En revanche, l'agent qui abuse du droit de retrait en l'exerçant dans une situation qui ne le justifie pas s'expose à des sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu'au licenciement pour abandon de poste.
La question est donc la suivante : une contamination de locaux publics par des punaises de lit constitue-t-elle une situation de danger grave et imminent justifiant le droit de retrait des fonctionnaires ?
2/ La contamination de locaux publics par des punaises de lit, une situation regrettable, mais pas un danger grave et imminent justifiant le droit de retrait des fonctionnaires
L’exercice du droit de retrait des fonctionnaires reste une situation très exceptionnelle.
Même si l’appréciation du danger est toujours subjective, seule une situation de vrai danger grave et imminent pour la santé physique de l’agent peut justifier sa mise en œuvre. Le juge administratif exerce son contrôle sur l’existence d’un motif raisonnable qui permettrait à l’agent de penser qu’un tel danger est caractérisé pour sa santé physique.
Or le juge administratif, qui exerce un contrôle normal en la matière, ne reconnaît que rarement l’existence d’un vrai danger autorisant le droit de retrait des fonctionnaires. Sans doute pour ne pas ouvrir la porte à un exercice abusif de ce droit dans la fonction publique et ne pas porter atteinte à la continuité du service public.
Le juge administratif exige ainsi une situation de danger grave pour justifier le droit de retrait, comme la présence d’amiante dans les locaux avec un vrai risque cancérigène[1], un risque d'agression d'un agent par ses collègues ou des usagers[2] ou une situation de harcèlement moral[3].
L’examen de la jurisprudence permet de conclure qu’une contamination de locaux publics par des punaises de lit, bien que très regrettable, ne constitue pas pour autant une situation de danger grave et imminent justifiant le droit de retrait des fonctionnaires :
Les fonctionnaires ne peuvent donc pas exercer leur droit de retrait sur le seul fondement de la présence de punaises de lit dans les locaux, car cette situation ne sera pas jugée suffisamment dangereuse par le juge pour justifier l’exercice de ce droit.
Prudence en la matière, car si les conditions du droit de retrait ne sont pas réunies, l'agent peut faire l'objet d'une retenue pour absence de service fait ou de sanctions disciplinaires.
Ce qui ne signifie pas pour autant que l’administration ne doive rien faire : l’employeur public est garant de la santé et sécurité de ses agents et doit donc tout mettre en œuvre pour la décontamination de locaux infectés, sauf à risquer de voir sa responsabilité engagée.
[1] TA Marseille, 24 mai 2011, Hierlé, n° 0805542
[2] CAA Marseille, 10 février 2009, n° 06MA01703
[3] CE, 16 décembre 2009, n°320840
[4] CE, 18 juin 2014, n°369531
[5] TA Versailles, 2 juin 1994, Hadjab, Lebon 1193
Avocat Droit Public
Enseignant aux Universités de Lyon
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