Marlène Schiappa à Paris 14e, Gérald Darmanin à Tourcoing et sans doute même Édouard Philippe au Havre… Le Président Emmanuel Macron incite fortement ses ministres à se lancer dans la bataille des municipales, en se portant eux-mêmes candidats en mars prochain. C’est l’occasion de rappeler les règles de cumuls possibles en la matière.
La sagesse populaire rappelle qu’on ne peut pas « être au four et au moulin ». Outre la volonté de limiter les rémunérations, c’est l’idée sous-jacente des interdictions de cumuls de mandat publics, qui sont issues de plusieurs textes.
1/ Le cas des parlementaires
À ce jour,
les fonctions de maire sont incompatibles avec celles de député et de sénateur (
Article LO141-1 du code électoral). L’élu qui se trouve placé en situation de cumul dispose d’un délai de
30 jours qui suit la date de la proclamation des résultats de l'élection qui l'a mis en situation d'incompatibilité pour faire un choix. À défaut d'option dans ce délai imparti,
le mandat acquis à la date la plus ancienne prend fin de plein droit (
Article LO151 du code électoral).
Attention, cette interdiction de cumul des fonctions parlementaires ne s’applique pas au mandat de conseiller municipal : un député ou un sénateur peut donc tout à fait rester conseiller municipal s’il est élu, sans pouvoir toutefois être maire ni même adjoint au maire.
2/ Le cas des membres du gouvernement
Pour les membres du gouvernement, les choses sont moins claires. Si
l’article 23 de la Constitution interdit de cumuler les fonctions de membre du gouvernement avec
« l'exercice de tout mandat parlementaire, de toute fonction de représentation professionnelle à caractère national et de tout emploi public ou de toute activité professionnelle », il ne traite toutefois pas des mandats électifs locaux.
En réalité, aucune règle juridique n’interdit à ce jour de cumuler les fonctions de membres du gouvernement (ministre, Premier ministre, secrétaire d’État) avec celles de maire, d’adjoint au maire ou de conseiller municipal.
L’interdiction est coutumière. Comme son prédécesseur, le Président Macron a en effet posé dès le début de son mandat comme règle que les fonctions gouvernementales étaient incompatibles avec l’exercice de tout mandat exécutif local (
Le Figaro). Ceci implique qu’un membre du gouvernement qui choisirait d’exercer la fonction de maire pourrait (en théorie) être débarqué du gouvernement, mais en revanche que les fonctions de conseiller municipal ne sont pas concernées par la règle posée par l’Élysée.
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La volonté du Président Macron se comprend aisément : inciter ses ministres à livrer la bataille des municipales en s’impliquant personnellement pour redonner de la légitimité démocratique à son gouvernement et le relancer. C’est toutefois un jeu à double tranchant : élus aux municipales, les membres du gouvernement Philippe pourront rester conseillers municipaux, mais s’ils venaient à être battus, c’est la question de leur maintien au gouvernement qui se poserait, puisqu’ils seraient délégitimés par le suffrage universel…
Plus généralement, ces règles de non-cumul très populaires dans l’opinion doivent toutefois nous amener à nous interroger. Côté pile, les nouvelles interdictions de 2014 ont notamment conduit à un rajeunissement et à une féminisation de l’Assemblée nationale. Mais côté face, elles pourraient avoir contribué à la crise des « gilets jaunes », en déconnectant la représentation nationale de la réalité locale. Attention à ce que les mêmes causes ne produisent pas les mêmes effets à l’avenir.
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