fumer du cannabis à la plage »
« J’ai le droit de me baigner dans le port »
« J’ai le droit de ramasser du sable, des galets et des bouts de bois sur la plage pour les ramener chez moi »
« Les douches de plage peuvent être arrêtées en raison de la sécheresse »


***
 
1. « Je peux dormir à la belle étoile sur la plage »

Vrai !

Il est parfaitement légal de dormir à la belle étoile sur la plage, à condition de ne pas y camper. L’article R 111-42 du Code de l’Urbanisme interdit en effet le camping sauvage sur la plage (avec tente et matériel) mais aucunement le simple fait d’y dormir. Le sac de couchage directement sur le sable est donc possible.

2. « Je peux faire un feu le soir sur la plage »

Faux !

Le feu est absolument interdit sur les plages françaises (feux de camp, barbecue, etc.) pour des raisons de sécurité publique. Une amende de 38 euros est généralement encourue, outre l’intervention des forces de l’ordre, qui éteindront le feu.

3. « Je peux faire la fête le soir sur la plage »

Vrai, mais…

La fête sur la plage est tolérée, à condition qu’elle reste à un volume sonore acceptable. Un djembé ou une guitare à un volume raisonnable sera toléré (pas trop près des habitations), même le soir, mais il n’est pas envisageable de transformer la plage en un Coachella sauvage.

Il appartient toutefois au maire, au titre de son pouvoir de police administrative générale, de réglementer l’usage des plages afin de prévenir d’éventuels troubles au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques. À ce titre, il peut par exemple interdire l’utilisation d’appareils diffusant de la musique amplifiée dont le volume sonore est susceptible de gêner les autres usagers de la plage, ou encore réglementer l’exercice des autres activités bruyantes.

Il faut donc surveiller le règlement de police et de sécurité des plages affiché à l’entrée de ces dernières.

4. « Je peux bronzer topless sur la plage »

Plutôt vrai, mais…

L’article 222-32 du Code Pénal sanctionne l'exhibition sexuelle en public d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Le « topless » est toutefois toléré sur les plages françaises depuis longtemps, et aucune poursuite n’est à crainte (sauf arrêté municipal contraire placardé sur les panneaux à l’entrée de la plage).

Attention :

  • Seul le topless est toléré (pas de naturisme),
  • Absolument pas dans les piscines municipales où les règlements intérieurs l’interdisent souvent ni à Paris-Plages,
  • Ne pas excéder la zone de baignade : la plupart des villes côtières interdisent le torse nu (pour les garçons) par arrêté municipal en ville,
  • À l’étranger, notamment les pays du Moyen-Orient, le topless sur la plage peut être lourdement sanctionné.

5. « Je peux emmener mon animal à la plage avec moi »

Plutôt faux, mais…

En règle générale, la plupart des communes côtières interdisent par arrêté municipal les animaux sur les plages surveillées, entre juin et septembre, même tenus en laisse. Cette mesure vise à préserver la qualité des eaux de baignade. Sur certaines plages, des horaires sont toutefois aménagés pour les animaux. Se référer au texte en vigueur, placardé à l’entrée de la plage.

La mesure vise principalement les chiens, mais peut concerner également les chevaux pour les promenades en bord de mer.

Une amende de 11 euros est encourue en cas de non-respect de la réglementation.

À savoir : la Fondation 30 millions d’amis met en ligne sur son site une carte interactive des lieux de vacances accessibles aux animaux.

Une exception est généralement prévue dans les arrêtés municipaux pour les chiens guides d’aveugle.

6. « J’ai le droit de m’alcooliser sur la plage »

Plutôt faux !

De plus en plus de plages interdisent purement et simplement l’alcool sur la plage sous peine d’amende, se référer à la réglementation placardée à l’entrée de la plage.

Si tel n’est pas le cas, la consommation d’alcool sur la plage est autorisée.

Attention toutefois, la plage étant un lieu public, une arrestation par les forces de l’ordre pour ivresse publique et manifeste peut être encourue (si nécessaire). Outre le placement en cellule de dégrisement, une amende de 150 euros est alors encourue (Articles L3341-1 et R3353-1 du Code de la santé publique).

7. « Je suis obligé de porter le masque à la plage »

Plutôt faux, mais...

En raison de l’épidémie de covid-19, de nombreux arrêtés préfectoraux ont rendu le port du masque obligatoire sur certaines plages. La plupart de ces arrêtés ne sont toutefois plus en vigueur à ce jour, compte tenu de la nette décrue des contaminations.

On peut donc dire que le masque n’est plus obligatoire à ce jour sur la plupart des plages françaises, ce qui n’interdit toutefois pas de faire toujours attention à la distanciation sociale s’agissant d’endroits très fréquentés.

La situation étant évolutive, il faut surveiller les décisions prises par les pouvoirs publics pendant l’été. Si un arrêté remet l’obligation du port du masque à la plage, il sera affiché à l’entrée de celle-ci et devra être respecté par les vacanciers.

Enfin, l’obligation du port du masque à la plage ne concerne jamais les sportifs.

8. « Je peux réserver ma place à l’avance sur la plage en déposant une serviette »

Vrai !

Sur les plages qui sont bondées en été, beaucoup de sacs, serviettes et autres objets sont laissés sans surveillance afin de réserver des emplacements, c’est ce que l’on nomme familièrement le « squattage des plages ».

Le Ministère de l’Intérieur a été interrogé précisément sur le sujet par une députée qui estimait que cette pratique pourrait s’avérer dangereuse pour les citoyens, puisque des affaires abandonnées sans surveillance sur une plage pourraient représenter un danger au titre de l’ordre public.

Dans le cadre de sa réponse au parlementaire, le Ministère de l’Intérieur a indiqué qu’aucune disposition législative ou réglementaire ne permet au maire d’interdire à des personnes de déposer une serviette ou d’autres objets sur le sable afin d’y « réserver » un emplacement.

Le Ministère a encore précisé que le Gouvernement n’envisageait aucune évolution du droit en vigueur qui permettrait au maire de prendre une telle mesure, qui apparaîtrait par ailleurs disproportionnée au regard de l’objectif recherché et du principe de liberté d’accès aux plages publiques (voir la réponse ministérielle).

Chacun peut donc réserver sa place à l’avance sur la plage en y déposant une serviette.

9. « Je peux avoir des relations sexuelles discrètes à la plage »

Faux !

L'exhibition sexuelle imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du public est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende (article 222-32 du Code pénal).

Les relations sexuelles à la plage, qui est un lieu public, sont donc formellement interdites, même discrètes.

10. « Je peux utiliser librement mon drone à la plage »

Faux !

L’usage de drone de loisir est strictement interdit en agglomération, donc à la plage (Loi n° 2016-1428 du 24 octobre 2016 et Arrêté du 17 décembre 2015).

Par ailleurs, l’utilisation d’un drone à la plage constitue une violation des règles de sécurité publique passible de 75 000 euros d’amende et d’une peine de prison d’un an (article L6232-4 du code des transports) compte tenu de la densité de population.

L’atteinte à l’intimité de la vie d’autrui par l’utilisateur d’un drone est également passible d’une amende de 45 000 euros et d’une peine de prison d’un an (article 226-1 du Code pénal) et tombe sous le coup de la loi Informatique et Libertés.

On laissera donc son drone de loisir à la maison avant d’aller à la plage.

11. « Je peux me baigner en burkini à la plage »

Vrai !

Le Conseil d’État a toujours refusé à ce jour de valider des arrêtés municipaux « anti-burkini » à la plage au nom de la liberté d’aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle (CE, 26 août 2016, n°402742).

Ce n’est que dans le cas très particulier où le port de ce vêtement religieux de baignade avait provoqué des rixes entre usagers sur la plage publique que le Conseil d’État a exceptionnellement et ponctuellement accepté de l’interdire, pendant une durée limitée (exemple de Sisco en Corse, où l’arrêté « anti-burkini » avait été validé au nom de l’ordre public – CE, 14 février 2018, n°413982).

Bien que le burkini soit interdit à la piscine municipale (CE, 21 juin 2022, Commune de Grenoble, n°464648), il est toujours autorisé à la plage à ce jour.

Le Conseil d’État a réaffirmé récemment cette autorisation du burkini à la plage (CE, 17 juillet 2023, n°475636).

12. « On peut m'interdire l'accès à une plage sous prétexte qu'elle est privée »

Plutôt faux, mais…

Les plages françaises sont d’accès libre et gratuit pour le public (Article L321-9 du Code de l’environnement / Article L2124-4 du CG3P).

Toutefois, et par exception, 20% de la superficie des plages naturelles, et 50% de la superficie des plages artificielles peuvent faire l’objet d’une concession, c’est-à-dire être attribuée (en partie) à une personne publique ou privée qui peut y exploiter une activité commerciale (transats, terrains de beach-volley, etc.).

La plage peut donc en partie être privatisée, mais :

  • En aucun cas, cette privatisation ne peut entraver le droit de passage (bande des 3 mètres),
  • Ni concerner l’intégralité de la plage.

L’interdiction totale de l’accès à une plage « privée » n’est donc pas possible.

13. « Il me faut un permis B pour louer un jet ski ou un petit bateau »

Faux !

Louer et conduire (seul) un jet ski implique d’avoir au moins 16 ans et de disposer du permis plaisance (attention, c’est un permis spécial qui n’a rien à voir avec le permis B). Il en va de même pour les bateaux à moteur dont la puissance motrice est supérieure à 6 chevaux (4,5 kilowatts) : se renseigner auprès du loueur sur la puissance (Décret n°2007-1167 du 2 août 2007 relatif au permis de conduire et à la formation à la conduite des bateaux de plaisance à moteur).

Toutefois :

  • Il est possible de conduire un jet ski sans permis dans le cadre d'une procédure d'initiation et de découverte, sous la responsabilité d'un moniteur diplômé, ce que proposent souvent les loueurs sur la plage,
  • La conduite des voiliers est dispensée de permis,
  • La conduite des bateaux à moteur dont la puissance motrice est inférieure à 6 chevaux (4,5 kilowatts) est dispensée de permis.
Attention à la conduite sans permis car votre assurance ne vous couvrira pas, et une forte amende est encourue (1500 euros).

14. « Je peux écouter de la musique / jouer au ballon / avec un cerf-volant / avec un énorme matelas pneumatique à la plage... »

Plutôt vrai, mais…

Écouter la radio pour suivre une étape du Tour de France ou de la musique est autorisé sur la plage, à un volume raisonnable. Si aucune amende n’est encourue en cas d’excès sur la plage, les règles de courtoisie commandent d’être respectueux de votre voisin de serviette.  

Il en va de même des jeux de ballons et de l’usage d’engins de plage accessoires de la baignade (matelas pneumatiques et embarcations gonflables), qui sont autorisés sur la plage.

Il est toutefois interdit de se livrer sur la plage à des jeux de nature à gêner ou à présenter un danger pour les tiers et en particulier pour les enfants : les jets de pierres ou autres projectiles sont rigoureusement interdits.

Le cerf-volant est généralement interdit dans les zones de baignade surveillées (se référer au règlement à l’entrée de la plage).

Il appartient toutefois au maire, au titre de son pouvoir de police administrative générale, de réglementer l’usage des plages afin de prévenir d’éventuels troubles au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques. A ce titre, il peut par exemple interdire l’utilisation d’appareils diffusant de la musique amplifiée dont le volume sonore est susceptible de gêner les autres usagers de la plage, ou encore réglementer l’exercice des autres activités bruyantes.

Il faut donc surveiller le règlement de police et de sécurité des plages affiché à l’entrée de ces dernières.

15. « La mairie est responsable si j'attrape une maladie à la suite d'une baignade »

Plutôt faux, mais…

Il est vrai que la qualité des eaux de baignade est de la responsabilité du maire, en tant que titulaire du pouvoir de police (l’ordre public recouvre la salubrité publique).

S’il ne serait pas envisageable d’engager la responsabilité du maire pour des maladies bénignes contractées à la plage (ex : bactérie, coup de soleil), il en irait autrement si un phénomène exceptionnel altérait la qualité de l’eau (ex : pollution) et que le maire n’avait pas interdit la baignade (drapeau rouge). Dans une telle hypothèse, la responsabilité du maire pour carence dans l’exercice de ses pouvoirs de police pourrait être recherchée si une maladie a été contractée par un baigneur, sur le fondement de l’article L1332-4 du code de la santé publique.  

Une blessure grave causée par un défaut de mesures prises par le maire pour supprimer les obstacles à la sécurité des baigneurs dans l’eau peut également engager sa responsabilité (ex : tiges métalliques, béton sous l’eau, pour un exemple voir CAA Lyon, 4e ch. 8 juillet 1993, n°92LY01260).

16. « J’ai le droit de pêcher depuis la jetée / ramasser tous les coquillages trouvés sur la plage »

Plutôt vrai, mais…

La pêche de loisir / surf-casting est généralement autorisée depuis la plage et la jetée mais hors des zones de baignade surveillées. La réglementation pouvant changer d’un endroit à l’autre, il convient de se référer aux arrêtés municipaux locaux, placardés à l’entrée des plages car le maire a tout à fait la possibilité de l’interdire.

La pêche à pieds de coquillages / crustacés / poissons / mollusques est également autorisée sur les plages (attention, pas dans les ports ni dans les concessions de cultures marines).

Attention, la pêche à pieds et la pêche de loisir sont très réglementées afin de protéger la ressource de manière durable :

  • Il est absolument interdit de vendre le produit de ces pêches, qui ne peut donc être consommé qu’en famille,
  • Des tailles et poids minimaux de capture / pêche / ramassage de coquillages / crustacés / poissons / mollusques sont précisément fixé par arrêté ministériel (ex : huître 5cm, coquille st jacques 11 cm, dorades 23 cm, bar 42 cm, oursins 4 cm piquants exclus), 
  • Des quotas de pêche à pieds journaliers (par personne) sont fixés dans chaque secteur par espèce par arrêté préfectoral (ex : généralement pas plus de 3 kg de palourdes par personne et par jour),
  • Le matériel utilisable est également réglementé (ex : couteau de maximum 20 cm de long et 5 cm de large).  
Vérifiez en mairie ou préfecture en cas de doute (appeler au besoin), ou consultez l'arrêté du 26 octobre 2012.

Attention :

  • Le non-respect des tailles / poids minimaux et/ou des quotas de pêche à pieds / loisir est passible de très lourdes amendes (maximum 22.500 euros), en application de l'article L945-4 du Code rural et de la pêche maritime,
  • Un arrêté municipal ou préfectoral peut interdire toute pêche dans certains secteurs particuliers (pour des raisons écologiques ou sanitaires) : se renseigner.

17. « Toute plage doit mettre à disposition un point d'eau douce »

Faux !

La mise à disposition de point d’eau douce / douches sur la plage est laissée à la discrétion de la commune. Certaines municipalités suppriment les points d’eau douce sur les plages pour des raisons budgétaires, sans possibilité d’exercer de réels recours en la matière.

18. « Un maître-nageur sauveteur ne peut m'interdire de me baigner, ce n'est pas dans ses attributions »

Plutôt vrai, mais…

Par principe, la baignade est libre sur le domaine public, mais des raisons d’ordre public peuvent justifier une interdiction (ex : mauvaise qualité des eaux de baignade, tempête) en application des pouvoirs de police du maire. Le drapeau rouge hissé sur la plage indique l’interdiction de baignade. Un baigneur en infraction qui ne respecterait pas le drapeau rouge risque une amende pour non-respect des règles de sécurité (11 à 33 euros). Le pouvoir de sanction appartient aux policiers municipaux, ainsi qu’aux CRS-MNS (CRS-maître nageur sauveteur). Si les verbalisations sont rares, les règles de prudence élémentaire commandent de respecter le drapeau rouge.

Tous les maîtres-nageurs sauveteurs ne sont donc pas en capacité juridique de verbaliser (seuls les CRS-MNS le peuvent), mais ils seront en mesure de faire appel en cas de besoin aux policiers municipaux ou CRS-MNS face à un vacancier récalcitrant.

19. « J'ai le droit de traverser une propriété privée lors d'une promenade en bord de mer »

Plutôt vrai !

Tous les promeneurs du bord de mer disposent d’un droit de passage sur 3m de largeur sur les 5000 km de rivages français, y compris sur les propriétés privées riveraines. Ceci implique que rien ni personne ne puisse faire obstacle au passage libre sur les propriétés privées en bord de mer, sur une bande de 3m de largeur.

Formulé juridiquement, c’est l’article L.160-6 du Code de l’urbanisme qui dispose que : 

« Les propriétés privées riveraines du domaine public maritime sont grevées sur une bande de trois mètres de largeur d'une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons ».

Attention :

  • Ce droit est bien un droit de passage et non de stationnement,
  • Il concerne les piétons et non les véhicules (voitures, vélos, etc.),
  • Par exception, le Préfet peut suspendre le droit de passage (ou le détourner) dans des secteurs particuliers (ex : chemin public préexistant à proximité, risque que le passage porte atteinte à un site naturel, sécurité publique).

Le propriétaire privé qui entrave le droit de passage sur la bande des 3m encourt une amende 1500 euros.

20. « Je risque une amende si je laisse des déchets/mes mégots sur le sable »


Vrai !

Le règlement de police et de sécurité des plages (arrêté municipal) interdit la plupart du temps de laisser/ jeter ses mégots/déchets sur la plage, l’amende est donc théoriquement possible, mais cela est généralement peu sanctionné (le rappel au règlement suffit). Ce n’est toutefois pas une raison pour adopter ce type de comportement incivique. Des cendriers portatifs sont parfois distribués sur les plages, et les poubelles sont toujours présentes à l’entrée.

Attention, de plus en plus de villes françaises interdisent purement et simplement la cigarette sur certaines de leurs plages (ex : Nice, La Ciotat, Antibes). La liste complète des « plages sans tabac » est disponible sur le site internet de la Ligue contre le cancer. L’amende y est alors encourue, et certaine (38 euros).

21. « La baignade peut être interdite en raison de la pollution »


Vrai !

C’est tout à fait exact. En cas de pollution des eaux de baignade, la baignade peut être temporairement interdite à la plage. Dans ce cas, un arrêté municipal d’interdiction est affiché sur la plage et les drapeaux rouge et violet sont hissés.

La pollution peut provenir d’hydrocarbures, d’une défaillance d’une station d’épuration située à proximité d’une plage ou d’une algue toxique comme l’Ostreopsis qui sévit cette saison sur la côte basque.

Il faudra attendre la levée de l’interdiction et le retour du drapeau vert pour reprendre les activités de baignade.

22. « J’ai le droit de fumer du cannabis à la plage »


Faux !

La consommation de cannabis à la plage est strictement interdite comme partout en France et est aujourd’hui sanctionnée par le paiement d'une amende forfaitaire immédiate de 200 € (article L. 3421-1 du Code de la santé publique).

23. « J’ai le droit de me baigner dans le port »


Faux !

Il est strictement interdit de se baigner dans tous les ports, en raison de la sécurité publique et de la qualité des eaux, été comme hiver. Des panneaux de signalisation rappellent cette interdiction formelle dans les ports, qui concerne également tous les sports nautiques. Une amende est prévue par le règlement de police portuaire en cas de violation de l’interdiction (38 euros).

24. « J’ai le droit de ramasser du sable, des galets et des bouts de bois sur la plage pour les ramener chez moi »


Faux !

L’été, certains vacanciers peuvent être tentés de ramasser du sable sur la plage pour leurs travaux, des galets pour la décoration ou ramener des bouts de bois pour leur barbecue. Il faut pourtant faire attention à ne pas commettre d’infraction en la matière.

L’article L. 321-8 du code de l’environnement dispose que « Les extractions de matériaux (…) sont limitées ou interdites lorsqu'elles risquent de compromettre, directement ou indirectement, l'intégrité des plages ». Sur cette base, il est interdit de ramasser du sable et des galets sur la plage pour le ramener chez soi, car il s’agit d’une atteinte à l’intégrité des plages qui relèvent du domaine public maritime. Une amende de 1 500 euros est encourue.

S’agissant des bouts de bois déposés par les vagues sur la plage, aucune interdiction n’est prévue par les textes. Il est donc possible de les ramasser librement. Cette pratique est toutefois déconseillée au nom de la biodiversité, car les oiseaux s’en servent pour leurs nids.

25. « Les douches de plage peuvent être arrêtées en raison de la sécheresse »


Vrai !

Dans les régions touchées par la sécheresse, la préfecture a la compétence pour prendre des mesures exceptionnelles en fonction des niveaux d’alerte (vigilance, alerte, alerte renforcée et crise). En cas d’alerte sécheresse, l’État peut ainsi interdire le fonctionnement des douches de plage pour préserver la ressource en eau, sans possibilité de recours.

***
Untitled 1Par une décision du 29 juin 2023, le Conseil d’État a maintenu l’interdiction du hijab sur les terrains de football édictée par la Fédération française de football (FFF). Il avait été saisi par un collectif de militantes pro-hijab, les « hijabeuses » qui contestaient devant lui l’interdiction par la FFF du port de ce vêtement religieux prosélyte (CE, 29 juin 2023, Association Alliance Citoyenne et autres, n°458088). Le rapporteur public du Conseil d’État avait dans un premier temps proposé à l’audience d’autoriser le hijab dans le football, mais il n’a pas été suivi par la formation de jugement, ce qui est assez rare.

Ce sont les considérations d’ordre public qui l’ont finalement emportées sur la liberté religieuse de l’usager du service public. En effet, le Conseil d’État a validé l’interdiction du hijab sur les terrains de football pour « prévenir tout affrontement ou confrontation sans lien avec le sport ». C’est le motif décisif permettant d’emporter la décision du Conseil d’État.

Le raisonnement juridique est toujours le même sur des problématiques similaires : l’exercice des libertés individuelles comme la liberté religieuse doit être concilié avec la protection indispensable de l’ordre public. C’est la traduction juridique de la célèbre maxime « La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres ».

Seules des considérations liées à l’ordre public peuvent donc permettre de fonder une interdiction du port des signes religieux ostensibles, sous le contrôle du juge administratif.

La décision rendue ce jour ne change rien aux règles applicables pour les usagers du service public, qui ne sont toujours pas soumis à la laïcité (sauf dans les écoles, les collèges et les lycées publics sur le fondement de la loi du 15 mars 2004).

Le Conseil d’État a simplement jugé que sur le sujet précis du hijab dans le football, il existait un risque d’affrontement ou de confrontation sans lien avec le sport en cas d’autorisation du vêtement religieux. C’est ce qu’il a souhaité éviter.

Si ce raisonnement tient juridiquement, il relève plutôt du pragmatisme du Conseil d’État qui a cherché à anticiper les difficultés pouvant survenir sur les terrains de football amateurs chaque week-end sur un sujet aussi polémique.

Le raisonnement du Conseil d’État est toutefois quelque peu gênant, car ce sont les adversaires du vêtement religieux qui créent le risque d'affrontement... permettant précisément de l'interdire. Il y a donc un renversement de paradigme.

Cette décision rappelle l’interdiction du burkini sur les plages de Sisco en Corse qui avait été exceptionnellement validée par le Conseil d’État pour des considérations d’ordre public : le burkini y avait été interdit en raison d’un risque de rixes avec des vacanciers… opposés au burkini (CE, 14 février 2018, Ligue des droits de l’Homme, n°413982) alors qu’il reste autorisé sur toutes les autres plages françaises à ce jour.

Ce raisonnement « à l’envers » rappelle également l’interdiction préventive de certaines manifestations en raison de risque de trouble à l’ordre public… provoquée par des opposants aux manifestants qui annoncent leur intention de venir les perturber.

Cette logique est dangereuse, car il existe un risque de renversement du régime de protection des libertés institué en droit français : une tendance à l’interdiction préventive de l’exercice des libertés au regard du risque éventuel d’un trouble à l’ordre public. Il ne faudrait pas prendre l’habitude de préférer au vieux système d’autorisation avec contrôle, un nouveau système d’interdiction par anticipation.

Il aurait été plus pérenne de légiférer sur le sujet pour interdire purement et simplement tous les signes religieux ostensibles lors de toutes les compétitions sportives, quel que soit le signe religieux, comme nous l'avions préconisé dans un autre article sur le sujet. Mais le Conseil d'État a sans doute choisi l'efficacité en prononçant une interdiction rapide sur la base plus fragile de l'ordre public compte tenu du temps nécessaire pour légiférer sur le sujet. Il serait donc opportun que le législateur se saisisse prochainement de la question pour trancher définitivement le point.

Laissons ces questions en suspens, mais prenons garde à ce que la restriction de police ne devienne pas la règle, et la liberté l’exception.

Untitled 1Le maire de la commune de Saint-Brévin (Loire-Atlantique) a annoncé démissionner de ses fonctions le 9 mai 2023 en raison de l'incendie de son domicile personnel par des opposants à l'installation d'un centre d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) dans le village, auquel l'édile était favorable (Le Figaro).

Avec l'écho médiatique de cette affaire, beaucoup se sont prononcés en faveur d'une consultation des habitants en amont de tout projet similaire. Si l’opportunité politique d’une telle consultation se comprend aisément, se pose nécessairement la question de sa légalité juridique.

La réponse est négative : le maire ne peut pas organiser de référendum local sur l'accueil de migrants sur le territoire de sa commune, dans la mesure où il s'agit d'une compétence étatique sur laquelle il n'a pas la main.

En effet, tout projet ne peut pas donner lieu à référendum local dans la mesure où le champ d’application de telles consultations est strictement limité par la loi :

  • Le projet soumis à référendum doit relever de la compétence de la collectivité qui l’organise,
  • Et le projet ne peut pas être de nature à compromettre l’exercice d’une liberté publique ou individuelle.
Or l’hébergement d’urgence (compétence dont relève l’accueil de migrants sur un territoire) est une compétente étatique, qui ne relève donc pas de la compétence de la commune, malgré la décentralisation.

Le maire ne peut donc pas, en l’état des textes applicables, organiser de référendum décisionnel local sur l’accueil de migrants dans sa commune.

Pour cette raison, des tribunaux administratifs ont déjà suspendu en urgence l'organisation de tels référendums locaux pour violation d’une condition de fond de la consultation locale, comme à Allex dans le sud de la France (Le Figaro).

Seule une évolution législative pourrait changer la donne en la matière en élargissant les possibilités de recours pour l’exécutif local à ce procédé de démocratie directe, ou en permettant à l’État lui-même d’organiser des consultations locales sur tous sujets (la compétence de l’Etat étant limitée en la matière aux grands projets avec un impact environnemental, comme à Notre-Dame-des-Landes).

Nul doute que cette impasse juridique ne calmera pas les tensions sur l’accueil des migrants à l’échelon local, comme à Saint-Brévin.

Si le référendum local sur ce sujet était un jour autorisé, la procédure applicable résulterait de l’article 72-1 de la Constitution précisé par les articles LO 1112-1 et suivants du CGCT, avec les étapes suivantes :

  • L’exécutif local est seul compétent pour proposer à l’assemblée délibérante de la collectivité l’organisation d’un référendum local,
  • L’assemblée délibérante fixe par délibération les modalités d’organisation du référendum local, le jour du scrutin, convoque les électeurs et précise le projet d’acte ou de délibération soumis à l’approbation des électeurs,
  • La délibération est transmise au Préfet (en charge du contrôle de légalité),
  • Le scrutin ne peut intervenir moins de deux mois après cette transmission,
  • Le projet est adopté si la moitié au moins des électeurs inscrits a pris part au scrutin, et s’il réunit la majorité des suffrages exprimés,
  • Si le projet est adopté, la collectivité est tenue de suivre la décision des urnes (le référendum est décisionnel et non consultatif, ce qui le différencie de la simple consultation locale).
Untitled 1« La casserole qu'on surveille ne déborde jamais ». Mais la coupe semble pleine pour certains manifestants opposés à la réforme des retraites, qui s’arment de casseroles pour faire du bruit lors du déplacement d’un ministre ou du Président de la République lui-même. En réaction, des préfectures comme celles du Loir-et-Cher ou de l’Hérault ont pris des arrêtés interdisant les casseroles dans les zones de déplacement de certains membres de l’exécutif. Mais est-ce vraiment légal ?

Le 20 avril 2023, la préfecture de l’Hérault a été la première à interdire les « dispositifs sonores portatifs » en amont d’un déplacement du chef de l’État, car les casseroles sont devenues un symbole de la contestation de sa politique. Le 25 avril 2023, c’est la préfecture du Loir-et-Cher qui a interdit les « dispositifs sonores amplificateurs de son » afin d’éviter un concert de casseroles lors du passage d’Emmanuel Macron.

Certaines personnes se sont interrogées sur la légalité de ces arrêtés préfectoraux d’interdiction, évoquant les libertés publiques.

En tant qu’autorité déconcentrée, le préfet est titulaire d’un pouvoir de police administrative qui lui permet à ce titre de prendre des mesures de police. Pour que ces mesures soient légales, elles doivent avoir pour objectif de maintenir l’ordre public, qui est défini par les textes comme « le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques »[1].

La tranquillité publique fait partie de l’ordre public. Les textes précisent sur ce point qu’une mesure de police administrative peut avoir pour finalité « Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que (…) le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique, les attroupements, les bruits (…) et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique »[2].

Il faut d’abord observer que les arrêtés préfectoraux dont il est question ne visent pas spécifiquement les « casseroles » en tant que telles, mais tous les dispositifs bruyants destinés à troubler la tranquillité publique. Utilisée comme un tambour par des manifestants en colère, il est indéniable qu’une casserole est génératrice de bruits et que leur adjonction peut être de nature à troubler la tranquillité publique, de la même manière qu’une enceinte ou un mégaphone. Un arrêté de police administrative peut donc en interdire l'usage aux fins de troubler l'ordre public dans certaines zones, pour un motif circonstancié de tranquillité publique et pendant un laps de temps déterminé, c’est-à-dire lors du déplacement d'une personnalité politique par exemple.

Hors de tout déplacement politique et de la même manière, l’organisation d’un concert sauvage de casseroles ou la multiplication d’enceintes en pleine rue pourrait tout autant être interdite par une mesure de police administrative. C’est la protection de la tranquillité publique qui est ici en question, et pas celle de telle ou telle personnalité politique.

Mais est-ce alors une atteinte à la liberté d’expression des manifestants ?

Non. En droit français, la liberté d’expression est protégée par l’article 10 de la Constitution. Mais cette liberté n’est pas absolue : elle trouve ses limites dans la loi. La protection de l’ordre public, dont la tranquillité publique fait partie, constitue une limite légale à la liberté d’expression. Il n’est donc pas possible d’invoquer la seule liberté d’expression pour justifier un concert sauvage de casseroles, d'enceintes ou de mégaphones en pleine rue, quelle qu’en soit sa motivation. Il existe d’autres moyens légaux pour manifester en France.  

Certains observateurs ont critiqué les arrêtés préfectoraux d’interdiction des casseroles au motif d’un détournement possible du code de la sécurité intérieure, qui concerne le risque terroriste. Il est vrai que la préfecture de l’Hérault avait fait apparaître au titre de la motivation de son arrêté d'interdiction le risque d’attentat, ce qui n’a pas de sens. Mais cette motivation est superfétatoire : l’autorité de police administrative n’a pas à justifier d’un risque terroriste pour interdire les dispositifs bruyants destinés à troubler la tranquillité publique. Le raisonnement est le même, à plus grande ampleur, pour les free-party. C’est le calme qui est ici recherché, dans l’intérêt général.

La compétence du préfet et pas du maire à prendre un tel arrêté d’interdiction a également été contestée. Il est vrai que le maire est l’autorité de police de droit commun sur le territoire de sa commune. Mais le préfet dispose également de pouvoirs de police administrative lui permettant d’intervenir dans son ressort, de surcroît dans l’hypothèse d’une carence du maire. Aucune violation de la répartition des compétences ne paraît donc caractérisée.

La rédaction des arrêtés d’interdiction doit toutefois être examinée avec attention. En effet, c’est l’usage du dispositif sonore portatif qui semble pouvoir être interdit s’il vise à troubler la tranquillité publique et pas sa seule détention : il ne s’agit pas de verbaliser tous les cuisiniers du dimanche !

Par ailleurs, dans le système français, la liberté est la règle et la restriction de police l’exception[3]. Par conséquent, l’autorité compétente doit toujours, avant de prendre une mesure de police, s’interroger sur le caractère excessif, ou pas, de la mesure par rapport au risque de trouble à l’ordre public[4].

Il faut donc vérifier si l’arrêté en question est bien circonstancié, limité dans le temps et justifié par des circonstances locales particulières avant de conclure à sa légalité. Dans l’hypothèse d’un recours, il y a fort à parier que les arrêtés d’interdiction seraient validés en référé, en fonction toutefois de leur rédaction. Nul ne peut en effet troubler la tranquillité publique afin de porter des revendications politiques dans l’espace public.

 

[1] Article L. 2212-2 du CGCT

[2] Même article

[3] CE, 10 août 1917, Baldy, n°59855

[4] CE, 19 mai 1933, Benjamin, n° 17413 et 17520

Untitled 1Le Conseil constitutionnel se prononcera vendredi 14 avril 2023 sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 portant réforme des retraites. Rarement une décision des Sages aura été autant attendue et il est à craindre qu’elle ne satisfasse personne, ni les partisans ni les opposants à la réforme. Sans se prononcer sur le fond du sujet, il est important de rappeler que le Conseil constitutionnel ne fait pas de politique et que son indépendance est absolue.

C’est le juriste Hans Kelsen qui a fixé au début du XXe siècle les critères permettant de s’assurer d’un contrôle de constitutionnalité des lois efficace et indépendant du pouvoir politique en proposant de :

  • Créer une juridiction spéciale, indépendante et dédiée exclusivement au contrôle de constitutionnalité ;
  • Diluer le pouvoir de nomination de ses membres à plusieurs autorités ;
  • Prévoir une durée de fonctions longue, sans renouvellement des mandats et avec des incompatibilités.

Le Conseil constitutionnel coche toutes ces cases. Il a été créé en 1958 en même temps que la Constitution de la Ve République dont il est le gardien. Il présente toutes les garanties nécessaires à son indépendance.

L’indépendance du Conseil constitutionnel est parfaitement garantie par sa composition, puisque c’est un organe collégial de neuf membres. Si son Président a voix prépondérante en cas de partage, il ne décide pas seul de la position prise par le Conseil, votée en collégialité.

Le mandat des Sages dure neuf ans et n’est pas renouvelable[1] ce qui est un gage supplémentaire d’indépendance. La durée des fonctions excède en effet le quinquennat présidentiel et le Sage nommé n’a pas d’intérêt à chercher à plaire à l’autorité de nomination puisque ses fonctions ne peuvent pas être renouvelées.

De plus, le pouvoir de nomination est dilué, c’est-à-dire que ce n’est pas la même personne qui nomme tous les membres du Conseil constitutionnel, mais trois autorités différentes, à savoir le Président de la République, le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat qui nomment chacun trois membres[2]. Le Conseil n’est donc à la main ni à l’image de personne, d’autant plus qu’il n’est jamais intégralement renouvelé, mais que le renouvellement des membres s’opère par tiers tous les trois ans.

Avant d’entrer en fonction, les Sages jurent de bien et fidèlement remplir leurs fonctions, de les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution, de garder le secret des délibérations et des votes et de ne prendre aucune position publique et de ne donner aucune consultation sur les questions relevant de la compétence du Conseil[3]. Il existe tellement d’incompatibilités de fonctions fixées par les textes[4], que les Sages doivent en pratique se consacrer uniquement à leur mandat pendant neuf ans, sans faire de politique. En cas de difficulté, la démission d’office d’un membre peut être votée en interne[5].

Certains de ses détracteurs soulignent une composition politique du Conseil constitutionnel. Il est vrai que des politiques siègent en son sein : Laurent Fabius nommé par François Hollande, Alain Juppé nommé par Richard Ferrand, Jacques Mézard et Jacqueline Gourault nommés par Emmanuel Macron. Mais ces politiques, qui ne représentent pas la majorité des Sages, représentent des sensibilités politiques différentes : le parti socialiste, les républicains, le parti radical de gauche et la République en marche. De plus, un membre du Conseil constitutionnel qui s’estimerait en situation de conflit d’intérêts, pour une loi qu’il aurait déjà eu à connaître en tant que ministre par exemple, dispose toujours de la possibilité de se déporter, c’est-à-dire de ne pas siéger lors de la séance portant sur cette loi.

La politisation du Conseil constitutionnel pourrait davantage résulter du fait que les anciens Présidents de la République en sont membres de droit à vie[6], mais la pratique a montré qu’ils s’abstenaient pour la plupart d’y siéger. Les anciens Présidents Nicolas Sarkozy et François Hollande ne siégeront ainsi pas vendredi 14 avril 2023 pour la séance sur la réforme des retraites.

Les Sages de la rue Montpensier jugent en droit et ne s’occupent pas de politique, leur contrôle de la norme inférieure par rapport à la norme supérieure est dit « abstrait » c’est-à-dire de droit pur. Ils doivent ainsi confronter les dispositions législatives aux droits et libertés que la Constitution garantit, à savoir depuis 1971[7] la Constitution du 4 octobre 1958, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, le Préambule de la Constitution de 1946, les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et la Charte de l'environnement de 2004.

Il ne leur appartient donc pas de statuer en opportunité, même si leurs décisions peuvent se teinter de conséquentialisme : « Nous prenons nos décisions sur une base juridique d'abord, mais tout en regardant leurs conséquences » a ainsi pu déclarer le Président Laurent Fabius au journal Le Monde le 18 avril 2016.

Enfin, le Conseil constitutionnel est un organe indépendant des deux ordres juridictionnels, puisque ses décisions s'imposent aux pouvoirs publics, même au Président de la République et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles. Ses décisions ne sont susceptibles d’aucun recours[8].

L’Histoire a montré qu’il n’existe pas d’alternative sérieuse : le contrôle de constitutionnalité direct par les citoyens proposé dans la période révolutionnaire est inapplicable en pratique et populiste ; le contrôle par un organe politique comme le Sénat conservateur de la Constitution de l’an VIII et du Second Empire est biaisé par sa partialité.

Le système juridictionnel mis en place en 1958 est donc le plus efficace, dans le respect de l’État de droit. La Constitution de la Ve République garantit l’indépendance absolue de ses gardiens, qu’importe le sujet traité, et tout le reste est littérature.

 

[1] Article 56 de la Constitution

[2] Article 56 de la Constitution

[3] Article 3 de l’Ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel

[4] Article 57 de la Constitution, Ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, Décret n° 59-1292 du 13 novembre 1959 sur les obligations des membres du Conseil constitutionnel

[5] Article 8 du Décret n° 59-1292 du 13 novembre 1959 sur les obligations des membres du Conseil constitutionnel

[6] Article 56 de la Constitution

[7] Conseil Constitutionnel, Décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971

[8] Article 62 de la Constitution


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Méga-bassines, retraites... tous les prétextes sont bons pour les « black blocs », ce groupe d’extrême gauche responsable d'affrontements sans précédent avec les forces de l'ordre qui ont choqués l'opinion publique. Si le droit ne peut pas tout et qu’il est difficile de se prémunir de tout risque, trois pistes méritent toutefois d’être sérieusement envisagées pour arrêter cette violence.

1/ Peut-on juridiquement interdire les blacks blocs ?

L’article L212-1 du Code de la sécurité intérieure prévoit sept cas de figure dans lesquels le gouvernement peut dissoudre toutes les associations ou groupements de fait, et notamment :

  • S’ils provoquent à des manifestations armées dans la rue ;
  • S’ils présentent, par leur forme et leur organisation militaires, le caractère de groupes de combat ou de milices privées ;
  • Ou s’ils ont pour but de porter atteinte à l'intégrité du territoire national ou d'attenter par la force à la forme républicaine du Gouvernement.
La dissolution de l’association ou du groupement de fait prend la forme d’un simple décret en conseil des ministres.

Compte tenu de la situation insurrectionnelle rencontrée à Sainte-Soline le 25 mars 2023 (méga-bassines) ou lors des manifestations contre la réforme des retraites, les conditions légales sont théoriquement réunies pour prononcer la dissolution des « black blocs ».
 
Néanmoins, un décret ministériel pris en ce sens n’aurait aucune incidence sur le réel. En effet, la mouvance « black blocs » est un groupement de fait, sans organisation, sans représentant, transnational et bien évidemment sans la moindre existence juridique. On touche alors aux limites de la puissance du droit : fût-il pris en conseil des ministres, un décret n’a pas la capacité de détruire un regroupement d’individus qui n’existe que ponctuellement, pour disparaître et se reconstituer aussitôt.

Juridiquement, les « black blocs » semblent donc insaisissables en tant que groupement, puisque le droit ne peut pas agir sur ce qui n’existe pas dans l’ordonnancement juridique.

2 / Peut-on sanctionner individuellement les blacks blocs ?

Sur le plan pénal, l’arsenal juridique semble en revanche suffisant pour sanctionner individuellement les « black blocs ».

En effet, comme il a pu être constaté lors des manifestations contre la réforme des retraites, les individus identifiés comme casseurs au sein du rassemblement peuvent rapidement être interpellés par les forces de l’ordre, placés en garde à vue puis déférés devant le Procureur de la République ou le juge d’instruction.

Dans ce cadre, outre les sanctions pénales pouvant aller jusqu’à la prison (en fonction des infractions commises) une interdiction de manifester pourra être prononcée à leur endroit sous la forme d’une peine complémentaire prévue à l’article L. 211-13 du Code de la sécurité intérieure qui dispose que :

« Les personnes s’étant rendues coupables, lors du déroulement de manifestations sur la voie publique [de certaines infractions] encourent également la peine complémentaire d’interdiction de participer à des manifestations sur la voie publique, dans des lieux fixés par la décision de condamnation, pour une durée ne pouvant excéder trois ans. […] Le fait pour une personne de participer à une manifestation en méconnaissance de cette interdiction est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »

Cette interdiction pénale de manifester est toutefois prononcée a posteriori contre le casseur : le mal est donc déjà fait. Elle limitera peut-être le risque de récidive, mais n’aura aucun effet sur les dégâts déjà occasionnés.

On touche ici à une limite de notre droit, mais également à son évolution possible : c’est la création d’une interdiction administrative individuelle de manifester, en amont de toute infraction, qui constitue une troisième piste de réflexion.

3/ La création d’une interdiction administrative individuelle de manifester

Tous les français sont attachés à la liberté de manifester, protégée par l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789. Comme toute liberté, cette dernière s’exerce dans les limites du risque de trouble à l’ordre public, apprécié par l’autorité administrative sous le contrôle du juge.

Les pouvoirs publics peuvent ainsi interdire une manifestation si elle est de nature à troubler l’ordre public (A. L211-4 du Code de la sécurité intérieure), sans pour autant porter atteinte à la liberté de manifester.
 
On constate néanmoins que les « black blocs » se greffent toujours sur des manifestations existantes, en cours de défilé sans jamais en être à l’origine. L’interdiction préalable d’une manifestation dans son ensemble est donc sans effet sur ces groupes de casseurs opportunistes.
 
Plus efficace semble être l’interdiction administrative individuelle de manifester, qui n’existe pas à ce jour dans notre droit : c’est l’idée de donner la possibilité aux Préfets d’interdire à un ou plusieurs individus personnellement identifiés de manifester, pour une durée déterminée, sans qu’ils aient encore commis d'infraction.

Sont visés ici les individus identifiés par les pouvoirs publics comme appartenant à la mouvance « black blocs » qui n’auraient jamais été sanctionnés pénalement, mais s’apprêteraient à participer de manière imminente à une manifestation pour semer le chaos.

L’autorité préfectorale devrait apprécier si la personne concernée constitue une menace pour l’ordre public, en utilisant le faisceau d’indices suivant :

  • L’individu a déjà été nominativement condamné (le cas échéant), ou est « connu en tant que casseur violent » (sans nécessairement avoir été condamné) ;
  • Des risques sérieux et manifestes de trouble à l’ordre public sont existants ;
  • Des indices matériels faisant redouter la commission d’une infraction à l’occasion de la manifestation ont été relevés.
L’arrêté emporterait alors interdiction préalable pour la personne identifiée, de pénétrer, pendant une durée déterminée, au sein d’un périmètre spécifique comme celui d’une manifestation.

On pourrait imaginer un système de pointage en commissariat ou gendarmerie à l’occasion de chaque grande manifestation, à l’instar de la procédure prévue pour les hooligans interdits de stade, obligés de pointer le jour de chaque rencontre sportive de leur équipe, afin de s’assurer de la neutralisation des individus identifiés comme « black blocs ».

C’est dans le cadre d’un rapport parlementaire de 2015 qu’avait été proposée au législateur l’introduction dans le droit français d’un tel dispositif préalable d’interdiction administrative de manifester, en l’absence de toute infraction pénale.

Mais, alors que cette nouvelle mesure proportionnée et très efficace avait été votée en première lecture par le Parlement dans le cadre de la loi "anti-casseurs", c'est le Conseil constitutionnel qui a empêché son entrée en vigueur par sa décision contestable du 4 avril 2019 au nom du droit de toute personne à la "libre expression collective des idées et des opinions".

L'interdiction administrative de manifester est pourtant par ailleurs déjà fréquemment utilisée en Belgique et en Allemagne, avec efficacité selon le rapport parlementaire susmentionné.

Au regard des violences inouïes ayant émaillé le rassemblement à Sainte-Soline le 25 mars 2023 (méga-bassines) ou lors des manifestations contre la réforme des retraites, il semble que la piste de la création d’une interdiction administrative de manifester doive être aujourd'hui réactivée.

Bien utilisée, elle aurait pour avantage de neutraliser des « black blocs » en amont de manifestations identifiées comme à risque et donc de limiter le risque de violence. N'en déplaise au Conseil constitutionnel, la liberté d'expression n'est pas la liberté de casser, et un casseur n'est pas un manifestant. 

Cette mesure n’est pas seule à même de répondre à la menace « black blocs » et le droit ne peut pas tout face au réel. Elle a toutefois le mérite de constituer une piste intéressante d’évolution de notre droit, aux fins de préserver partout l’ordre républicain, dans le respect de la liberté de manifester.

Untitled 1Une proposition de loi pour un référendum d'initiative partagée sur la réforme des retraites a été déposée vendredi 17 mars 2023 sur le bureau de la présidente de l'Assemblée nationale (Franceinfo). Si une majorité des français semble opposée à cette réforme, ce n’est certainement pas cette procédure référendaire qui parviendra à la bloquer : elle ne verra jamais le jour.

Il n'y aura pas de référendum d'initiative partagée sur le sujet de la réforme des retraites, car les conditions sont impossibles à réunir en l'état des textes applicables pour provoquer une consultation populaire.

Les conditions de recours à cette votation populaire, jamais utilisée depuis sa création en 2007, sont en effet si strictes qu’il est hautement improbable que cette voie référendaire débouche dans la pratique sur une quelconque consultation des citoyens sur le sujet des retraites.

La procédure suppose en effet une initiative d’au moins 1/5 des membres du Parlement (soit 185 parlementaires au moins), qui doivent d’abord déposer une proposition de loi d’initiative référendaire sur le bureau de l'Assemblée nationale ou du Sénat (A. 1 LO du 06/12/13). Cette étape semble acquise à ce stade sur le sujet des retraites selon les informations de Franceinfo, puisque le texte aurait été signé par 252 parlementaires.

Néanmoins, la proposition de loi doit, dans un deuxième temps, être transmise au Conseil constitutionnel par le président de l'assemblée saisie, qui va opérer un contrôle obligatoire très poussé (A. 1 LO du 06/12/13), en vérifiant qu'elle :

  • a bien été initialement portée par 1/5 des membres du Parlement,
  • entre strictement dans les matières référendaires de l’article 11 alinéa 1 de la Constitution,
  • n’a pas pour objet l’abrogation d’un texte promulgué depuis moins d’un an,
  • n’a pas un objet identique à celui d’une proposition déjà rejetée par les électeurs depuis moins de deux ans,
  • n’est pas contraire à la Constitution (dans le délai d’un mois),
  • et ne conduit pas à la diminution de ressources publiques ou à la création / aggravation d’une charge publique.
Le strict contrôle obligatoire opéré par le Conseil constitutionnel en la matière constitue un frein supplémentaire spécifique à cette procédure. D’autant plus que, si le Parlement adopte la loi portant réforme des retraites avant l’organisation du référendum sollicité (ce qui est hautement probable avec l'utilisation de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution), ce vote fera directement obstacle à la possibilité d’organiser un référendum sur le sujet (la consultation serait alors interdite comme portant sur l’abrogation d’un texte promulgué depuis moins d’un an).

Si malgré tout la proposition de loi passait le filtre du Conseil constitutionnel et que la loi sur la réforme des retraites n’était pas adoptée par le Parlement dans l’intervalle, s’ouvrirait une période de 9 mois pendant laquelle elle devrait recueillir le soutien d’au moins un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales, soit 4,7 millions d’électeurs environ.

Il faut toutefois relever que le soutien est recueilli sous forme électronique sur le site internet https://www.referendum.interieur.gouv.fr (via ordinateur, smartphone, tablette, etc.) (A. 5 LO du 06/12/13) et que la liste des électeurs qui soutiennent une demande de référendum est publiée dans son intégralité, par ordre alphabétique sur le site internet dédié. Elle peut donc être consultée par toute personne se rendant sur le site (A. 7 LO du 06/12/13).

Pire encore, la liste doit préciser pour chaque électeur soutenant la proposition de loi (A. 4 décret du 11/12/14) :

  • son nom,
  • son prénom,
  • sa commune, son village ou son consulat d'inscription sur les listes électorales.

Cette diffusion de données personnelles sur internet pourrait être de nature à dissuader un certain nombre de citoyens d’apporter leur soutien à la proposition de loi référendaire (de crainte de voir leurs opinions politiques portées sur la place publique) d’autant plus que tout soutien apporté ne peut plus être retiré.

Mais ce n’est pas tout !

Si la proposition de loi passait tous ces premiers filtres, elle retournerait ensuite devant les Assemblées qui devraient obligatoirement l’examiner au moins une fois dans un délai de 6 mois à compter de la publication de la décision du Conseil Constitutionnel.

Enfin, et c’est le plus important, si le texte n’était pas adopté par le Parlement dans ce délai c’est le Président de la République qui serait in fine seul compétent pour décider souverainement de soumettre, ou pas, la proposition au vote des électeurs par référendum, sans que l’on puisse envisager de moyen de l’y contraindre (A. 9 LO du 06/12/13), ni de soumettre au juge la décision prise.

Calendrier du référendum d’initiative partagée (extrait rapport parlementaire)
Calendrier du référendum d’initiative partagée (extrait rapport parlementaire)

L’examen attentif de la procédure applicable démontre donc qu’un référendum d’initiative partagée sur le sujet de la réforme des retraites est bien loin de voir le jour, comme sur tout autre sujet d’ailleurs.

Pour rappel, l’outil du référendum d’initiative partagée a coûté un total de 5 millions d’euros au contribuable sans jamais avoir été utilisé à ce jour.

Il n'y aura donc pas de référendum d'initiative partagée sur le sujet de la réforme des retraites, car les conditions sont impossibles à réunir en l'état des textes applicables. Il serait intéressant de réfléchir à l'évolution de ces conditions, pour les assouplir dans le cadre de la réforme des institutions à venir.

À ce jour, la procédure du référendum d'initiative partagée est simplement utilisée par des parlementaires pour faire parler d'un sujet, sans qu'elle ne débouche sur aucune votation, ce qui est regrettable.

***

Lire aussi :

Les millions d'euros d'argent public gaspillés du référendum d'initiative partagée

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La grève des éboueurs empire à Paris avec plus de 10 000 tonnes de déchets entassés sur les trottoirs le 16 mars 2023. Après le refus de la maire de Paris de faire procéder à l’enlèvement des ordures ménagères sur sa commune, le préfet de police a annoncé qu’il allait procéder à la réquisition des personnels en grève.

On fait le point en la matière avec 10 questions juridiques autour de la grève des éboueurs :

1 / Qui est responsable de l’enlèvement des ordures ménagères sur une commune ?
2/ Quelles conséquences si l’enlèvement des ordures ménagères n’est pas effectué dans une commune ?
3/ Peut-on faire procéder de force à l’enlèvement des ordures ménagères ?
4/ Comment s’opère concrètement la réquisition du personnel nécessaire à l’enlèvement des ordures ménagères ?
5/ La réquisition n’est-elle pas un obstacle illégal au droit de grève ?
6/ Est-ce que tous les agents du service municipal d’enlèvement des ordures ménagères peuvent être réquisitionnés ?
7/ Un agent peut-il s’opposer à sa réquisition ?
8/ La réquisition est-elle juridiquement contestable ?
9/ Existe-t-il un service minimum d’enlèvement des ordures ménagères ?
10/ Peut-on révoquer un maire défaillant en matière d’enlèvement des ordures ménagères ?

*** 

2023 03 16 Poubelles parisParis, le mercredi 15 mars 2023 

  1. Qui est responsable de l’enlèvement des ordures ménagères sur une commune ?

Le maire est responsable de l’ordre public sur le territoire de sa commune. La salubrité publique fait partie de l’ordre public[1]. C’est donc le maire qui est garant de la salubrité de sa commune et doit mettre en œuvre tous ses pouvoirs en ce sens.

  1. Quelles conséquences si l’enlèvement des ordures ménagères n’est pas effectué dans une commune ?

Le non-enlèvement des ordures ménagères dans une commune fait naître un risque de salubrité publique. La responsabilité de la survenance de ce risque incombe au maire, garant de l’ordre public, pour carence fautive dans l’exercice de ses pouvoirs de police.

  1. Peut-on faire procéder de force à l’enlèvement des ordures ménagères ?

En cas de carence fautive du maire dans la mise en œuvre de ses pouvoirs de police, le préfet peut s’y substituer en procédant à des réquisitions de personnels[2].

L’exercice du droit de réquisition suppose deux conditions : l'inaction du maire et une mise en demeure préalable demeurée infructueuse.

  1. Comment s’opère concrètement la réquisition du personnel nécessaire à l’enlèvement des ordures ménagères ?

Le préfet peut procéder à la réquisition du personnel nécessaire à l’enlèvement des ordures ménagères après une mise en demeure adressée au maire sans résultat.

Il n’existe pas de délai prévu par les textes pour cette mise en demeure, qui peut donc être très brève.

Lorsqu’il met en œuvre la réquisition, le préfet exerce alors ce pouvoir au nom et pour le compte de la commune et engage la responsabilité de la commune, et non de l'État, en cas de dommages[3].

  1. La réquisition n’est-elle pas un obstacle illégal au droit de grève ?

Non. La Constitution dispose que le droit de grève n’est pas absolu, mais qu’il s’exerce « dans le cadre des lois qui le réglementent »[4].

Le droit de grève doit donc être concilié avec les impératifs de l’ordre public, où il trouve sa limite.

Dans la mesure où les réquisitions ne concernent pas tous les agents, mais seulement un petit contingent nécessaire pour assurer un service minimum, elle est compatible avec le droit de grève.

Le Conseil constitutionnel a même déjà jugé qu’il appartient au législateur d’apporter au droit de grève les limitations nécessaires en vue d’assurer la continuité du service public, et que « ces limitations peuvent aller jusqu’à l’interdiction du droit de grève aux agents dont la présence est indispensable pour assurer le fonctionnement des éléments du service dont l’interruption porterait atteinte aux besoins essentiels du pays »[5].

  1. Est-ce que tous les agents du service municipal d’enlèvement des ordures ménagères peuvent être réquisitionnés ?

Non. En pratique, la réquisition s’opère par arrêté préfectoral listant les personnels réquisitionnés. Le préfet ne réquisitionne pas tous les agents, mais seulement un contingent nécessaire pour assurer un minimum de service.

Si la réquisition est trop large, elle risque en effet de porter atteinte à l’exercice du droit de grève. Le droit de grève et les impératifs de l’ordre public doivent être conciliés, sans que l’un empiète trop sur l’autre.

  1. Un agent peut-il s’opposer à sa réquisition ?

Non. Le fait pour un agent de faire obstacle à sa réquisition est passible de sanctions disciplinaires et pénales.

  1. La réquisition est-elle juridiquement contestable ?

Oui. Le tribunal administratif de ressort peut être saisi d’un recours contre l’arrêté préfectoral portant réquisition de personnels. S’agissant d’une liberté fondamentale (le droit de grève) un recours en référé liberté est envisageable.

La décision est alors rendue par le juge dans un délai très bref de 48H[6].

  1. Existe-t-il un service minimum d’enlèvement des ordures ménagères ?

Non, il n’existe pas de service minimum d’enlèvement des ordures ménagères. Il n’existe pas de loi générale sur le service minimum, mais simplement des textes sectoriels le prévoyant de manière exceptionnelle, comme en matière de transports publics[7] ou d’écoles maternelles[8].

Il serait possible d’instaurer un service minimum d’enlèvement des ordures ménagères par la loi.

  1. Peut-on révoquer un maire défaillant en matière d’enlèvement des ordures ménagères ?

En cas de manquements graves et répétés aux obligations qui s’attachent aux fonctions de maire, le premier édile peut être suspendu par arrêté ministériel motivé ou révoqué par décret motivé pris en conseil des ministres.[9]

Un maire défaillant en matière d’enlèvement des ordures ménagères ne pourrait donc pas être immédiatement révoqué, mais en cas de manquements graves et répétés à ses obligations de maintien de l’ordre public, dont l’enlèvement des ordures ménagères fait partie, la sanction devient possible.

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Lire aussi :

- "10 questions sur le service minimum en France"
- "Pourquoi le service minimum dans les transports publics ne fonctionne pas en France"
- "Banderole contre la réforme des retraites sur la Mairie de Paris : c’est totalement illégal"

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[1] Article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales

[2] Article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales

[3] CE 16 févr. 1979, Mallisson

[4] Alinéa 7 du préambule de la Constitution de 1946

[5] Conseil constitutionnel, Décision n° 87-230 DC du 28 juillet 1987

[6] Article L. 521-2 du code de justice administrative

[7] Article L. 1222-1 et suivants du code des transports

[8] Loi n° 2008-790 du 20 août 2008 instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire

[9] Article L. 2122-16 du code général des collectivités territoriales

 

 

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Le samedi 25 février 2023, le maire de la commune de Fameck (57290) a annoncé sa décision de déprogrammer un spectacle co-écrit par Pierre Palmade dont la représentation devait avoir lieu le 10 mars[1].

Mais est-ce bien légal ?

OUI… mais pas n’importe comment

L’interdiction préventive d’un spectacle écrit ou joué par Pierre Palmade ne peut être fondée que sur un strict motif d’ordre public, comme un appel de manifestants à venir perturber la soirée en nombre, car le juge administratif est très sensible à la protection des libertés comme la liberté de réunion et d’expression. Or en l’état, le maire de la commune où doit se tenir le spectacle le 10 mars a invoqué le motif de « la lutte contre le trafic de stupéfiants » pour l’interdire, ce qui paraît inadéquat et insuffisant. Saisi en référé liberté, le juge pourrait ordonner le maintien de la représentation et déjuger le maire.

La représentation d’un spectacle est à la croisée de plusieurs libertés fondamentales : liberté de réunion, liberté d’expression, liberté du commerce et de l’industrie, etc.

À l’inverse, l’interdiction d’une représentation est une mesure de police administrative attentatoire à ces libertés pour une raison d’ordre public.

En droit français, la conciliation entre l’exercice des libertés fondamentales et la protection nécessaire de l’ordre public peut être résumée par l’adage « La liberté est la règle, la restriction de police l’exception »[2].

Le système français est donc équilibré de la manière suivante : les libertés publiques doivent être protégées de manière absolue ; néanmoins, l’exercice de ces libertés ne saurait pouvoir troubler l’ordre public établi par la loi. C’est la traduction juridique de la célèbre maxime « La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres ».

La limitation proportionnée de l’exercice d’une liberté ne peut ainsi se justifier que par une stricte raison d’ordre public[3].

Un maire ne peut donc interdire la représentation d’un spectacle prévu sur le territoire de sa commune que pour une raison liée à la sauvegarde de l’ordre public, c’est-à-dire le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques[4].

L’autorité de police doit toujours être en mesure de démontrer que la mesure restrictive de liberté n’est pas excessive par rapport au risque de trouble à l’ordre public, sous le contrôle du juge administratif. En définitive, pour qu’une mesure de police soit légale, il faut ainsi qu’elle tende à maintenir l’ordre public par les moyens les moins rigoureux possibles[5].

L’accident dramatique causé par Pierre Palmade le 10 février 2023, qui a entraîné la mort d’un enfant à naître, a suscité une forte émotion nationale[6]. Dans ce contexte, il est compréhensible que la représentation d’un spectacle co-écrit par l’humoriste puisse susciter la polémique dans une commune de taille moyenne. Cependant, l’émotion ne suffit pas pour interdire légalement un spectacle : il faut qu’un vrai risque de trouble à l’ordre public soit caractérisé.

L’interdiction préventive du spectacle du 10 mars pourrait se justifier si le maire mettait en avant un risque fort de manifestations destinées à interrompre ou troubler la représentation au nom, pourquoi pas, de la sécurité routière ou pour faire parler du sujet. Surtout, le maire doit disposer d’éléments précis à cet effet, c’est-à-dire d’un appel à manifester, ou de messages publiés sur les réseaux sociaux appelant à troubler la représentation. En absence d’éléments précis en ce sens, l’interdiction est illégale. C’est ce qu’a déjà jugé le Conseil d’État à propos des spectacles de l’humoriste controversé Dieudonné en 2015[7].

Or, dans une interview du samedi 25 février 2023, le maire de Fameck a préféré mettre un avant « la lutte contre le trafic de stupéfiants » pour justifier l’interdiction préventive du spectacle co-écrit par Pierre Palmade sur le territoire de sa commune[8]. Une telle justification apparaît très fragile et insuffisante compte tenu des règles strictes posées par la loi et la jurisprudence pour interdire un spectacle. En l’absence d’éléments précis permettant de caractériser un vrai risque de trouble à l’ordre public à Fameck le 10 mars, l’interdiction prise par le maire semble excessive. Le juge administratif est en effet très sensible à la protection de la liberté d’expression, qui est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés.

Si les organisateurs du spectacle co-écrit par Pierre Palmade souhaitent contester la mesure d’interdiction préventive prise par le maire de Fameck, ils disposent de la possibilité de saisir le juge administratif en urgence en référé liberté[9]. Le juge se prononcera alors dans les 48 heures pour ordonner ou non le maintien de la représentation. En l’état des justifications avancées par le maire, le juge pourrait dans ce cadre ordonner le maintien de la pièce.

Face à de tels événements tragiques, revient toujours l’éternel questionnement : faut-il séparer l’homme de l’artiste ?

 

[1] BFMTV

[2] CE, 10 août 1917, Baldy, n°59855

[3] CE, 19 mai 1933, Benjamin, n°17413, 17520

[4] Article L. 2212-2 du CGCT

[5] CE, 21 janvier 1994, Commune de Dammarie-Les-Lys, n° 120043

[6] Le Parisien

[7] CE, réf., 6 févr. 2015, n° 387726 ; CE 9 nov. 2015, n° 376107

[8] BFMTV

[9] Article L. 521-2 du CJA


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Le mercredi 22 février 2023 à 10H, une enseignante d’espagnol du lycée privé Saint Thomas d’Aquin de Saint-Jean-de-Luz a été mortellement poignardée par un élève en pleine classe (Le Monde). Qui est responsable juridiquement ?

La première responsabilité est celle de l’auteur des faits, qui sera recherchée sur le plan pénal. Il est néanmoins intéressant de s’intéresser à la responsabilité de l’État, qui a placé son agent dans une situation dangereuse.

Une obligation de sécurité pèse sur l’employeur public vis-à-vis de tous ses agents (1). Dans l’hypothèse de la survenance d’un événement dramatique au cours du service, le régime de responsabilité applicable est celui de la responsabilité sans faute, facile à engager pour les ayants droit, qui seront indemnisés par l’État sans avoir à prouver le manquement à son obligation de sécurité (2). Si d’autres enseignants s’estiment en danger dans ce contexte, ils peuvent exercer leur droit de retrait (3).

1/ Une obligation de sécurité de résultat pèse sur l’employeur public vis-à-vis de tous ses agents

Les enseignants des établissements privés associés à l’État ne sont pas des fonctionnaires titulaires, mais des agents contractuels de droit public. Les droits et obligations des fonctionnaires sont toutefois dans l’ensemble applicables aux agents contractuels dans la fonction publique.

Le code général de la fonction publique consacre une obligation de sécurité de l’employeur public vis-à-vis de ses agents « Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux agents publics durant leur travail »[1]. Pour l’application de ces dispositions, le code général de la fonction publique renvoie très largement aux dispositions applicables dans le code du travail.

En droit du travail, l’obligation de sécurité de l’employeur vis-à-vis de ses salariés a été assouplie par la jurisprudence, d’une stricte obligation de résultat à une obligation considérée par la doctrine comme "de moyens renforcée"[2].

Dans la sphère publique, c’est sur le chef de service que repose l’obligation de sécurité des agents[3]. L’administration doit donc prendre toutes les mesures qui s’imposent pour ne pas placer ses agents dans une situation dangereuse, avec un risque de survenance d’un dommage. Il s’agit d’une stricte obligation de résultat.

2/ Le régime de responsabilité applicable est celui de la responsabilité sans faute, facile à engager

Le manquement à l’obligation de sécurité qui incombe à l’État semble aisé à établir pour le drame du 22 février 2023, s’agissant d’un élève qui a apporté en classe un grand couteau dans son sac et dont la dangerosité n’a pas été décelée en amont. Le débat sur l’installation de portiques de sécurité obligatoires à l’entrée des établissements rebondira probablement médiatiquement.

Cependant, pour engager la responsabilité de l’État en la matière, il n’est même pas nécessaire juridiquement de prouver un dysfonctionnement de sa part.

En effet, dans l’hypothèse de la survenance d’un accident ou d’un événement dramatique au cours du service, les agents de l’administration et leurs ayants droit bénéficient d’un régime de responsabilité sans faute de l’État[4] c’est-à-dire automatique.

La responsabilité sans faute est une responsabilité pouvant être engagée de plein droit, d’ordre public, même en l’absence de faute. Ceci signifie que les ayants droit de l’enseignante tuée pendant le service n’auront même pas besoin de démontrer que l’État a manqué à son obligation de sécurité pour engager sa responsabilité : celle-ci sera, en quelque sorte automatique et découle de la simple survenance de l’événement dramatique qui sera reconnu comme un accident de service (agression sur le lieu et dans le temps de service de l’agent).

L’indemnisation des ayants droit de la victime sera donc de droit, à charge pour l’État de se retourner contre l’auteur des faits dans le cadre d’une action récursoire et nonobstant les poursuites pénales engagées contre l’auteur des faits.

3/ Si d’autres enseignants s’estiment en danger dans ce contexte, ils peuvent exercer leur droit de retrait

Dans ce contexte dramatique, si d’autres enseignants s’estiment en situation de danger, ils pourront exercer leur droit de retrait. Il faut toutefois des circonstances précises.

Le droit de retrait ne peut en effet être exercé qu’en cas de situation professionnelle présentant un danger grave et imminent pour la santé physique de l’agent.

Les textes prévoient ainsi que l'agent doit alerter immédiatement l'autorité administrative compétente de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection[5].

Il peut se retirer d'une telle situation.

L'autorité administrative ne peut alors pas demander à l'agent qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans cette situation, ni appliquer aucune sanction disciplinaire ni aucune retenue de traitement.

On peut penser en l’espèce que les enseignants du lycée privé Saint Thomas d’Aquin de Saint-Jean-de-Luz pourront exercer leur droit de retrait, mais pas tous les agents de l’éducation nationale sans circonstances locales particulières.

 

[1] Article L. 136-1 du code général de la fonction publique

[2] Soc. 8 nov. 2017, n°16-18.008, NP

[3] CE, sect., 7 février 1936, Jamart, req. n°43321

[4] CE, 21 juin 1895, Cames, req. n° 82490

[5] Décret n°82-453 du 28 mai 1982


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