Les prochaines élections municipales se dérouleront les dimanches 15 et 22 mars 2020. C’est l’occasion de faire le point sur les possibilités de contester ce scrutin ou ses résultats.
1/ Qui peut contester ?
- Tout électeur de la commune, même s’il n’est pas inscrit sur les listes électorales,
- Toute personne éligible dans la commune (voir les articles 45, L.228 et L.229 du code électoral),
- Les candidats,
- Les élus,
- Et le Préfet.
A contrario, les opérations électorales ne peuvent donc pas être contestées par les partis politiques, les associations, les syndicats ou la commune elle-même.
2/ Devant quelle juridiction ?
Le ressort de tous les tribunaux administratifs de France peut être consulté
ici.
3/ Dans quel délai ?
Il faut agir très vite en matière de contentieux des élections municipales.
En effet, les électeurs et toute personne éligible dans la commune doivent déposer leur recours (appelé « protestation électorale ») au greffe du Tribunal administratif de ressort au plus tard à 18 heures le cinquième jour qui suit l’élection (
article R.119 du Code électoral).
Le délai de recours est donc de seulement 5 jours à partir du scrutin.
Ainsi, les recours contre les élections municipales de 2020 devront être déposés, au plus tard, au greffe du Tribunal administratif de ressort :
- Le vendredi 20 mars 2020 pour une élection acquise au premier tour,
- Ou le vendredi 27 mars 2020 pour une élection acquise au second tour.
Étant précisé que chaque tour de scrutin est bien entendu susceptible de faire l'objet d'un recours (
CE, 6 mai 2009, n° 317867).
4/ Comment s’y prendre concrètement ?
Il faudra déposer son recours (protestation électorale) dans le délai de 5 jours au greffe du Tribunal administratif de ressort ou en ligne
sur le site Télérecours.
Il est également possible de demander le jour même du scrutin la consignation d’une réclamation au procès-verbal ou de la déposer à la sous-préfecture ou à la préfecture au plus tard à 18 heures le cinquième jour qui suit l’élection. Ces réclamations seront alors immédiatement adressées au Préfet qui les fera enregistrer au greffe du Tribunal administratif de ressort.
Enfin, le Préfet, s’il estime que les conditions et les formes légalement prescrites n’ont pas été remplies, peut lui-même également déférer les opérations électorales au Tribunal administratif dans le délai de 15 jours à compter de la date de la réception du procès-verbal en préfecture.
Dans le respect du principe du contradictoire, le Tribunal administratif notifie alors la réclamation aux conseillers dont l’élection est contestée, dans les 3 jours de l’enregistrement de la requête au greffe. Un délai maximum de 5 jours est alors ouvert aux conseillers municipaux afin de déposer leur défense au greffe et de faire connaître s’ils entendent ou non user du droit de présenter des observations orales (
article R.119 du Code électoral).
5/ Comment présenter son recours ?
La requête en contestation d’un scrutin municipal (protestation électorale) devra impérativement :
- Étre signée par le requérant (CE, 7 décembre 1983, commune de Briot, n° 51788),
- Comporter ses nom, prénom, et domicile,
- Indiquer de manière précise et non équivoque les demandes (ex: annulation du scrutin et/ou proclamation d’un autre candidat) (CE, 22 juin 1990, commune de Forbach, n° 107768) ainsi que les irrégularités relevées (CE, 9 octobre 2002, commune de Goyave, n° 235362).
6/ L’avocat est-il obligatoire ?
Le recours à un avocat est
facultatif en matière électorale devant les tribunaux administratifs, mais les conseils du professionnel seront néanmoins efficaces pour contester valablement et efficacement le scrutin municipal.
7/ Avec quels arguments ?
Tout moyen (argument) peut être invoqué par les requérants pour démontrer la nullité des opérations électorales :
- Les manœuvres altérant la sincérité du scrutin (ex: diffamation) (CE, 14 novembre 2008, commune du Vauroux, n° 316708 – CE, 16 juin 1972, Élections municipales du Blanc, n° 84204),
- L’inscription de faux électeurs,
- L’achat de votes,
- L’absence de signature de l’un des candidats sur la déclaration de candidature (CE, ass., 21 décembre 1990, Élections municipales Mundolsheim, n° 112221),
- L’inéligibilité d’un candidat (CE, 29 juillet 2002, Élections municipales Levallois Perret, n° 240108),
- Les éléments matériels démontrant la rupture d’égalité entre les candidats,
- Les infractions commises lors du déroulement du scrutin, etc.
L’annulation totale du scrutin ne sera toutefois prononcée par le juge qu’en cas de
vice(s) substantiel(s), ou si le juge ne peut déterminer avec certitude le résultat de l’élection en raison des irrégularités commises.
8/ Que pourra faire le juge ?
Le juge de l’élection municipale dispose d’un pouvoir très large et peut notamment :
- Contrôler la validité des suffrages émis,
- Modifier le nombre de suffrages recueillis par un candidat,
- Reconnaître l’inéligibilité d’un candidat,
- Annuler de manière totale (en cas de vice substantiel) ou partielle, le scrutin,
- Ou proclamer élus certains candidats à la place d’autres.
Il conviendra donc d’apporter un soin tout particulier à la rédaction de la protestation électorale (recours objectif de plein contentieux) dans la mesure où le juge électoral est tenu par les demandes des parties et ne pourra donc, sauf moyens d’ordre public, prononcer des mesures qui ne lui ont pas été demandées par le requérant (CE, 1er décembre 1989,
commune de Seraincourt, n°108998).
9/ Quel sera le délai de jugement ?
10/ Quelles possibilités de recours contre la décision rendue ?
Le recours éventuel contre la décision du Tribunal administratif doit être porté devant le Conseil d’État (pas la Cour administrative d’appel), dans le délai d’un mois à partir de la notification de la décision (
article R.123 du Code électoral).
A noter enfin que le(s) conseiller(s) proclamé(s) élu(s) reste(nt) en place jusqu’à ce que le Conseil d’État ait définitivement statué sur le contentieux (pas d’effet suspensif sur le mandat).
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