Pierrick Gardien

Pierrick Gardien

Avocat Droit Public
Enseignant aux Universités de Lyon

Ligne directe : 07.80.99.23.28

contact@sisyphe-avocats.fr

Affiche GIDAffiche de la manifestation interdite

« La liberté est la règle, la restriction de police l’exception ». C’est sur cet adage que repose près d’un siècle de conciliation par le juge, de l’exercice des libertés publiques avec la protection nécessaire de l'ordre public (CE, 10 août 1917, Baldy, n°59855).

Mais est-ce réellement toujours le cas aujourd’hui ?  

Il est vrai que le juste équilibre entre ces deux impératifs est difficile à trouver :

  • Déséquilibré d’une part, l’Etat manque à sa mission première d’offrir la sécurité à ses citoyens,
  • Déséquilibré d’autre part, l’Etat penche dangereusement vers l’autoritarisme.
La philosophie du système français se comprend aisément : les libertés publiques doivent être protégées de manière absolue. Que l’on pense, à titre d’illustration, à la liberté d’expression, de manifestation, ou de réunion. Néanmoins, l’exercice de ces libertés ne saurait pouvoir troubler l’ordre public établi par la loi. C’est la traduction juridique de la célèbre maxime « La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres ».

Par conséquent, seule la sauvegarde de l’ordre public (bon ordre, sûreté, sécurité et salubrité publiques selon l’article L.2212-2 du Code général des collectivités territoriales) peut justifier la limitation proportionnée de l’exercice d’une liberté (CE, 19 mai 1933, Benjamin, n°17413, 17520).

Dans ce cadre, l’autorité de police doit toujours être en mesure de démontrer que la mesure restrictive de liberté n’est pas excessive par rapport au risque de trouble à l’ordre public, sous le contrôle du juge administratif. En définitive, pour qu’une mesure de police soit légale, il faut ainsi qu’elle tende à maintenir l’ordre public par les moyens les moins rigoureux possibles (CE, 21 janvier 1994, Commune de Dammarie-Les-Lys, n° 120043).

Il devrait donc en résulter, en pratique, une quasi-impossibilité juridique d’interdire purement et simplement l’exercice d’une liberté : l’autorité de police ne sera en effet que rarement en situation de démontrer que le risque de trouble est d’une gravité telle que l’ordre public ne puisse être maintenu que par le prononcé d’une interdiction. Force est toutefois de constater que c’est loin d’être le cas aujourd’hui.

L’équilibre français peut donc se résumer de la sorte :

  • En amont, une autorisation d’exercice de toutes les libertés publiques (avec, au besoin, des garde-fous),
  • En aval, une pénalisation des comportements répréhensibles occasionnés, le cas échéant, par l’exercice de ces libertés.
L’équilibre consiste donc concrètement à autoriser l’exercice de la liberté (comme, par exemple, la tenue d’une manifestation), et à sanctionner a posteriori les infractions pouvant être commises à cette occasion (les dégradations occasionnées par les casseurs dans le cadre de la manifestation).

C’est cet équilibre initial qui nous paraît aujourd’hui menacé.

Il est en effet à craindre une inversion du système : sanctionner et interdire à titre préventif, pour éviter en amont la commission de toute infraction. L’autorisation deviendrait alors le dernier recours, dans un schéma inversé.

On s’appuiera sur deux exemples récents, volontairement polémiques et révélateurs de ce glissement.

Le premier concerne Dieudonné, personnage controversé et coutumier des prétoires. S’appuyant sur un « risque de trouble à l’ordre public », de nombreux maires ont successivement interdit, de manière préventive, les spectacles de l’humoriste, ce que la justice administrative a longtemps validé (CE, 9 janvier 2014, Ministre de l'intérieur c/ Société Les Productions de la Plume et M. Dieudonné M’Bala M’Bala, n° 374508), avant que le Conseil d’État ne se reprenne fort heureusement (CE, 6 février 2015, Commune de Cournon d’Auvergne, n°387726 ; CE, 13 novembre 2017, Commune de Marseille, n° 415400).

SisypheAvocats
Il convient de bien comprendre le raisonnement juridique qui fonde de tels arrêtés municipaux dirigés contre les spectacles de Dieudonné : ce n’est pas le trouble à l’ordre public, établi et constaté (par exemple, une manifestation qui dégénère) qui motive l’interdiction du spectacle, mais bien le seul risque de trouble à l’ordre à public (par exemple, la simple annonce d’une manifestation à venir destinée à troubler la représentation). 

Deuxième exemple, une manifestation du groupe « Génération Identitaire », ouvertement d’extrême droite, interdite préventivement par la Préfecture de Paris le 24 novembre 2017 au motif d’un risque de trouble à l’ordre public induit par l’annonce, par une association d’extrême-gauche, d’une contre-manifestation « antifa(sciste) » prévue pour perturber la première :

GID
Extrait de l'arrêté préfectoral d'interdiction

Saisi en référé, le Tribunal Administratif de Paris a validé le 25 novembre 2017 la décision de la Préfecture de Paris, confirmant donc l’interdiction de la manifestation. Là encore, aucun trouble à l’ordre public n’est matériellement établi, ni constaté puisque nous nous situons avant la manifestation. Le trouble n’est donc que potentiel, il n’est pas avéré. Il y a risque, mais il n’y a pas trouble:


Quelque chose interpelle dans le raisonnement des pouvoirs publics en la matière. En effet dans ces deux exemples, non seulement l’interdiction frappe alors même qu’aucun trouble à l’ordre public, aucune violence, aucun propos répréhensible n’est matériellement constaté, mais plus encore, le risque de trouble est généré non pas par celui qui souhaite exercer sa liberté (par exemple, « Génération Identitaire » pour la liberté de manifestation), mais par son adversaire qui souhaite l’en empêcher (dans notre exemple, les groupes antifascistes qui souhaitent empêcher la manifestation identitaire).

Comment analyser une telle situation autrement que comme celle d’une démission des pouvoirs publics face à la responsabilité qui leur incombe ? D’un effacement des libertés devant le simple risque de trouble à l’ordre public ? C’est la puissance publique qui est responsable du maintien de l’ordre public puisque seul l’Etat est en capacité d’assurer la sécurité à ses citoyens. C’est même sa raison d’être, le cœur du contrat social. C’est lui qui doit tout mettre en œuvre pour s’assurer de son maintien, dans toute configuration. 

Dès lors, au nom de quoi serait-ce à ceux qui, dans un État de droit et quels qu’ils soient, demandent légitimement à exercer leurs libertés fondamentales (liberté de réunion, liberté de manifestation, liberté d’expression), à supporter la défaillance de la puissance publique, qui s’avoue incapable de contenir des fauteurs de trouble à l’ordre public ? 

Nous constatons donc avec crainte un risque de renversement du régime de protection des libertés institué en droit français : une tendance à l’interdiction préventive de l’exercice des libertés au regard du risque éventuel de trouble à l’ordre public. L’utilisation du conditionnel par les pouvoirs publics devient fréquente, qui semblent préférer au vieux système d’autorisation avec contrôle, un nouveau système d’interdiction par anticipation.

C’est se tromper que de penser que cette situation n’est pas grave, puisqu’elle concerne Dieudonné et « Génération Identitaire », qui l’auraient bien cherché. Demain, elle concernera peut-être également d'autres associations, ou personnes souhaitant exercer leurs libertés. 

Un opposant politique vous dérange ? Annoncez à l’avance que vous allez perturber son meeting, vous regrouper et tout casser. Qu’importe que votre menace ne soit pas suivie d’effet : le risque de trouble à l’ordre public que vous aurez généré sera sans doute suffisant pour justifier l’interdiction préventive de la réunion de votre adversaire. 

Un tel raisonnement dérange. Pourquoi sanctionner celui qui cherche à exercer légitimement une liberté publique, et pas celui qui annonce ouvertement vouloir troubler l’ordre public ? N’y a-t-il pas là renversement de paradigme ? Peut-on se prémunir de tous risques ? Peut-on contrôler le futur ? Doit-on empêcher le réel d’avoir lieu ? L’interdiction est-elle une solution, ou un aveu d’échec ? Est-on fondé à sanctionner quelqu’un avant la commission d’une infraction ?

Laissons ces questions en suspens mais prenons garde à ce que la restriction de police ne devienne pas la règle, et la liberté l’exception.

SisypheAvocats

Le « roi des forains » Marcel Campion a menacé de « bloquer Paris » à compter de ce lundi 6 novembre 2017 si la mairie ne revenait pas sur sa décision de lui interdire l’installation du marché de Noël sur les Champs-Elysées cette année.

Au-delà du simple fait que la menace n’est jamais une méthode acceptable de résolution des différends (d’autant plus face à une personne publique), M. Campion est particulièrement mal-fondé à exiger de la Ville de Paris qu’elle revienne sur sa décision en la matière.

En effet, l’installation du village de Noël sur la partie basse des Champs-Elysées à Paris (entre le rond-point Marcel Dassault et la place de la Concorde) constitue juridiquement une occupation temporaire du domaine public.

Fort classiquement, cette installation a été formalisée dans le cadre d’une convention d’occupation du domaine public conclue entre la Ville de Paris et la SARL « Loisirs associés » (regroupement de forains) le 12 octobre 2015.

Cette convention a été conclue pour une durée de 2 ans, renouvelable par décision expresse de l’autorité administrative deux fois maximum, pour la même durée.

Or force est de constater que le « roi des forains » ne peut aujourd’hui se prévaloir d’aucun droit acquis à l’installation du marché de Noël sur l’avenue des Champs-Elysées.

En premier lieu, il est constant qu’aucune décision expresse de la Ville de Paris n’est venue renouveler expressément la convention conclue le 12 octobre 2015 : au terme des deux premières années d’exécution, et à défaut de reconduction expresse, la convention est donc devenue caduque le 12 octobre 2017.

En deuxième lieu, par une délibération du 5 juillet 2017 votée à l'unanimité, le Conseil de Paris, siégeant en formation de conseil municipal a émis le vœu que la convention conclue avec les forains ne soit pas renouvelée au terme des deux premières années d’exécution. Ce vœu a été entériné par Madame le maire de Paris, qui s’est abstenue de renouveler ladite convention.

Enfin, en dernier lieu, il n’y a pas l’ombre d’un doute sur le caractère juridiquement temporaire, précaire et révocable de toute convention d’occupation du domaine public. Le Code général de la propriété des personnes publiques (CGPP) dispose ainsi que :

  • L'occupation ou l'utilisation du domaine public ne peut être que temporaire (A.L.2122-2 CGPP),
  • L'autorisation d’occupation du domaine public présente un caractère précaire et révocable (A.L.2122-3 CGPP).
Le non-renouvellement d’une convention d’occupation du domaine public n’est ainsi jamais une sanction infligée au cocontractant, mais un pouvoir légitime de la personne publique qui reste toujours maître de la gestion de son domaine. Dès lors, de jurisprudence constante, il résulte des principes généraux de la domanialité publique que les titulaires d'autorisation d’occupation n'ont pas de droit acquis au renouvellement de leur titre (CE, 14 octobre 1991, n° 95857), et que la personne publique peut toujours s’opposer au renouvellement pour motif d’intérêt général (CE, 25 janvier 2017, Commune de Port-Vendres, n° 395314).

Coutumier des actions « coup de poing », le « roi des forains » Marcel Campion menace aujourd’hui de bloquer Paris, et d’installer de force son marché de Noël, estimant subir un important préjudice. Mais il confond faveur et droit acquis : c’est une erreur à la fois économique et juridique que d'escompter un chiffre d’affaires sur la reconduction d’une convention d’occupation du domaine public, par définition toujours incertaine. Il lui sera par ailleurs rappelé qu’un rapport provisoire de la Chambre régionale d’Île-de-France a très récemment étrillé sa gestion du marché de Noël de Paris entre 2010 et 2016, relevant « une gestion émaillée de nombreuses irrégularités, (qui) paraît échapper aux lois de la concurrence tout en ne fournissant que des revenus modestes au budget de Paris » (Le Point).

Il est donc clair que le "roi des forains" ne dispose à ce jour d'aucun titre l'habilitant à occuper l'avenue des Champs-Elysées avec son marché de Noël. Or nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public (A.L.2122-1 CGPP). Dans l’hypothèse où Marcel Campion installerait, malgré tout, son marché de force sur la plus belle avenue du monde, il se rendrait coupable d’une occupation sans titre du domaine public, justifiant une saisine en urgence par l’autorité administrative du juge des référés qui ordonnera son expulsion sans délai (A.L.521-3 CJA). 

Nous ne pouvons donc que le lui déconseiller.

vendredi, 27 octobre 2017 08:16

Jean-Paul II face au Conseil d'État

SisypheAvocatsPar une décision du 25 octobre 2017 « Fédération morbihannaise de la Libre Pensée et autres », le Conseil d’Etat a jugé contraire à la loi du 9 décembre 1905 l’installation d’une croix en surplomb d’une statue du pape Jean-Paul II érigée sur une place de la commune de Ploërmel (Morbihan).

Il ne fait aucun doute que l’édification d’une croix chrétienne isolée sur le domaine public est directement contraire aux dispositions de la loi du 9 décembre 1905, de séparation des Eglises et de l'Etat.

Néanmoins, un examen sérieux des faits d’espèce présentés au Conseil d’Etat s’agissant de la commune de Ploërmel rend discutable la décision rendue le 25 octobre, au terme d’un remarquable exercice de contorsion juridique.

En effet, pour parvenir à la solution rendue, le Conseil d’Etat a séparé, dans son appréciation, la statue en elle-même (représentant le pape Jean-Paul II), et la croix qui la surplombe. 

Cette distinction, qui pourrait paraître anodine, a toutefois une grande incidence juridique : si la croix a été jugée contraire aux dispositions de la loi de 1905, la statue de Jean-Paul II n’a pas été inquiétée.

En premier lieu, sur un plan purement procédural, la séparation de la statue et de la croix a pour effet immédiat de rendre recevable le recours présenté devant la juridiction administrative. L’installation de l’ouvrage a en effet été actée juridiquement par une délibération du conseil municipal de la commune de Ploërmel du 28 octobre 2006. Or le premier recours date du 6 avril 2012, soit plus de six ans après ! Sans entrer dans un degré de technicité trop important, et comme l’avait fort justement jugé la Cour administrative d’appel de Nantes dans ce litige, un recours exercé 6 ans après une délibération municipale (devenue donc définitive) n’est pas recevable, sauf changement de circonstances : le délai de recours a expiré. La requête de la Fédération morbihannaise de la Libre Pensée aurait donc dû être rejetée, avant même d’examiner son bien-fondé.

Mais en séparant la statue de sa croix, le Conseil d’Etat est venu opportunément faire échec à cette forclusion : la Haute juridiction a ainsi jugé que si le recours porté contre la statue elle-même n’était pas recevable, il en allait différemment du recours porté contre la croix seule. Selon le Conseil d’Etat, l’installation de la croix résulterait ainsi d’une décision du maire de la commune distincte de la délibération du conseil municipal du 28 octobre 2006. Cette décision du maire n’ayant jamais été publiée, elle pouvait donc toujours être contestée, même six ans après (les délais de recours ne courent pas contre les décisions administratives n’ayant fait l’objet d’aucune mesure de publicité). 

Pour qui a suivi ce raisonnement juridique alambiqué, la contorsion est grossière : comment le maire de Ploërmel aurait-il pu publier une décision qui n’existe pas ? Il est évident que la statue et sa croix forment un ensemble indissociable, sur lequel a porté la délibération du conseil municipal du 28 octobre 2006. En séparant fictivement la statue de sa croix, le Conseil d’Etat n’a donc fait, à point nommé, que rendre recevable un recours qui ne l’était pas. 

En second lieu, la séparation de la statue et de sa croix a pour effet de changer totalement l’issue du litige. Appréciée isolément, qui pourrait contester qu’une croix chrétienne de grande taille, édifiée au XXIème siècle sur le domaine public heurte directement les dispositions de la loi du 9 décembre 1905 ? C’est indéniable. Mais prise dans son environnement, c’est-à-dire celui d’une œuvre d’art globale, la solution est moins évidente. La décision du Conseil d’Etat est en effet à replacer dans un contexte jurisprudentiel récent, issu principalement de deux autres décisions que nous avions précédemment commentées (CE, 9 novembre 2016, Fédération départementale des libres penseurs de Seine-et-Marne, n° 395122 et CE, 9 novembre 2016, Fédération de la libre pensée de Vendée, n° 395223). Dans ces décisions de 2016 relatives aux crèches de Noël, le Conseil d’Etat avait établi un véritable mode d’emploi de la laïcité appliquée à l’espace public. Il en résulte que si la loi du 9 décembre 1905 interdit d’apposer des signes et emblèmes religieux sur, et dans, les bâtiments et emplacements publics, il n’en va pas de même pour les installations présentant un caractère culturel, artistique ou festif, ou témoignant d’un usage local. L’exception artistique est en effet expressément prévue par la loi de 1905, en son article 28. Or qui peut nier que la statue de Jean-Paul II installée à Ploërmel, appréciée dans son ensemble, présente un caractère artistique ? En outre, qui peut contester qu’outre sa qualité de Pape, Jean-Paul II était un chef d’État ? Il convient également de rappeler que la statue de la discorde a été offerte par l’artiste russe Zurab Tsereteli au maire de l’époque, M. Paul Anselin, sans que la question de la mobilisation de deniers publics (soulevée par le passé) ne puisse donc faire débat aujourd’hui. Enfin, il est constant que ledit ouvrage n’a fait l’objet d’aucune contestation de la part des administrés (si ce n’est des deux requérants, et de l’association coutumière de tels recours) ni d’aucun trouble à l’ordre public. 
    
L’objet du présent article n’est aucunement de démontrer que l’installation située sur la commune de Ploërmel serait absolument conforme aux règles de laïcité appliquées à l’espace public, auxquelles tous les républicains sont attachés. C’est d’affirmer que la décision rendue par le Conseil d’État est pour le moins discutable. Outre la question de la forclusion, qui aurait dû avoir pour effet, à notre sens, de tuer le débat dans l’œuf, c’est cette séparation de la statue et de sa croix dans l’appréciation portée par le Conseil d’État qui est gênante. 

C’est une nouvelle fois la lisibilité de la justice administrative qui est atteinte. Récemment, le 6 octobre 2017, la juridiction administrative décidait le même jour qu’une crèche de Noël était légale en Vendée, mais illégale en Rhône-Alpes. Le 25 octobre 2017, voilà que le Conseil d’Etat ne voit aucune incohérence à découper une même œuvre d’art en deux parties : une croix qui doit disparaître parce que chrétienne, et une statue représentant Jean-Paul II de 7,5 m de haut qui peut rester.

C’est s’engager sur une pente dangereuse et ce n’est surtout pas le rôle du juge que de choisir, au sein d’une œuvre, ce qui relève de l’art et du religieux. À notre sens, l’appréciation doit être globale : soit l’œuvre, dans son entier, méconnaît les règles de la loi de 1905 et elle n’a pas à figurer sur le domaine public (Jean-Paul II et sa croix doivent partir), soit elle les respecte et elle n’a pas à être inquiétée (Jean-Paul II et sa croix peuvent rester). En se perdant en contorsions juridiques, la justice administrative ne gagne pas en clarté. 

Au-delà du débat juridique, on relèvera en guise de conclusion que la Ville de Montpellier accueille depuis 7 ans sur sa place publique dite « des Grands Hommes » des statues monumentales de Lénine et de Mao Zedong (financées sur fonds publics), et que le parvis du centre Pompidou accueille en ce moment même à Paris une sculpture pornographique de 12 mètres de haut, sans susciter le même émoi.

SisypheAvocats

En réaction immédiate à l’affaire dite « Weinstein », les hashtags #BalanceTonPorc (en France) et #MeToo (aux Etats-Unis) ont libéré la parole des femmes victimes de harcèlement sexuel. Si rien ne répare la douleur psychologique, c’est toutefois l’occasion de rappeler les moyens juridiques dont disposent les victimes pour se défendre rapidement et efficacement dans la fonction publique.

Tout agissement constitutif de harcèlement sexuel dans la fonction publique peut être sanctionné sur le plan disciplinaire, et sur le plan pénal.

1/ Agir sur le plan disciplinaire

Par un arrêt de principe « La Poste SA » du 15 janvier 2014 (n° 362495), le Conseil d’Etat a apporté des précisions sur la notion de « harcèlement sexuel » en matière disciplinaire en décidant que :

« […] des propos, ou des comportements à connotation sexuelle, répétés ou même, lorsqu’ils atteignent un certain degré de gravité, non répétés, tenus dans le cadre ou à l’occasion du service, non désirés par celui ou celle qui en est le destinataire et ayant pour objet ou pour effet soit de porter atteinte à sa dignité, soit, notamment lorsqu’ils sont le fait d’un supérieur hiérarchique ou d’une personne qu’elle pense susceptible d’avoir une influence sur ses conditions de travail ou le déroulement de sa carrière, de créer à l’encontre de la victime, une situation intimidante, hostile ou offensante sont constitutifs de harcèlement sexuel et, comme tels, passibles d’une sanction disciplinaire […] ».

Il résulte d’une telle définition qu’un agissement isolé peut suffire pour engager des poursuites en matière de harcèlement sexuel (à la différence de la situation de harcèlement moral).

On conseillera donc aux agents victimes de harcèlement sexuel de ne laisser passer aucun agissement répréhensible sur ce fondement, et d’engager immédiatement des démarches dès la première situation litigieuse, sans aucune hésitation.

Le bon réflexe consistera à :

  • Recueillir des preuves (certificats médicaux, témoignages, échanges avec l’auteur de l’agression comme des sms reçus, des emails, des messages Facebook, etc.),
  • Alerter par écrit votre supérieur hiérarchique (ou le supérieur hiérarchique... du supérieur hiérarchique) afin d’engager les poursuites.
Suivant les hypothèses (fait isolé ou réitération), le droit de retrait pourra également être invoqué par l’agent en urgence afin de ne pas être confronté à nouveau à son agresseur, et le bénéfice de la protection fonctionnelle pourra bien entendu être demandé à la collectivité.

Le signalement effectué permettra au supérieur hiérarchique d’engager sans délai l’action disciplinaire contre l’auteur. Sur le plan disciplinaire, le harcèlement sexuel dans la fonction publique est en effet sanctionné par l’article 6 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, qui dispose que :

« Aucun fonctionnaire ne doit subir les faits :

Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;

Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.

[…] 

Est passible d’une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou enjoint de procéder aux faits de harcèlement sexuel […] 

Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public ».

À titre d’exemples, le fonctionnaire ou l’agent contractuel responsable d’agissements de harcèlement sexuel peut être sanctionné disciplinairement par :

  • Une rétrogradation (TA Nancy, 25 juin 2002, « M. K. », n°012155), 
  • Une suspension (CE, 20 mai 2009, « M. A. », n°309961 ), 
  • Une résiliation de contrat (CAA Lyon, 10 mai 2010, « M. A. », n°08LY01046),
  • Ou une révocation (CAA Marseille, 14 février 2006, « Commune de Marignane », n°02MA02364).

2/ Agir sur le plan pénal

En parallèle de l’action disciplinaire, reprenant à notre compte l’expression selon laquelle « La peur doit changer de camp », nous incitons très fortement les victimes à procéder systématiquement à un dépôt de plainte pénale auprès du Procureur de la République de ressort pour harcèlement sexuel.

Un courrier simple à l’attention de « Monsieur le Procureur de la République » à adresser au Tribunal de grande instance de votre domicile, du domicile de l’auteur des faits ou du lieu de l’infraction sera suffisant.

Le modèle suivant pourra être utilisé : 


[Nom, Prénom]
[Adresse, numéro de téléphone, email]

À [Lieu] , le [Date]

Objet : Dépôt de plainte pénale pour harcèlement sexuel contre Monsieur […] / ou contre X

Madame / Monsieur le Procureur de la République,

J'ai l'honneur de porter à votre connaissance les faits suivants : [décrire les faits avec le plus de détails possible : circonstances, conséquences / préjudice, date et lieu, témoins éventuels, messages à joindre si existants].

Au regard de ce qui précède, je vous saurais gré d'enregistrer la présente plainte, que je dépose contre Monsieur […] / ou contre X pour harcèlement sexuel afin de donner à cette affaire sa suite légale.

[Le cas échéant] La présente plainte est déposée contre X, dans la mesure où je ne suis pas en mesure d’identifier à ce jour l’auteur de l’agression dont j’ai été victime, ce que l’enquête permettra de déterminer.

Vous voudrez bien me tenir informée des suites données. 

Dans cette attente, je vous prie d'agréer, Madame / Monsieur le Procureur de la République, l'assurance de mes respectueuses salutations.

[Signature] 

 
Sur le plan pénal, le harcèlement sexuel est sanctionné par l’article 222-33 du Code Pénal, qui dispose que :

« I. – Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

– Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.

III. – Les faits mentionnés aux I et II sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende […] »

Enfin, une saisine du Défenseur des Droits est pertinente en la matière, qui vous apportera une grande assistance dans vos démarches : Formulaire de saisine en ligne du Défenseur des Droits.

En tant qu’elle libère la parole des femmes victimes, l’initiative #BalanceTonPorc a tout notre soutien. Pour une réponse juridique efficace, et une sanction systématique des auteurs, nous lui préférons toutefois, en changeant seulement quelques lettres, le message : #BalanceAuProc.

SisypheAvocatsQuelle mouche a piqué le Tribunal Administratif (TA) de Dijon ?

En mars 2015, le maire de Chalon-sur-Saône a décidé avec l'appui d'une large majorité du conseil municipal, de ne plus proposer de menu de substitution dans les restaurants scolaires de sa commune à compter de la rentrée, c’est-à-dire de ne pas proposer aux écoliers d’alternative à la viande de porc lorsqu’elle est au menu de la cantine municipale.

Dans un premier temps, le TA de Dijon, saisi par la « Ligue de défense judiciaire des musulmans » a très justement rappelé dans un jugement du 28 août 2017 que le service public de la restauration scolaire présente un caractère facultatif, et que l’obligation de proposer aux enfants un menu de substitution ne résulte d’aucune stipulation conventionnelle, d’aucune disposition constitutionnelle, législative ou réglementaire et d’aucun principe.

Mais dans un deuxième temps, et de manière très étonnante, le TA de Dijon a choisi d’annuler la décision du maire de Chalon-sur-Saône en invoquant « l’intérêt supérieur de l’enfant », au visa de l’article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l’enfant (CIDE).

On peine à comprendre la motivation d’un tel jugement.

Tout d’abord, le raisonnement du TA est d’une obscure clarté : pourquoi affirmer dans un considérant de principe que l’obligation de proposer aux enfants un menu de substitution « ne résulte d’aucun principe » … si c'est sur un principe (« l’intérêt supérieur de l’enfant ») que repose, dans le même jugement, l’annulation de la décision querellée ? 

Extrait du jugement du TA de DijonExtrait du jugement du TA de Dijon
   
Mais plus encore, le fondement juridique de « l’intérêt supérieur de l’enfant » à ne pas manger de viande de porc est difficilement compréhensible. En effet, l’intérêt supérieur de l’enfant est un principe général du droit international principalement utilisé en matière de divorces contentieux, ou de protection de l’enfance en danger. La viande de porc présente-t-elle un danger particulier pour les enfants scolarisés dans les écoles de Chalon-sur-Saône, par rapport à d’autres viandes proposées ?

Trêve d’hypocrisie, c’est bien de considérations religieuses dont il s’agit là.

Si le principe de « l’intérêt supérieur de l’enfant » pourrait (éventuellement) se défendre devant une cour de justice pour contraindre une commune à proposer des menus végétariens (sans viandes) aux écoliers sur le fondement de considérations nutritionnelles (les dangers pour la santé d’un excès de consommation de viandes sont régulièrement dénoncés par les professionnels), il ne saurait pouvoir être détourné pour masquer des considérations religieuses.

La lecture du jugement du TA de Dijon met mal à l’aise. Disons les choses clairement : comment penser une seule seconde que des enfants âgés de 3 à 11 ans (en école primaire) sont en situation de faire un choix éclairé en matière de religion, et de contraintes alimentaires associées ? L’entrée en religion suppose a minima une étude intellectuelle approfondie des textes religieux, pour un choix en pleine connaissance de cause, qui est inenvisageable à un âge si précoce, quelle que soit la religion concernée. Invoquer « l’intérêt supérieur de l’enfant » et sa « liberté de conscience » pour le protéger de la viande de porc ne fait donc pas sens : c’est de l’intérêt supérieur des parents dont il est ici question en réalité. L'intérêt supérieur de l'enfant, c'est d'être protégé des influences lors de son plus jeune âge, pour être en parfaite capacité, le moment venu, de faire un choix éclairé s'il le souhaite. C'est la mission de l'école républicaine. 

La motivation de la décision du TA de Dijon paraît donc faible. Rappelons toutefois qu’il ne s’agit que d’un jugement de première instance.

En l’état actuel du droit, il est constant que l’obligation de proposer aux enfants un menu de substitution à la viande de porc n’est prévue par aucun traité international auquel la France serait partie, et n’est pas prévue par la Constitution, la loi ou le règlement.

Bien au contraire, comme le rappelle une circulaire du Ministre de l’intérieur du 16 août 2011, un ensemble de décisions jurisprudentielles existantes ne va pas dans ce sens :

  • Pour les usagers du service public, la neutralité implique que la prise en compte des différences de situation fondées sur les convictions religieuses ne peut remettre en cause le fonctionnement normal du service (CE, 14 avril 1995, Consistoire central des israélites de France, n°125148),
  • Les collectivités territoriales disposent d’une grande liberté dans l’établissement des menus, et le fait de prévoir des menus en raison de pratiques confessionnelles ne constitue ni un droit pour les usagers ni une obligation pour les collectivités (TA Marseille, 1er octobre 1996, n°963523 et 963524),
  • La circonstance qu’une commune serve du poisson le vendredi dans ses cantines scolaires mais refuse de tenir compte des prescriptions alimentaires en vigueur dans les autres cultes ne constitue pas une atteinte aux droits fondamentaux (CE, 25 octobre 2002, Mme Renault, n°251161),
  • L'absence de repas de substitution ne meconnaît pas le principe de liberté religieuse (même décision).
Sans oublier le principe de laïcité, de neutralité du service public, et la libre administration des collectivités territoriales, de valeur constitutionnelle.

Sans doute l’heure est-elle venue d’assumer ce débat de manière dépassionnée et sans polémique (pour proposer, par exemple, des menus végétariens au choix dans les cantines, hors de toutes considérations religieuses), à condition de le porter au niveau gouvernemental et/ou parlementaire… pas devant le TA de Dijon.

"Que peut-on lire cet été pour s'avancer ?" est la question qui revient le plus fréquemment chez les jeunes bacheliers qui s'inscrivent en première année de Droit à l'Université. Je vous propose d'y répondre en toute subjectivité par une liste de 10 ouvrages incontournables que je conseille à mes étudiants :

1/ Étienne de La Boétie « Discours de la servitude volontaire »

 
la boetie
« Soyez résolus à ne plus servir, et vous voilà libres. »

Publié en 1576 par un jeune homme de 18 ans seulement, ami de Montaigne, ce texte est d’une stupéfiante actualité. Ode à la liberté et à la résistance à l’oppression, le célèbre discours de La Boétie appelle les hommes à se libérer de leur servitude, à laquelle ils consentent volontairement par l’habitude, et à vivre libres en renversant les tyrans. L’auteur nous rappelle que l’union fait la force, et que la liberté se conquiert.

2 & 3/ Platon « Phèdre » et « Gorgias »

platon

« La rhétorique n’a aucun besoin de savoir ce que sont les choses dont elle parle ; simplement elle a découvert un procédé qui sert à convaincre, et le résultat est que, devant un public d’ignorants, elle a l’air d’en savoir plus que n’en savent les connaisseurs […] Dans les tribunaux, personne n’a le moindre souci de la vérité. »

Dans « Phèdre » (deuxième partie) et « Gorgias », Socrate, retranscrit par Platon, dénonce la rhétorique (l’art oratoire), comme une méthode ne permettant pas de faire émerger la vérité. Socrate critique le pouvoir de conviction des sophistes (qui pourraient être aujourd’hui les avocats) dans les Cours de justice, au détriment du vrai. Les deux dialogues de Platon sont indispensables pour se rappeler toujours que l’art oratoire est inutile, voire nuisible à l’émergence de la vérité, et qu’il faut en revenir à un examen dépassionné des faits.

4/ Jean-Jacques Rousseau « Du contrat social »

contrat social

« Quiconque refusera d'obéir à la volonté générale y sera contraint par tout le corps : ce qui ne signifie pas autre chose sinon qu'on le forcera à être libre. »


Paru en 1762 et affirmant avec force le principe de la souveraineté populaire, « Du contrat social » de Jean Jacques Rousseau est un incontournable de la philosophie politique, qui a inspiré a inspiré nombre de constitutionnalistes. Soulevant l’éternelle question de la conciliation des intérêts particuliers et de l’intérêt général, et cherchant à définir le lien social, l’auteur nous invite à réfléchir sur ce qui « fait société ». Intemporel.

5/ Sophocle / Anouilh « Antigone »

antigone

« Comprendre. Toujours comprendre. Moi, je ne veux pas comprendre. »

Tragédie grecque, « Antigone » est un chef-d’œuvre de la pensée. Se plonger dans sa version antique (Sophocle) ou contemporaine (Anouilh), c’est ressentir le questionnement éternel entre droit naturel et droit positif, la confrontation entre la liberté et l’obéissance. Peut-on vivre libre ? Faut-il obéir ? Existe-t-il des règles de droit non écrites, éternelles, primant toutes les autres ? « Antigone » soulève plus de questions que de réponses, et c’est très bien ainsi ! À lire et relire.

6/ Beccaria « Des délits et des peines »

beccaria

« En vertu de quel droit les hommes peuvent-ils se permettre de tuer leurs semblables ? »

Dans « Des délits et des peines », le marquis Beccaria pose en 1765 l’ensemble des principes structurants du droit pénal en réfléchissant sur la finalité de la peine, et sa nécessaire proportionnalité aux délits. Reconnu comme le premier des abolitionnistes, Beccaria démontre l’inutilité et la cruauté de la peine de mort. Robert Badinter lui rendra un hommage appuyé en préfaçant l’ouvrage. Lire Beccaria, c’est comprendre les fondements philosophiques du droit pénal. Cette lecture se prolongera avec « Le Dernier Jour d’un condamné » de Victor Hugo.

7/ Sieyès « Qu’est-ce que le tiers-état ? »

sieyes

« Qu’est-ce que le tiers-état ? Tout. Qu’a-t-il été jusqu’à présent dans l’ordre politique ? Rien. Que demande-t-il ? A être quelque chose. »

Publié en 1789 lors de la convocation des États généraux, « Qu’est-ce que le tiers-état ? » est un appel à l’insurrection populaire, et à une réelle représentativité de la Nation dans une Assemblée nationale constituante. Un ouvrage indispensable pour comprendre la Révolution française, qui scellera le sort de l’Ancien Régime, et la théorie de la souveraineté nationale.

8/ Kafka « Le procès »

kafka
« La Justice doit être immobile, sinon sa balance vacille et il ne peut plus y avoir de jugement équitable. »

Dans « Le procès », Kafka conduit le lecteur dans les méandres de la Justice, qu’il décrit par l’absurde. Satire de l’univers judiciaire, de sa lenteur et de sa bureaucratie, l’ouvrage dépeint les travers du juridisme avec beaucoup d’humour. Angoissant parfois, drôle souvent, perspicace toujours, « Le procès » plaira à qui sait le lire. Kafkaïen !

9/ Aristote « Constitution d’Athènes »

aristote

« Ceci est la coutume des Athéniens établie par les ancêtres : si quelqu’un se révolte pour devenir tyran ou aide à établir la tyrannie, il sera privé de tout droit, lui et sa famille. »

Dans sa « Constitution d’Athènes » rédigée aux alentours de 329 av. J.-C., Aristote décrit la vie de la cité athénienne et de ses institutions dans l’Antiquité. Un ouvrage remarquable de pédagogie sur la démocratie, par ceux qui l’ont inventée. Comment comprendre où nous allons, sans savoir d’où nous venons ?  

10/ Racine « Les plaideurs »

racine

« Si vous parlez toujours, il faut que je me taise. »

« Les plaideurs » est une comédie théâtrale sur l’univers de la justice. Pièce en 3 actes, la farce de Racine détendra les étudiants studieux qui auront eu le courage de lire les 9 ouvrages précédents, bien trop sérieux !

***

PS : Les étudiants qui en redemandent liront « Le Prince » de Machiavel, et « L’étranger » de Camus.

dimanche, 02 juillet 2017 18:17

Comment contester les résultats du BAC ?

SisypheAvocatsSouvent critiqué, jamais remplacé, le baccalauréat reste l’épreuve majeure de la scolarité des jeunes français. Parce qu’il marque la fin des études secondaires, parce qu’il constitue la véritable première difficulté (le brevet n’étant devenu qu’une formalité), parce qu’il est le point de bascule vers les études supérieures ou la vie professionnelle, le « bac » est un incontournable rite de passage. Personne n’oublie cette épreuve, ni l’attente devant les listes infinies des résultats, accompagnée des traditionnelles scènes « du rire aux larmes ». Alors que les résultats de l’édition 2017 sont rendus publics ce mercredi 5 juillet, c’est l’occasion de s'intéresser, étape par étape, à la procédure à suivre pour les contester juridiquement.

1/ Demander communication de sa copie

Si la note d’une de vos épreuves vous interpelle, le premier réflexe est de demander à obtenir communication de votre copie, pour vérifier par vous-même ce qui la justifie.

Saisie à plusieurs reprises de cette question, la commission d’accès aux documents administratifs (CADA) estime en effet que les copies d’examen sont des documents communicables. S’agissant d’un document personnel, la CADA estime que le droit de communication est réservé aux personnes intéressées, c’est à dire au candidat lui-même (et pas, par exemple, à ses parents) (Article L311-5 du Code des relations entre le public et l'administration).

La demande de communication devra être adressée :

  • Au rectorat du lieu où a été passé l’examen,
  • Ou au centre d’examen renseigné sur la convocation à l’épreuve.
À savoir :

  • La consultation sur place des copies (sans pouvoir les emmener) est parfois prévue,
  • Certaines académies prévoient des formulaires de demande de communication en ligne, qui peuvent être utilisés (exemple ici pour la région parisienne),
  • Des frais de poste et/ou de photocopies pourront être appliqués au demandeur.
Attention, la demande de communication des copies d’examen est enfermée dans le strict délai d’un an après la notification des résultats. Après, il sera trop tard, les copies auront été détruites (Circulaire n°2012-059 du 3 avril 2012 relative à la préparation, au déroulement et au suivi des épreuves du bacNote de service n°82-028 du 15 janvier 1982 relative à la communication des copies d'examen et concours aux candidats qui en font la demande).

2/ Saisir la CADA en cas de refus de communication de sa copie

Dans l’hypothèse (rare) d’un refus de communication d’une copie du baccalauréat, ou d’un silence gardé un mois sur la demande (qui vaut refus tacite), le candidat devra saisir la CADA, qui obligera le rectorat à communiquer la copie (Articles L311-1, R311-12 et -13 du Code des relations entre le public et l'administration).

3/ Prendre connaissance de sa copie et vérifier les irrégularités

SisypheAvocats
Il appartient au candidat de prendre bonne connaissance de sa copie et de relever toutes les irrégularités identifiées, pour les contester le cas échéant.

Très important : la contestation ne pourra toutefois pas porter sur l’appréciation portée par le correcteur, dans la mesure où le jury est souverain (Article D334-20 du Code de l’éducation). Ceci signifie qu’il ne sera pas possible de contester une note considérée comme « trop sévère » au regard des résultats habituellement obtenus au cours de l’année. Il ne sera également pas possible de solliciter une deuxième correction de sa copie, ou de critiquer le sujet proposé.

La contestation ne pourra donc porter que sur :

  • Les irrégularités matérielles (par exemple, une erreur de report de note [un « 14 » devient un « 4 »], de calcul de la note finale au regard de la notation des différentes sous-parties du devoir, etc.),
  • Ou la violation des conditions de déroulement de l’épreuve au détriment du candidat (par exemple, le non-respect du temps de préparation d’un oral, qu’il appartiendra de prouver, ou l’attitude d’un examinateur).

4/ Faire un recours

Dans l’hypothèse où de véritables irrégularités seraient caractérisées, on conseillera au candidat de formaliser rapidement un recours gracieux et de l'adresser (avec LRAR) au recteur, qui est habilité juridiquement à corriger les erreurs matérielles commises au détriment des candidats (Circulaire n°2012-059 du 3 avril 2012 relative à la préparation, au déroulement et au suivi des épreuves du bac).

Au besoin, une enquête sera alors diligentée par le recteur ou le chef de centre sur les conditions de déroulement de l’épreuve spécifiquement concernée.

tribunal

Si le recteur refuse la rectification demandée, ou garde le silence pendant deux mois sur la demande présentée, le candidat pourra se tourner vers le Tribunal administratif de ressort pour porter sa demande devant le juge (recours pour excès de pouvoir, assorti le cas échéant d’un référé).

Si le recours à un avocat est facultatif en la matière, les conseils et l’expérience du professionnel s’avèrent néanmoins pertinents et efficaces pour porter une telle demande.

Untitled 1

Le 21 juin marque chaque année le coup d'envoi de l’été. C’est le moment d’enfiler vos claquettes-chaussettes et de foncer à la plage. Lieu de détente et de farniente, la plage est également le point de convergence de nombreuses problématiques juridiques, qu’il serait imprudent d’ignorer.

Je me propose de démêler le vrai du faux en la matière pour sécuriser vos vacances, sur la base de la série d’affirmations suivantes :

« Je peux dormir à la belle étoile sur la plage »
« Je peux faire un feu le soir sur la plage »
« Je peux faire la fête le soir sur la plage »
« Je peux bronzer topless sur la plage »
« Je peux emmener mon animal à la plage avec moi »
« J’ai le droit de m’alcooliser sur la plage »
« Je suis obligé de porter le masque à la plage »
« Je peux réserver ma place à l’avance sur la plage en déposant une serviette »
« Je peux avoir des relations sexuelles discrètes à la plage »
« Je peux utiliser librement mon drone à la plage »
« Je peux me baigner en burkini à la plage »
« On peut m'interdire l'accès à une plage sous prétexte qu'elle est privée »
« Il me faut un permis B pour louer un jet ski ou un petit bateau »
« Je peux écouter de la musique / jouer au ballon / avec un cerf-volant / avec un énorme matelas pneumatique… »
« La mairie est responsable si j'attrape une maladie à la suite d'une baignade »
« J’ai le droit de pêcher depuis la jetée / ramasser tous les coquillages trouvés sur la plage »
« Toute plage doit mettre à disposition un point d'eau douce »
« Un maître-nageur sauveteur ne peut m’interdire de me baigner, ce n’est pas dans ses attributions »
« J'ai le droit de traverser une propriété privée lors d'une promenade en bord de mer »
« Je risque une amende si je laisse des déchets/mes mégots sur le sable »


***
 
1. « Je peux dormir à la belle étoile sur la plage »

Vrai !

Il est parfaitement légal de dormir à la belle étoile sur la plage, à condition de ne pas y camper. L’article R 111-42 du Code de l’Urbanisme interdit en effet le camping sauvage sur la plage (avec tente et matériel) mais aucunement le simple fait d’y dormir. Le sac de couchage directement sur le sable est donc possible.

2. « Je peux faire un feu le soir sur la plage »

Faux !

Le feu est absolument interdit sur les plages françaises (feux de camp, barbecue, etc.) pour des raisons de sécurité publique. Une amende de 38 euros est généralement encourue, outre l’intervention des forces de l’ordre, qui éteindront le feu.

3. « Je peux faire la fête le soir sur la plage »

Vrai, mais…

La fête sur la plage est tolérée, à condition qu’elle reste à un volume sonore acceptable. Un djembé ou une guitare à un volume raisonnable sera toléré (pas trop près des habitations), même le soir, mais il n’est pas envisageable de transformer la plage en un Coachella sauvage.

Il appartient toutefois au maire, au titre de son pouvoir de police administrative générale, de réglementer l’usage des plages afin de prévenir d’éventuels troubles au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques. À ce titre, il peut par exemple interdire l’utilisation d’appareils diffusant de la musique amplifiée dont le volume sonore est susceptible de gêner les autres usagers de la plage, ou encore réglementer l’exercice des autres activités bruyantes.

Il faut donc surveiller le règlement de police et de sécurité des plages affiché à l’entrée de ces dernières.

4. « Je peux bronzer topless sur la plage »

Plutôt vrai, mais…

L’article 222-32 du Code Pénal sanctionne l'exhibition sexuelle en public d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Le « topless » est toutefois toléré sur les plages françaises depuis longtemps, et aucune poursuite n’est à crainte (sauf arrêté municipal contraire placardé sur les panneaux à l’entrée de la plage).

Attention :

  • Seul le topless est toléré (pas de naturisme),
  • Absolument pas dans les piscines municipales où les règlements intérieurs l’interdisent souvent ni à Paris-Plages,
  • Ne pas excéder la zone de baignade : la plupart des villes côtières interdisent le torse nu (pour les garçons) par arrêté municipal en ville,
  • À l’étranger, notamment les pays du Moyen-Orient, le topless sur la plage peut être lourdement sanctionné.

5. « Je peux emmener mon animal à la plage avec moi »

Plutôt faux, mais…

En règle générale, la plupart des communes côtières interdisent par arrêté municipal les animaux sur les plages surveillées, entre juin et septembre, même tenus en laisse. Sur certaines plages, des horaires sont toutefois aménagés pour les animaux. Se référer au texte en vigueur, placardé à l’entrée de la plage.

Une amende de 11 euros est encourue en cas de non-respect de la réglementation.

À savoir : la Fondation 30 millions d’amis met en ligne sur son site une carte interactive des lieux de vacances accessibles aux animaux

6. « J’ai le droit de m’alcooliser sur la plage »

Plutôt faux !

De plus en plus de plages interdisent purement et simplement l’alcool sur la plage sous peine d’amende, se référer à la réglementation placardée à l’entrée de la plage.

Si tel n’est pas le cas, la consommation d’alcool sur la plage est autorisée.

Attention toutefois, la plage étant un lieu public, une arrestation par les forces de l’ordre pour ivresse publique et manifeste peut être encourue (si nécessaire). Outre le placement en cellule de dégrisement, une amende de 150 euros est alors encourue (Articles L3341-1 et R3353-1 du Code de la santé publique).

En revanche, la consommation de cannabis à la plage est strictement interdite comme partout en France et est aujourd’hui sanctionnée par le paiement d'une amende forfaitaire immédiate de 200 € (article L. 3421-1 du Code de la santé publique).

7. « Je suis obligé de porter le masque à la plage »

Plutôt faux, mais...

Depuis le début de l’épidémie, de nombreux arrêtés préfectoraux ont rendu le port du masque obligatoire sur certaines plages. La plupart de ces arrêtés ne sont toutefois plus en vigueur à ce jour, compte tenu de la nette décrue des contaminations covid-19.

On peut donc dire que le masque n’est plus obligatoire à ce jour sur la plupart des plages françaises, ce qui n’interdit toutefois pas de faire toujours attention à la distanciation sociale s’agissant d’endroits très fréquentés.

La situation étant très évolutive, il faut surveiller les décisions prises par les pouvoirs publics pendant l’été. Si un arrêté remet l’obligation du port du masque à la plage, il sera affiché à l’entrée de celle-ci et devra être respecté par les vacanciers.

Enfin, l’obligation du port du masque à la plage ne concerne jamais les sportifs.

8. « Je peux réserver ma place à l’avance sur la plage en déposant une serviette »

Vrai !

Sur les plages qui sont bondées en été, beaucoup de sacs, serviettes et autres objets sont laissés sans surveillance afin de réserver des emplacements, c’est ce que l’on nomme familièrement le « squattage des plages ».

Le Ministère de l’Intérieur a été interrogé précisément sur le sujet par une députée qui estimait que cette pratique pourrait s’avérer dangereuse pour les citoyens, puisque des affaires abandonnées sans surveillance sur une plage pourraient représenter un danger au titre de l’ordre public.

Dans le cadre de sa réponse au parlementaire, le Ministère de l’Intérieur a indiqué qu’aucune disposition législative ou réglementaire ne permet au maire d’interdire à des personnes de déposer une serviette ou d’autres objets sur le sable afin d’y « réserver » un emplacement.

Le Ministère a encore précisé que le Gouvernement n’envisageait aucune évolution du droit en vigueur qui permettrait au maire de prendre une telle mesure, qui apparaîtrait par ailleurs disproportionnée au regard de l’objectif recherché et du principe de liberté d’accès aux plages publiques (voir la réponse ministérielle).

Chacun peut donc réserver sa place à l’avance sur la plage en y déposant une serviette.

9. « Je peux avoir des relations sexuelles discrètes à la plage »

Faux !

L'exhibition sexuelle imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du public est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende (article 222-32 du Code pénal).

Les relations sexuelles à la plage, qui est un lieu public, sont donc formellement interdites, même discrètes.

10. « Je peux utiliser librement mon drone à la plage »

Faux !

L’usage de drone de loisir est strictement interdit en agglomération, donc à la plage (Loi n° 2016-1428 du 24 octobre 2016 et Arrêté du 17 décembre 2015).

Par ailleurs, l’utilisation d’un drone à la plage constitue une violation des règles de sécurité publique passible de 75 000 euros d’amende et d’une peine de prison d’un an (article L6232-4 du code des transports) compte tenu de la densité de population.

L’atteinte à l’intimité de la vie d’autrui par l’utilisateur d’un drone est également passible d’une amende de 45 000 euros et d’une peine de prison d’un an (article 226-1 du Code pénal) et tombe sous le coup de la loi Informatique et Libertés.

On laissera donc son drone de loisir à la maison avant d’aller à la plage.

11. « Je peux me baigner en burkini à la plage »

Vrai !

Le Conseil d’État a toujours refusé à ce jour de valider des arrêtés municipaux « anti-burkini » à la plage au nom de la liberté d’aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle (CE, 26 août 2016, n°402742).

Ce n’est que dans le cas très particulier où le port de ce vêtement religieux de baignade avait provoqué des rixes entre usagers sur la plage publique que le Conseil d’État a exceptionnellement et ponctuellement accepté de l’interdire, pendant une durée limitée (exemple de Sisco en Corse, où l’arrêté « anti-burkini » avait été validé au nom de l’ordre public – CE, 14 février 2018, n°413982).

Bien que le burkini ait été récemment interdit par le Conseil d’État à la piscine municipale (CE, 21 juin 2022, Commune de Grenoble, n°464648), il est toujours autorisé à la plage à ce jour.

12. « On peut m'interdire l'accès à une plage sous prétexte qu'elle est privée »

Plutôt faux, mais…

Les plages françaises sont d’accès libre et gratuit pour le public (Article L321-9 du Code de l’environnement / Article L2124-4 du CG3P).

Toutefois, et par exception, 20% de la superficie des plages naturelles, et 50% de la superficie des plages artificielles peuvent faire l’objet d’une concession, c’est-à-dire être attribuée (en partie) à une personne publique ou privée qui peut y exploiter une activité commerciale (transats, terrains de beach-volley, etc.).

La plage peut donc en partie être privatisée, mais :

  • En aucun cas, cette privatisation ne peut entraver le droit de passage (bande des 3 mètres),
  • Ni concerner l’intégralité de la plage.

L’interdiction totale de l’accès à une plage « privée » n’est donc pas possible.

13. « Il me faut un permis B pour louer un jet ski ou un petit bateau »

Faux !

Louer et conduire (seul) un jet ski implique d’avoir au moins 16 ans et de disposer du permis plaisance (attention, c’est un permis spécial qui n’a rien à voir avec le permis B). Il en va de même pour les bateaux à moteur dont la puissance motrice est supérieure à 6 chevaux (4,5 kilowatts) : se renseigner auprès du loueur sur la puissance (Décret n°2007-1167 du 2 août 2007 relatif au permis de conduire et à la formation à la conduite des bateaux de plaisance à moteur).

Toutefois :

  • Il est possible de conduire un jet ski sans permis dans le cadre d'une procédure d'initiation et de découverte, sous la responsabilité d'un moniteur diplômé, ce que proposent souvent les loueurs sur la plage,
  • La conduite des voiliers est dispensée de permis,
  • La conduite des bateaux à moteur dont la puissance motrice est inférieure à 6 chevaux (4,5 kilowatts) est dispensée de permis.
Attention à la conduite sans permis car votre assurance ne vous couvrira pas, et une forte amende est encourue (1500 euros).

14. « Je peux écouter de la musique / jouer au ballon / avec un cerf-volant / avec un énorme matelas pneumatique... »

Plutôt vrai, mais…

Écouter la radio pour suivre une étape du Tour de France ou de la musique est autorisé sur la plage, à un volume raisonnable. Si aucune amende n’est encourue en cas d’excès sur la plage, les règles de courtoisie commandent d’être respectueux de votre voisin de serviette.  

Il en va de même des jeux de ballons et de l’usage d’engins de plage accessoires de la baignade (matelas pneumatiques et embarcations gonflables), qui sont autorisés sur la plage.

Il est toutefois interdit de se livrer sur la plage à des jeux de nature à gêner ou à présenter un danger pour les tiers et en particulier pour les enfants : les jets de pierres ou autres projectiles sont rigoureusement interdits.

Le cerf-volant est généralement interdit dans les zones de baignade surveillées (se référer au règlement à l’entrée de la plage).

Il appartient toutefois au maire, au titre de son pouvoir de police administrative générale, de réglementer l’usage des plages afin de prévenir d’éventuels troubles au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques. A ce titre, il peut par exemple interdire l’utilisation d’appareils diffusant de la musique amplifiée dont le volume sonore est susceptible de gêner les autres usagers de la plage, ou encore réglementer l’exercice des autres activités bruyantes.

Il faut donc surveiller le règlement de police et de sécurité des plages affiché à l’entrée de ces dernières.

15. « La mairie est responsable si j'attrape une maladie à la suite d'une baignade »

Plutôt faux, mais…

Il est vrai que la qualité des eaux de baignade est de la responsabilité du maire, en tant que titulaire du pouvoir de police (l’ordre public recouvre la salubrité publique).

S’il ne serait pas envisageable d’engager la responsabilité du maire pour des maladies bénignes contractées à la plage (ex : bactérie, coup de soleil), il en irait autrement si un phénomène exceptionnel altérait la qualité de l’eau (ex : pollution) et que le maire n’avait pas interdit la baignade (drapeau rouge). Dans une telle hypothèse, la responsabilité du maire pour carence dans l’exercice de ses pouvoirs de police pourrait être recherchée si une maladie a été contractée par un baigneur, sur le fondement de l’article L1332-4 du code de la santé publique.  

Une blessure grave causée par un défaut de mesures prises par le maire pour supprimer les obstacles à la sécurité des baigneurs dans l’eau peut également engager sa responsabilité (ex : tiges métalliques, béton sous l’eau, pour un exemple voir CAA Lyon, 4e ch. 8 juillet 1993, n°92LY01260).

16. « J’ai le droit de pêcher depuis la jetée / ramasser tous les coquillages trouvés sur la plage »

Plutôt vrai, mais…

La pêche de loisir / surf-casting est généralement autorisée depuis la plage et la jetée mais hors des zones de baignade surveillées. La réglementation pouvant changer d’un endroit à l’autre, il convient de se référer aux arrêtés municipaux locaux, placardés à l’entrée des plages car le maire a tout à fait la possibilité de l’interdire.

La pêche à pieds de coquillages / crustacés / poissons / mollusques est également autorisée sur les plages (attention, pas dans les ports ni dans les concessions de cultures marines).

Attention, la pêche à pieds et la pêche de loisir sont très réglementées afin de protéger la ressource de manière durable :

  • Il est absolument interdit de vendre le produit de ces pêches, qui ne peut donc être consommé qu’en famille,
  • Des tailles et poids minimaux de capture / pêche / ramassage de coquillages / crustacés / poissons / mollusques sont précisément fixé par arrêté ministériel (ex : huître 5cm, coquille st jacques 11 cm, dorades 23 cm, bar 42 cm, oursins 4 cm piquants exclus), 
  • Des quotas de pêche à pieds journaliers (par personne) sont fixés dans chaque secteur par espèce par arrêté préfectoral (ex : généralement pas plus de 3 kg de palourdes par personne et par jour),
  • Le matériel utilisable est également réglementé (ex : couteau de maximum 20 cm de long et 5 cm de large).  
Vérifiez en mairie ou préfecture en cas de doute (appeler au besoin), ou consultez l'arrêté du 26 octobre 2012.

Attention :

  • Le non-respect des tailles / poids minimaux et/ou des quotas de pêche à pieds / loisir est passible de très lourdes amendes (maximum 22.500 euros), en application de l'article L945-4 du Code rural et de la pêche maritime,
  • Un arrêté municipal ou préfectoral peut interdire toute pêche dans certains secteurs particuliers (pour des raisons écologiques ou sanitaires) : se renseigner.

17. « Toute plage doit mettre à disposition un point d'eau douce »

Faux !

La mise à disposition de point d’eau douce / douches sur la plage est laissée à la discrétion de la commune. Certaines municipalités suppriment les points d’eau douce sur les plages pour des raisons budgétaires, sans possibilité d’exercer de réels recours en la matière.

18. « Un maître-nageur sauveteur ne peut m'interdire de me baigner, ce n'est pas dans ses attributions »

Plutôt vrai, mais…

Par principe, la baignade est libre sur le domaine public, mais des raisons d’ordre public peuvent justifier une interdiction (ex : mauvaise qualité des eaux de baignade, tempête) en application des pouvoirs de police du maire. Le drapeau rouge hissé sur la plage indique l’interdiction de baignade. Un baigneur en infraction qui ne respecterait pas le drapeau rouge risque une amende pour non-respect des règles de sécurité (11 à 33 euros). Le pouvoir de sanction appartient aux policiers municipaux, ainsi qu’aux CRS-MNS (CRS-maître nageur sauveteur). Si les verbalisations sont rares, les règles de prudence élémentaire commandent de respecter le drapeau rouge.

Tous les maîtres-nageurs sauveteurs ne sont donc pas en capacité juridique de verbaliser (seuls les CRS-MNS le peuvent), mais ils seront en mesure de faire appel en cas de besoin aux policiers municipaux ou CRS-MNS face à un vacancier récalcitrant.

19. « J'ai le droit de traverser une propriété privée lors d'une promenade en bord de mer »

Plutôt vrai !

Tous les promeneurs du bord de mer disposent d’un droit de passage sur 3m de largeur sur les 5000 km de rivages français, y compris sur les propriétés privées riveraines. Ceci implique que rien ni personne ne puisse faire obstacle au passage libre sur les propriétés privées en bord de mer, sur une bande de 3m de largeur.

Formulé juridiquement, c’est l’article L.160-6 du Code de l’urbanisme qui dispose que : 

« Les propriétés privées riveraines du domaine public maritime sont grevées sur une bande de trois mètres de largeur d'une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons ».

Attention :

  • Ce droit est bien un droit de passage et non de stationnement,
  • Il concerne les piétons et non les véhicules (voitures, vélos, etc.),
  • Par exception, le Préfet peut suspendre le droit de passage (ou le détourner) dans des secteurs particuliers (ex : chemin public préexistant à proximité, risque que le passage porte atteinte à un site naturel, sécurité publique).

Le propriétaire privé qui entrave le droit de passage sur la bande des 3m encourt une amende 1500 euros.

20. « Je risque une amende si je laisse des déchets/mes mégots sur le sable »


Vrai !

Le règlement de police et de sécurité des plages (arrêté municipal) interdit la plupart du temps de laisser/ jeter ses mégots/déchets sur la plage, l’amende est donc théoriquement possible, mais cela est généralement peu sanctionné (le rappel au règlement suffit). Ce n’est toutefois pas une raison pour adopter ce type de comportement incivique. Des cendriers portatifs sont parfois distribués sur les plages, et les poubelles sont toujours présentes à l’entrée.

Attention, de plus en plus de villes françaises interdisent purement et simplement la cigarette sur certaines de leurs plages (ex : Nice, La Ciotat, Antibes). La liste complète des « plages sans tabac » est disponible sur le site internet de la Ligue contre le cancer. L’amende y est alors encourue, et certaine (38 euros).

***

Retrouvez cet article en kiosques cet été dans votre magazine « Le Particulier pratique » (groupe Le Figaro).

Bel été à tous !

Ibn Touloun

Le maire, le chef de service et le lycéen sont chacun concernés par le mois de ramadan (رَمَضان), troisième pilier de l’islam, et plus particulièrement par la fête de l'Aïd el-Fitr (عيد الفطر) qui célèbre la fin du jeûne. Le premier est sollicité pour la mise à disposition de salles communales (1), le deuxième pour l’octroi d’autorisations d’absence (2), et le troisième pour les épreuves du baccalauréat (3).
 
  1. La mise à disposition de salles communales pendant le ramadan
Devant l’afflux de fidèles, et ne disposant souvent pas de locaux adaptés, il est fréquent que les associations musulmanes sollicitent du maire la mise à disposition de salles communales ou de gymnases afin de fêter l'Aïd el-Fitr à la fin du jeûne.

Il n’est pas rare que les maires refusent la mise à disposition sollicitée, arguant de l’impossibilité pour une collectivité de subventionner un culte, sur le fondement de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État, ce qui a parfois été validé par des juridictions de première instance (pour un exemple, voir TA Versailles, ordonnance du 18 septembre 2015, Association des musulmans de Mantes Sud, n°1506105).

On conseillera toutefois aux maires d’être prudents en la matière.

En effet, le Conseil d’Etat considère qu’une commune doit accéder aux demandes de mise à disposition exceptionnelle d’une salle communale pour la célébration d’un culte tel que l'Aïd el-Fitr, sur le fondement des libertés de réunion et de culte, et de l'article L. 2144-3 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) (voir CE, ordonnance du 23 septembre 2015, Association des musulmans de Mantes Sud, n° 393639).

Cet article permet en effet à une commune d’autoriser, dans le respect du principe de neutralité à l’égard des cultes et du principe d’égalité, l’utilisation d’un local qui lui appartient pour l’exercice d’un culte par une association, dès lors que les conditions financières de cette autorisation excluent toute libéralité et, par suite, toute aide à un culte (c’est à dire en faisant payer l’association en contrepartie).

SisypheAvocats
Cette position du Conseil d’Etat devra donc être prise en considération. Il n’en demeure pas moins que l'article L. 2144-3 du CGCT dispose également que les nécessités de l'administration des propriétés communales, du fonctionnement des services publics et du maintien de l'ordre public peuvent justifier un refus de mise à disposition. Un refus pourra par conséquent toujours s’envisager si des circonstances locales particulières le justifient. Que l’on pense par exemple à l’utilisation nécessaire des gymnases par les écoles, collèges et lycées publics, aux réservations antérieures de salles communales pour des spectacles, ou aux contraintes liées à la préservation de l’ordre public, dans le contexte contraint de l’état d’urgence. Les conditions élémentaires de sécurité et la réglementation applicable aux établissements recevant du public peuvent enfin s’opposer à la mise à disposition de certaines salles communales inadaptées à l’accueil de milliers de fidèles.  

En tout état de cause, l’autorisation délivrée (le cas échéant) ne saurait qu’être exceptionnelle, strictement limitée dans le temps (seulement quelques heures) et en contrepartie d’une participation financière.

  1. Les autorisations d’absence pour la célébration des fêtes religieuses
Un certain nombre d’agents publics musulmans souhaitent bénéficier d’une autorisation d’absence afin de célébrer l'Aïd el-Fitr. Ne figurant par définition pas au calendrier chrétien, cette fête n’est pas considérée comme un jour férié en France. Les chefs de service sont par conséquent souvent confrontés à un afflux de demandes d’autorisations d’absence fin juin.

SisypheAvocats
La circulaire du ministre de la fonction publique du 10 février 2012 relative aux autorisations d’absence pouvant être accordées à l’occasion des principales fêtes religieuses des différentes confessions dispose que trois fêtes musulmanes peuvent donner lieu à des autorisations exceptionnelles d’absence :

  • L’Aïd El Adha (عيد الأضحى),
  • L’Al Mawlid Ennabi (المولد النبويّ),
  • Et l’Aïd El Fitr (عيد الفطر).
En application de ce texte, les chefs de service peuvent donc accorder aux agents qui la demandent une autorisation d’absence pour célébrer l'Aïd el-Fitr. 

L’absence de l’agent pour la célébration de l'Aïd el-Fitr est conditionnée par la délivrance préalable, par le chef de service, de cette autorisation d’absence, qui n’est toutefois pas un droit pour l’agent : des motifs liés au fonctionnement normal du service public peuvent justifier un refus d’autorisation.

On note sur ce point que la date exacte de l'Aïd el-Fitr est souvent fixée à la dernière minute par les autorités religieuses (oulémas) puisqu’elle est arrêtée par l’observation du ciel et dépend de la position de la lune lors de la « Nuit du doute ». Si l’autorisation d’absence peut prévoir en son sein un décalage de dates possible, il n’en demeure pas moins que cette connaissance tardive et immédiate du jour de la fête peut être de nature à désorganiser le service public (que l’on pense par exemple au service public hospitalier) et justifier légalement un refus d’autorisation d’absence par le chef de service.

Enfin, les autorisations exceptionnelles d’absence ne concernent bien évidemment que les trois fêtes religieuses susvisées, et un agent public ne saurait pouvoir prétendre à des autorisations systématiques d’absence pendant tout le mois de ramadan.

  1. La conciliation du baccalauréat et du ramadan
Comme en 2016, les épreuves du bac 2017 tombent pendant le ramadan (RTL).

SisypheAvocats
Bien évidemment, aucun report d’épreuve, aménagement ni autorisation d’absence ne saurait pouvoir être accordé aux lycéens sur ce fondement. En application du principe de laïcité, les convictions religieuses ne sauraient en effet pouvoir être opposées à l'obligation d'assiduité ni aux modalités d'un examen.

S’agissant spécifiquement de la fête de l’Aïd el-Fitr, qui coïncide souvent avec les épreuves orales de rattrapage du bac (début juillet), certains chefs d’établissement s’appuient sur une circulaire du 18 mai 2004 pour reporter les oraux des élèves concernés (FranceInfo). Le texte dispose en effet que : 

« L'institution scolaire et universitaire (…) doit prendre les dispositions nécessaires pour qu'aucun examen ni aucune épreuve importante ne soient organisés le jour (des) grandes fêtes religieuses »

Ce report d’épreuve est toutefois très exceptionnel et n’est pas de droit pour les élèves. Si une demande adressée au chef d’établissement est toujours possible, on incitera les lycéens à la plus grande prudence en la matière.

Legislatives2017Les prochaines élections législatives se dérouleront les dimanches 11 et 18 juin 2017. C’est l’occasion de faire le point sur les possibilités de recours en la matière.

1/ L’intérêt à agir

Le droit de contester le scrutin législatif appartient :

  • À toutes les personnes inscrites sur les listes électorales de la circonscription dans laquelle il a été procédé à l'élection,
  • Ainsi qu'aux personnes qui ont fait acte de candidature (perdants).
A contrario, les opérations électorales ne peuvent donc pas être contestées par les partis politiques, les associations, ou les personnes publiques (Article 33 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel).

Le scrutin législatif d’une circonscription ne peut par ailleurs pas être contesté par un électeur d’une autre circonscription.

2/ La juridiction compétente

Il résulte de l’article 59 de la Constitution que le Conseil constitutionnel est seul compétent pour connaître de la régularité des élections législatives :

« Le Conseil constitutionnel statue, en cas de contestation, sur la régularité de l'élection des députés et des sénateurs ».

Un recours contre le scrutin législatif porté devant le Tribunal Administratif ou le Conseil d’Etat sera donc irrecevable.

Les recours devront donc être adressés au 2 Rue de Montpensier, 75001 Paris.

3/ Les délais pour agir, et les modalités concrètes d’exercice du recours
 
L'élection d'un député peut être contestée devant le Conseil constitutionnel jusqu'au dixième jour qui suit la proclamation des résultats de l'élection, au plus tard à 18 heures (Article 33 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel).

Ainsi, les recours contre les élections législatives de 2017 devront être déposés au secrétariat général du Conseil constitutionnel au plus tard :

  • Le mercredi 21 juin 2017 à 18 H pour une élection acquise au premier tour,
  • Ou le mercredi 28 juin 2017 à 18 H pour une élection acquise au second tour.
On note toutefois que les résultats sont généralement proclamés le lundi qui suit le tour de scrutin au terme duquel l’élection est acquise, ce qui porte le délai de recours aux jeudis 22 et 29 juin 2017, mais il convient d’être prudent en la matière.

Toutes les personnes ayant intérêt à agir contre le scrutin ont le choix d’adresser leur requête :

  • Directement au Secrétariat général du Conseil constitutionnel,
  • Ou indirectement, au Préfet, qui assurera lui-même la transmission au Conseil constitutionnel.
On conseillera toutefois aux requérants de préférer la voie directe, en adressant leur requête au Secrétariat général du Conseil constitutionnel par LRAR (afin de conserver la preuve de l’envoi dans les délais). L’intermédiaire du Préfet pourrait en effet poser difficultés en matière de computation des délais (en cas de litige) et n’apporte pas de plus-value supplémentaire sur la requête.

4/ La présentation de la requête

Le Conseil constitutionnel ne peut être saisi que par une requête écrite adressée au secrétariat général du Conseil ou au représentant de l'Etat.

De manière traditionnelle s’agissant d’un contentieux administratif, la requête en contestation d’un scrutin législatif devra impérativement :

  • Être signée par le requérant,
  • Comporter ses nom, prénom, domicile, et qualité (électeur / candidat vaincu),
  • Indiquer de manière précise et non équivoque le nom des élus dont l’élection est attaquée,
  • Mentionner les irrégularités relevées (seuls les griefs pouvant exercer une influence sur les résultats de l’élection seront examinés par le Conseil).
La requête n'a pas d'effet suspensif : le député proclamé élu continue d’exercer son mandat tant qu’aucune décision d’annulation n’a été rendue.  


5/ L’instruction

Le Conseil constitutionnel dispose de la faculté de rejeter par décision motivée et sans instruction contradictoire préalable, les requêtes irrecevables ou ne contenant que des griefs qui ne peuvent manifestement pas avoir une influence sur les résultats de l'élection. Cette décision est immédiatement notifiée à l'Assemblée nationale (Article 38 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel).

Il convient donc de prêter une attention particulière à la rédaction de la requête pour ne pas risquer l’irrecevabilité, et le rejet sans instruction par le Conseil constitutionnel.

Dans l’hypothèse d’une requête recevable, le Conseil constitutionnel avise le député dont l’élection est contestée du recours, et lui donne un délai de son choix pour produire des observations écrites, dans le respect du contradictoire.

Dès réception de ces observations ou à l'expiration du délai imparti pour les produire, l'affaire est rapportée devant le Conseil qui statue par une décision motivée. Cette décision est notifiée à l'Assemblée nationale.

Cette procédure rappelle ici encore l’importance de la bonne rédaction de la requête initiale, puisque le Conseil constitutionnel est en capacité juridique de statuer sur la base de cette seule requête, et de la réponse adverse, sans attendre de mémoire complémentaire.  

Dans le cadre de l’instruction, le Conseil constitutionnel peut, si besoin, ordonner une enquête et se faire communiquer tous documents et rapports ayant trait à l'élection (notamment les comptes de campagne établis par les candidats intéressés). Il peut également procéder à l’audition des parties et entendre des témoins. En 2012, le Conseil a procédé à huit auditions.

6/ Les irrecevabilités

L’irrecevabilité peut d’abord résulter du caractère prématuré de la requête. En effet, contester les résultats au soir du premier tour pour une élection acquise au second tour est inutile : la requête sera irrecevable. Il convient donc de bien veiller à attaquer le scrutin après le second tour (le cas échéant), en invoquant éventuellement à l’appui de la requête des moyens liés à l’irrégularité du premier tour de scrutin. Pour des exemples de 2012, voir :

  • Décision n° 2012-4546, (Français établis hors de France, 11e),
  • Décision n° 2012-4547, (Hauts-de-Seine, 7e),
  • Décision n° 2012-4548, (Hauts-de-Seine, 6e),
  • Décision n° 2012-4550, (Paris, 2e).
L’irrecevabilité peut également résulter de la tardiveté de la requête. On veillera donc à bien respecter les délais pour agir (voir les délais supra). En 2012, de nombreuses requêtes ont été irrecevables pour tardiveté :

  • Décision n° 2012-4643 (Hauts-de-Seine, 6e),
  • Décision n° 2012-4644 (Alpes-Maritimes, 2e).
La requête sera aussi irrecevable si elle est déposée auprès d’une autorité incompétente pour la recevoir comme le Tribunal administratif. Pour un exemple, voir la Décision n° 2012-4582 (Nord, 9e).

Enfin, l’irrecevabilité sera constatée lorsque la requête contient uniquement des moyens ne tendant pas réellement à l’annulation de l’élection du député : il s’agit de griefs insusceptibles d’exercer une influence sur l’issue du scrutin. Ainsi, à titre d’exemples, de :

  • La seule présence d’un candidat au premier tour (Décision n°2012-4562, Nord, 13e),
  • Le seul contenu d'affiches électorales (Décision n°2012-4573, Seine-Maritime, 10e).
Une bonne rédaction de la requête permettra d’éviter toute irrecevabilité.

7/ Les moyens invocables

Tout moyen peut être invoqué par les requérants pour démontrer la nullité du scrutin (ex : irrégularités des affiches électorales, tracts, démarchage irrégulier sur internet ou par téléphone, fausses procurations, comptes de campagnes, pressions par intimidation ou corruption, différences de signatures d’électeurs entre le premier et le second tour, vices des opérations électorales, etc.).

On conseillera donc aux équipes de campagne des candidats de bien surveiller et relever toutes les irrégularités constatées, surtout pendant les opérations électorales, quitte à faire le tri au lendemain de l’élection.

L’annulation du scrutin ne sera toutefois encourue qu’en cas de griefs précis, démontrés, établis en fait, et susceptibles d’exercer une influence sur l’issue du scrutin en raison d’un faible écart de voix.

En 2012, le Conseil constitutionnel a été saisi de 108 requêtes, et n’a prononcé que 7 annulations.

À titre d’exemples :

  • Dans la 6ème circonscription de l’Hérault, le Conseil a invalidé 23 procurations, et annulé par conséquent l’élection acquise avec une avance de dix voix (Décision n° 2012-4590 A.N., 24 octobre 2012, Hérault 6e circ.),
  • Dans l’Oise, la diffusion tardive d’un tract a altéré la sincérité du scrutin et invalidé ce dernier, acquis avec 63 voix d’écart (Décision n° 2012-4594 A.N., 25 janvier 2013, Oise 2e circ.),
  • Dans les Hauts-de-Seine, l’élection a été annulée car le suppléant du candidat élu était déjà le remplaçant d’un sénateur élu (Décision n° 2012-4563/4600 A.N., 18 octobre 2012, Hauts-de-Seine 13e circ.).
Plus l’écart de voix sera faible, plus l’hypothèse d’un recours devra donc être sérieusement envisagée par les candidats.

8/ Les pouvoirs du Conseil constitutionnel – les conséquences du recours

Le Conseil constitutionnel dispose d’un pouvoir très large en matière électorale et peut notamment :

  • Rejeter la requête et valider l’élection,
  • Annuler l’élection (dans la circonscription concernée),
  • Réformer les résultats et proclamer élu un autre candidat.
L’annulation du scrutin législatif dans une circonscription est loin d’être exceptionnelle, le Conseil constitutionnel ayant déjà prononcé 63 annulations en la matière depuis sa création en 1958.   

On note toutefois que le Conseil constitutionnel n’a jamais encore proclamé élu un candidat à la place d’un autre, bien qu’il ait tout à fait pouvoir pour ce faire. La tendance est donc plutôt à l’annulation du scrutin en cas d’irrégularités, et à laisser les électeurs se prononcer à nouveau.  

9/ Les délais de jugement et les possibilités de recours contre la décision rendue

Aucun délai n’est fixé au Conseil constitutionnel pour rendre sa décision. Le délai de jugement variera donc en fonction de la complexité des irrégularités relevées.

Il convient de rappeler que le député élu restera en place jusqu’à l’éventuelle décision d’annulation.

En application de l’article 62 de la Constitution, l’autorité de la décision rendue par le Conseil constitutionnel est absolue : aucun recours n’est possible.
La décision du juge constitutionnel n'a toutefois d'effet juridique qu'en ce qui concerne l'élection dont il est saisi (circonscription concernée).

Enfin, si le recours à un avocat est facultatif en matière électorale devant le Conseil constitutionnel, les conseils et l’expérience du professionnel s’avèrent néanmoins pertinents et efficaces pour contester valablement le scrutin législatif.

PODCASTs

écoutez-moi sur :

Soundcloud 

iTunes

INTERVENtions PRESSE

- Le Progrès (19/02/2024)
- France 2 (12/02/2024)
- BFMTV (12/02/2024)
- BFMTV (11/02/2024)
- Independent Arabia (26/01/2024)
- Le Progrès (14/01/2024)
- Independent Arabia (16/12/2023)
- Le Progrès (15/10/2023)
- Independent Arabia (31/08/2023)
- Franceinfo (28/08/2023)
- Europe 1 (18/07/2023)
- Amnesty International (04/07/2023)
- Franceinfo (02/07/2023)
- Le Progrès (28/06/2023)
- Le Figaro (04/05/2023)
- Actu Paris (04/05/2023)
- BFMTV (23/04/2023)
- Le Point (01/02/2023)
- Ouest France (31/01/2023)
- Sud Radio (30/01/2023)
- Radio classique (19/01/2023)
- Le Figaro (17/01/2023)
- Le Parisien (14/01/2023)
- Le Progrès (06/01/2023)
- Ouest France (23/12/2022)
- France 3 (17/12/2022)
- France 3 (10/12/2022)
- Le Progrès (08/12/2022)
- Le Progrès (22/11/2022)
- Sud Radio (18/10/2022)
- TF1 (08/10/2022)
- Ouest France (01/10/2022)
- Le Progrès (22/09/22)
- Le JDD (11/09/22)
- BFMTV (03/09/22)
- Ouest France (01/09/22)
- Le Parisien (01/09/22)
- BFMTV (08/08/22)

- BFMTV (08/08/22)
- Libération (06/08/22)
- Tout sur mes finances (18/07/22)
- Ouest France (13/07/22)
- 20 Minutes (09/05/22)
- Le Figaro (06/07/21)
- Radio classique (11/06/21)
- Ouest France (04/06/21)
- Marianne (03/06/21)
- TV France 3 (20/05/21)
- TV France 3 (21/11/20)
- Franceinfo (23/11/20)
- L'Écho républicain (03/11/20)
- Pépère news (02/11/20)
- Franceinfo (15/09/20)
- Le JDD (30/08/20)
- Causeur (22/05/20)
- Challenges (27/04/20)
- Libération (04/03/20)
- Acteurs publics (04/03/20)
- Acteurs publics (03/03/20)
- Le JDD (07/01/20)
- Sud Radio (05/12/19)
- UCLy (06/12/19)
- Causeur (01/12/19)
- Le Parisien (01/11/19)
- La voix du Nord (07/08/19)
- France info (16/07/19)
- Ouest France (06/07/19)
- LCI (04/05/19)
- Le Figaro (29/04/19)
- Libération (10/04/19)
- Libération (25/03/19)
- TV 20H RT France (10/01/19)
- Capital (04/01/19)
- Le Parisien (03/01/19)
- LCI (03/01/19)
- Causeur (12/12/18)
- Ouest France (16/11/18)
- Causeur (25/10/18)
- Causeur (17/10/18)
- Le Figaro (28/09/18)
- Causeur (03/07/18)
- TV Franceinfo (09/05/18)
- La Croix (03/05/18)
- Franceinfo (02/05/18)
- Causeur (27/10/17)
- Ouest France (19/06/17)
- 20 minutes (07/06/17)
Le Monde (10/03/17)
- Causeur (16/03/17)
- RTBF (04/04/17)
Politis (13/03/17)
- L'Express (12/10/16)
- Radio Classique (04/10/16)
TV France 24 (27/08/16)
- Le Parisien (27/08/16)
L'Express (26/08/16)
- RMC (21/06/16)
- La Tribune de Lyon (03/12/15)
- La semaine juridique JCPA (31/08/15)
- L'Express (26/02/14)
20 Minutes (06/01/14)
- La Revue des Droits de l'Homme

Suivez-moi sur