Le maire de la commune de Saint-Brévin (Loire-Atlantique) a annoncé démissionner de ses fonctions le 9 mai 2023 en raison de l'incendie de son domicile personnel par des opposants à l'installation d'un centre d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) dans le village, auquel l'édile était favorable (
Le Figaro).
Avec l'écho médiatique de cette affaire, beaucoup se sont prononcés en faveur d'une consultation des habitants en amont de tout projet similaire. Si l’opportunité politique d’une telle consultation se comprend aisément, se pose nécessairement la question de sa légalité juridique.
La réponse est négative : le maire ne peut pas organiser de référendum local sur l'accueil de migrants sur le territoire de sa commune, dans la mesure où il s'agit d'une compétence étatique sur laquelle il n'a pas la main.
En effet, tout projet ne peut pas donner lieu à référendum local dans la mesure où le champ d’application de telles consultations est strictement limité par la loi :
- Le projet soumis à référendum doit relever de la compétence de la collectivité qui l’organise,
- Et le projet ne peut pas être de nature à compromettre l’exercice d’une liberté publique ou individuelle.
Or
l’hébergement d’urgence (compétence dont relève l’accueil de migrants sur un territoire)
est une compétente étatique, qui ne relève donc pas de la compétence de la commune, malgré la décentralisation.
Le maire ne peut donc pas, en l’état des textes applicables, organiser de référendum décisionnel local sur l’accueil de migrants dans sa commune.
Pour cette raison, des tribunaux administratifs ont déjà suspendu en urgence l'organisation de tels référendums locaux pour violation d’une condition de fond de la consultation locale, comme à Allex dans le sud de la France (Le Figaro).
Nul doute que cette impasse juridique ne calmera pas les tensions sur l’accueil des migrants à l’échelon local, comme à Saint-Brévin.
Si le référendum local sur ce sujet était un jour autorisé, la procédure applicable résulterait de
l’article 72-1 de la Constitution précisé par les
articles LO 1112-1 et suivants du CGCT, avec les étapes suivantes :
- L’exécutif local est seul compétent pour proposer à l’assemblée délibérante de la collectivité l’organisation d’un référendum local,
- L’assemblée délibérante fixe par délibération les modalités d’organisation du référendum local, le jour du scrutin, convoque les électeurs et précise le projet d’acte ou de délibération soumis à l’approbation des électeurs,
- La délibération est transmise au Préfet (en charge du contrôle de légalité),
- Le scrutin ne peut intervenir moins de deux mois après cette transmission,
- Le projet est adopté si la moitié au moins des électeurs inscrits a pris part au scrutin, et s’il réunit la majorité des suffrages exprimés,
- Si le projet est adopté, la collectivité est tenue de suivre la décision des urnes (le référendum est décisionnel et non consultatif, ce qui le différencie de la simple consultation locale).
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