Le président de la République a dévoilé
dans le journal La Croix le 10 mars 2024 les grandes lignes du projet de loi « relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie » qui a été dans la foulée transmis pour avis au Conseil d’État. Le texte devrait être présenté en Conseil des ministres au mois d’avril, pour un débat au Parlement avant l’été.
Le système est strictement encadré, cinq conditions devant être cumulativement remplies pour accéder à une « aide à mourir » : un patient majeur, doté d’un discernement plein et entier, atteint d’une maladie incurable avec un pronostic vital engagé à court ou moyen terme et présentant une souffrance physique ou psychologique réfractaire ou insupportable liée à son affection.
Si toutes ces conditions sont remplies, le patient pourra présenter une demande à un professionnel de santé qui disposera d’un délai de quinze jours pour prendre sa décision, à savoir prescrire une substance létale que le patient pourra prendre lui-même ou que le médecin lui administrera.
Comme en matière d’interruption volontaire de grossesse, les professionnels de santé pourront faire valoir leur clause de conscience. Inspiré par le serment d'Hippocrate, véritable boussole déontologique – «
Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. » - le droit du médecin de refuser des soins pour des raisons personnelles est protégé par le code de la santé publique.
Aucun médecin ne pourra donc être contraint de prendre une part active à une « aide à mourir » demandée par un patient s’il fait valoir sa clause de conscience. Cependant, et c’est important, le projet de loi prévoit qu’en cas de refus d’un médecin d’accéder à une demande d’ « aide à mourir », s’il estimait, par exemple, que les cinq conditions ne sont pas réunies pour un patient, le malade pourra saisir le tribunal administratif d’un recours.
Qu’adviendra-t-il alors ? Saisi en urgence, le juge administratif pourra-t-il ordonner aux praticiens de donner la mort ? Ce serait un grand basculement. Le juge, comme le médecin, pourra-t-il faire valoir une clause de conscience pour refuser de connaître d’un tel dossier ? Le projet de loi ne prévoit rien en ce sens à ce stade. Comme pour les professionnels de santé, il semble pourtant indispensable de prévoir une clause de conscience pour les gens de justice qui ne souhaiteraient pas participer à une telle procédure.
Des considérations religieuses –
« L'homme n'est pas maître de son souffle pour pouvoir le retenir, et il n'a aucune puissance sur le jour de la mort » (Ecclésiaste 8:8) – comme philosophiques –
« Les humains sont assignés à résidence et nul n'a le droit de s'affranchir de ces liens pour s'évader » (Platon, Phédon) – peuvent en effet conduire tout professionnel, médecin comme juge, à refuser de participer à l’euthanasie. C’est un devoir impérieux pour le législateur de leur laisser cette possibilité.