Avocat Droit Public
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Le drapeau national a été retiré sur la Préfecture en Guadeloupe.
— Christine KELLY (@christine_kelly) October 27, 2021
Il a été « remplacé ». #drapeaunational pic.twitter.com/VBzvQ32kxV
A voté, à Saint-Denis ? pic.twitter.com/MnODlWQnTe
— Jordan Bardella (@J_Bardella) June 20, 2021
Peuvent avoir la qualité d’assesseur (bénévole) tous les électeurs de la commune ainsi que les conseillers municipaux (Article R44 du Code électoral).
Le Code électoral ne prévoit aucune obligation de neutralité pour les assesseurs des bureaux de vote en son sein.
C’est le Conseil d’État qui est venu préciser, par un arrêt remarqué du 15 novembre 2004 (n°268543) que le président et les membres du bureau de vote sont astreints à une obligation de neutralité, afin de ne pas porter atteinte à la liberté et à la sincérité du vote des électeurs :
« Considérant que l'aménagement des locaux dans lesquels se déroule un scrutin ne doit pas porter atteinte à la liberté et à la sincérité du vote et doit, donc, être neutre ; qu'au cours du déroulement du scrutin, le président et les membres du bureau de vote sont, eux-mêmes, astreints à une obligation de neutralité (...) »
Il ne faut toutefois pas extrapoler cette jurisprudence circonstanciée, qui concerne la neutralité politique des membres de bureaux de vote, et non le principe de laïcité. L’obligation de neutralité posée par le Conseil d’État a ainsi vocation à prohiber l'intervention de tout message à connotation politique dans les locaux aménagés pour le vote et ainsi toute forme de pression ou de propagande sur les électeurs dans la salle de scrutin.
Dans le cadre d’une autre décision, le Conseil d’État avait ainsi sanctionné le maire sortant d’une commune qui avait présidé toute la journée le bureau de vote en arborant une tenue (chemise) partisane. La haute juridiction administrative avait annulé les opérations électorales sur ce fondement, estimant que la tenue avait constitué un moyen de pression sur les électeurs altérant la sincérité du scrutin :
« le maire sortant, M. A..., a voté ceint d'une chemise "paréo" aux couleurs de la "liste d'entente communale de Vairao" et a présidé le bureau de vote toute la journée dans cette tenue ; qu'outre l'attitude partisane ainsi adoptée, le maire sortant a arboré son écharpe tricolore, ce qui dans les circonstances de l'espèce, a constitué un moyen de pression supplémentaire sur les électeurs (...) » (Conseil d'État, 8 mars 2002, n°236291)
Le principe de neutralité politique auquel sont strictement astreints le président et les membres du bureau de vote ne peut donc pas être transposé au voile islamique, en l’état des textes applicables, tels qu’interprétés par le Conseil d’État. Sauf à considérer que le voile islamique constituerait une tenue vestimentaire politique de nature à influencer les électeurs, ce qui paraîtrait pour le moins alambiqué.
Enfin, certains pourraient envisager que cet assesseur aurait la qualité de collaborateur occasionnel du service public ou de fonctionnaire et serait donc soumis à une obligation de neutralité religieuse. Mais :
L’assesseur en charge du bureau de vote du candidat Jordan BARDELLA avait donc parfaitement le droit d’être voilée.
Si les règles venaient à changer sur ce point à l'avenir, certaines communes auraient encore plus de difficultés à trouver des assesseurs, qui sont déjà rares à se porter volontaires (BFMTV "Pénurie d'assesseurs à un mois des élections départementales et régionales") pour une fonction non rémunérée qui les mobilise sur deux dimanches de juin...
Lire aussi : "Élections départementales 2021 : une candidate peut-elle faire campagne voilée ?"
Face au terrorisme du Hamas, toutes nos pensées et notre soutien à Israël ?? pic.twitter.com/iFpwjSTbs0
— Christian Estrosi (@cestrosi) May 15, 2021
C’est cela la lutte contre le séparatisme @MarleneSchiappa ? pic.twitter.com/LBsS6Hs8Kl
— Jordan Bardella (@J_Bardella) May 10, 2021
Les valeurs portées par LREM ne sont pas compatibles avec le port ostentatoire de signes religieux sur un document de campagne électorale. Soit ces candidats changent leur photo, soit LREM leur retirera leur soutien. https://t.co/7jBY4sGH2j
— Stanislas Guerini (@StanGuerini) May 10, 2021
« Les établissements (…) figurant ci-après ne peuvent accueillir du public : (…) 4° Établissements de type Y : Musées, salles destinées à recevoir des expositions à vocation culturelle (scientifique, technique ou artistique, etc.), ayant un caractère temporaire ».
Les arrêtés du maire de Perpignan se heurtaient donc en l’espèce à deux règles juridiques fondamentales :On comprend en creux que le juge des référés n’est pas nécessairement en désaccord avec la position du maire de Perpignan, puisqu’il prend la peine de souligner en fin d’ordonnance que la mise en place de stricts protocoles sanitaires ou une évolution favorable du contexte sanitaire pourraient justifier une réouverture des musées à l'avenir.
Mais la décision rendue est fondée en droit sur l’incompétence de Louis Alliot : le premier édile de Perpignan n’a pas la compétence juridique pour se substituer au Premier ministre et rouvrir lui-même les musées de sa ville, comme le rappelle le juge :
« (…) dès lors qu’il est constant que (les musées) constituent des établissements relevant de la catégorie Y, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions par les arrêtés contestés du 8 février 2021 qui autorisent leur ouverture est, en l’état de l’instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de ces décisions, sans qu’y fasse obstacle la mise en place de protocoles sanitaires particulièrement stricts diminuant ainsi fortement le risque de transmission du virus dans ces établissements ou une évolution favorable du contexte sanitaire, qui, si elles sont susceptibles de remettre en cause l’appréciation portée par le Premier ministre sur la fermeture de ce type d’établissement, ne peuvent permettre à un maire de procéder lui-même à cette ouverture (…) ».
Le raisonnement du tribunal administratif de Montpellier est logique et imparable. On touche ici aux limites de la décentralisation qui, si elle confère des responsabilités élargies aux collectivités territoriales et donc aux maires, doit se concilier avec la déconcentration et l’unité du pouvoir politique de l’État : la France n’est pas un État fédéral. Si elle est critiquable, c’est la logique de l’égalité républicaine qui impose la même règle étatique sur l’ensemble du territoire national.
D’autant plus que le Conseil d’État a très fortement limité les pouvoirs de police du maire récemment dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire :
« Les articles L. 2212 1 et L. 2212 2 du code général des collectivités territoriales (…) autorisent le maire, y compris en période d’état d’urgence sanitaire, à prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques dans sa commune. Le maire peut, le cas échéant, à ce titre, prendre des dispositions destinées à contribuer à la bonne application, sur le territoire de la commune, des mesures décidées par les autorités compétentes de l’État, notamment en interdisant, au vu des circonstances locales, l’accès à des lieux où sont susceptibles de se produire des rassemblements. En revanche, la police spéciale instituée par le législateur fait obstacle, pendant la période où elle trouve à s’appliquer, à ce que le maire prenne au titre de son pouvoir de police générale des mesures destinées à lutter contre la catastrophe sanitaire, à moins que des raisons impérieuses liées à des circonstances locales en rendent l’édiction indispensable et à condition de ne pas compromettre, ce faisant, la cohérence et l’efficacité de celles prises dans ce but par les autorités compétentes de l’État » (CE, 17 avril 2020, n° 440057).
Pour résumer, les maires ne disposent donc pas à ce jour de la compétence juridique pour décider de l’ouverture de tel ou tel lieu de culture fermé par l’État pendant l’état d’urgence sanitaire et ne peuvent pas alléger les mesures d’interdiction étatique au titre de leur pouvoir de police, compte tenu de la situation sanitaire.
Les musées comme tous les lieux de culture sont donc suspendus au bon vouloir de l’État : ils resteront tous fermés ou rouvriront tous en même temps, sans entre-deux. Pour la santé de nos âmes, espérons une réouverture nationale au plus vite.
La vacance de la Présidence de la République n’a pas de conséquence directe immédiate sur les mandats des députés ou sur les autres institutions. Si la logique commande une dissolution concomitante de l’Assemblée Nationale pour conférer une nouvelle majorité au Président, les textes ne l’obligent pas, interdisant même explicitement la dissolution opérée par le Président par intérim.
Historiquement, la situation de vacance de la Présidence de la République s’est présentée deux fois sous la Vème République, suite à la démission du Général de Gaulle le 28 avril 1969 et suite au décès du Président Georges Pompidou le 2 avril 1974. C’est le Président du Sénat Alain Poher qui, par deux fois, a alors assuré la Présidence de la République par intérim.
Dans la pire des situations, à savoir celle d’une forme grave de Covid-19 pour le Président Macron, ou pire, c’est le Président du Sénat Gérard Larcher qui assurerait donc l’intérim de la Présidence de la République pendant au moins 20 jours, jusqu’à convocation des électeurs aux urnes.
Une forme légère de Covid-19 n’implique enfin aucune vacance de la Présidence de la République, qui peut continuer à assurer ses fonctions pendant sa convalescence. Nous lui souhaitons un prompt rétablissement.
Ce faisant, le Premier ministre peut légalement porter atteinte, de manière mesurée, aux libertés fondamentales au nom de l’impératif de protection de la santé publique, composante sanitaire de l’ordre public.
Dans ce cadre, compte tenu de la persistance du nouveau coronavirus (covid-19) particulièrement contagieux sur le territoire national, le Premier ministre a pris un décret n° 2020-1454 du 27 novembre 2020 modifiant un précédent décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 venant encadrer de manière particulièrement stricte la réouverture des établissements de culte (ERP de catégorie V) :
« Les établissements de culte, relevant de la catégorie V, sont autorisés à rester ouverts. Tout rassemblement ou réunion en leur sein est interdit à l'exception des cérémonies religieuses dans la limite de 30 personnes. ».
Considérant que ce décret portait atteinte à la liberté de culte en posant une limite de 30 personnes seulement pour les cérémonies religieuses, des associations religieuses catholiques ont saisi le Conseil d’État en urgence, lui demandant d’en suspendre l’exécution et d’enjoindre au Premier ministre de modifier cette limite pour tous les cultes.
La procédure de référé-liberté permet en effet au juge des référés de se prononcer très rapidement sous 48H et d’ordonner « toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale » à condition qu’il lui soit démontré (article L521-2 du code de justice administrative) :
Par une ordonnance du 29 novembre 2020, le Conseil d’État a donné raison aux requérants en enjoignant au Premier ministre de modifier, dans un délai maximum de 3 jours le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020, afin d’encadrer de manière proportionnée les rassemblements et réunions dans les établissements de culte, et non pas de fixer une limite fixe de 30 personnes pour tous les lieux de culte.
C’est une décision bienvenue.
Pour parvenir à une telle solution, la Haute juridiction a pris en compte et rappelé de nombreux éléments.
En premier lieu, le Conseil d’État a considéré que la condition d’urgence était remplie compte tenu :
De manière surprenante, et à l’instar d’un précédent contentieux similaire en date du 18 mai 2020, les pouvoirs publics n’avaient même pas contesté cette situation d’urgence dans le cadre de leur défense.
En deuxième lieu, le Conseil d’État a confirmé une nouvelle fois, comme le 18 mai 2020, que la liberté du culte présentait le caractère d’une liberté fondamentale pouvant justifier un référé-liberté, ce qui n’est pas nouveau dans sa jurisprudence (CE, ord., 16 février 2004, Benaissa, n°264314).
La Haute juridiction a rappelé à nouveau que cette liberté ne se limitait pas au droit de tout individu d’exprimer individuellement les convictions religieuses de son choix, mais qu’elle comportait également, parmi ses « composantes essentielles », le droit de « participer collectivement (…) à des cérémonies, en particulier dans les lieux de culte ».
Par le passé, le Conseil d’État avait d’ailleurs déjà pu juger que la « possibilité d'exprimer dans des formes appropriées ses convictions religieuses » constituait une liberté fondamentale (CE, ord., 7 avril 2004, Kilicikesen, n°266085).
En troisième lieu, confrontant les principes à la situation d’espèce, le Conseil d’État a considéré que le Premier ministre avait porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de culte par son décret du 27 novembre 2020.
Le Conseil d’État n’a pas nié la nécessité pour le Premier ministre d’encadrer les rassemblements au sein des établissements de culte compte tenu de la persistance de l’épidémie, mais lui reproche d’avoir posé une jauge de 30 personnes disproportionnée et non-justifiée dans le nouveau contexte issu de l’allègement du confinement.
Dans un État de droit, la liberté est la règle, et la restriction de police l’exception (CE, 10 août 1917, Baldy, n°59855). Les pouvoirs publics doivent donc toujours concilier l’exercice des libertés fondamentales avec l’impératif de protection de l’ordre public en trouvant un point d’équilibre. Pour qu’une mesure de police soit légale, il faut ainsi qu’elle tende à maintenir l’ordre public par les moyens les moins rigoureux possible (CE, 21 janvier 1994, Commune de Dammarie-Les-Lys, n° 120043) et qu’elle ne porte pas une atteinte excessive aux libertés fondamentales (CE, 19 mai 1933, Benjamin, n° 17413).
Le Conseil d’État a jugé que l’intervention du Premier Ministre était nécessaire pour encadrer la fréquentation des établissements de culte dans la mesure où :
Mais dans le même temps le Conseil d’État a jugé que le décret du Premier Ministre était excessif dans la mesure où :
Il en résulte, selon le Conseil d’État, que la limite de 30 personnes maximum pour les cérémonies religieuses imposée par le décret contesté présente un caractère disproportionné au regard de l’objectif de préservation de la santé publique. Cette interdiction constitue ainsi, eu égard au caractère essentiel de la composante en cause de la liberté de culte, une atteinte grave et manifestement illégale à cette dernière.
Dans ces conditions, le Conseil d’État enjoint au Premier ministre de modifier, dans un délai particulièrement bref de 3 jours maximum le décret initial n° 2020-1310 du 29 octobre 2020, afin d’encadrer de manière proportionnée les rassemblements et réunions dans les établissements de culte, et non pas de fixer une limite fixe de 30 personnes pour tous les lieux de culte.
***
C’est un signal fort envoyé par le Conseil d’État aux pouvoirs publics par cette décision.
En rappelant à nouveau le principe de la proportionnalité de la mesure de police, même en période exceptionnelle d’épidémie, le Conseil d’État remet une nouvelle fois l’Église au milieu du village.
En rappelant une nouvelle fois que la liberté de culte ne se limite pas au droit de tout individu d’exprimer individuellement les convictions religieuses de son choix, mais qu’elle comporte également, parmi ses composantes essentielles, le droit de participer collectivement à des cérémonies, le Conseil d’État fait également œuvre utile.
Enfin, on se gardera d’analyser la décision commentée comme un blanc-seing donné par le Conseil d’État à tous les rassemblements dans les établissements de culte, dans n’importe quelles conditions. Un strict protocole sanitaire avec une jauge de participants exprimée en pourcentage de la superficie des locaux et non plus en valeur absolue permettrait aux pouvoirs publics de contenir l’épidémie dans le respect de l’exercice de la liberté de culte. Ils ont 3 jours maximum pour ce faire.
Décision commentée : CE, ord., 29 novembre 2020, Association Civitas et autres, n°446930 et suivants
Parce qu’il faut lutter par tous les moyens contre la propagation du virus, y compris du fait de l’accumulation des clients dans les grandes surfaces, j’ai pris cet après-midi un arrêté pour autoriser la réouverture de l’ensemble des #commerces de la ville de Chalon. #confinement pic.twitter.com/lSstwDTpuN
— Gilles PLATRET (@gillesplatret) October 30, 2020
J'ai pris un arrêté municipal autorisant l'ouverture des commerces non-alimentaires à #Béziers. Tous les commerces de la ville sont autorisés à reprendre leur activité dès ce samedi 31 octobre pic.twitter.com/U0GMtS3sYP
— Robert Ménard (@RobertMenardFR) October 30, 2020
« Les articles L. 2212 1 et L. 2212 2 du code général des collectivités territoriales (…) autorisent le maire, y compris en période d’état d’urgence sanitaire, à prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques dans sa commune. Le maire peut, le cas échéant, à ce titre, prendre des dispositions destinées à contribuer à la bonne application, sur le territoire de la commune, des mesures décidées par les autorités compétentes de l’État, notamment en interdisant, au vu des circonstances locales, l’accès à des lieux où sont susceptibles de se produire des rassemblements. En revanche, la police spéciale instituée par le législateur fait obstacle, pendant la période où elle trouve à s’appliquer, à ce que le maire prenne au titre de son pouvoir de police générale des mesures destinées à lutter contre la catastrophe sanitaire, à moins que des raisons impérieuses liées à des circonstances locales en rendent l’édiction indispensable et à condition de ne pas compromettre, ce faisant, la cohérence et l’efficacité de celles prises dans ce but par les autorités compétentes de l’État » (CE, 17 avril 2020, n° 440057).
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