Pierrick Gardien

Pierrick Gardien

Avocat Droit Public
Enseignant aux Universités de Lyon

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jeudi, 18 novembre 2021 10:02

35H : l’État contre Anne Hidalgo

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Le 25 octobre 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a suspendu l’application du nouveau règlement du temps de travail des agents de la Ville de Paris voulu par Anne Hidalgo. Le juge administratif a considéré qu’un doute sérieux sur la légalité de ce règlement, qui prévoit une durée annuelle de travail effectif des agents inférieure à la durée légale nationale obligatoire, était caractérisé.

Dans une optique d’égalité, la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a décidé la suppression progressive des régimes dérogatoires aux 35H qui se maintenaient depuis 2001 dans certaines collectivités territoriales, avec un horizon au 1er janvier 2022 au plus tard pour s’aligner.

Ceci implique, pour chaque collectivité, de prévoir une durée annuelle de travail effectif des agents de 1 607 heures.

Mais certaines collectivités ont refusé d’appliquer le nouveau régime, préférant maintenir leur régime dérogatoire illégal. C’est le cas de la Ville de Paris, qui a choisi d’adopter un nouveau règlement concernant le temps de travail de ses personnels violant délibérément la loi du 6 août 2019 en maintenant une durée annuelle de travail effectif des agents de 1 552 heures seulement (délibération 2021 DRH 39 des 6, 7, 8 et 9 juillet 2021).

Dans le cadre de ce règlement, 3 jours de congés supplémentaires par rapport à la règle nationale sont alloués par la Ville de Paris à ses agents au nom d’une pénibilité qui serait spécifiquement liée au travail dans la capitale, notamment compte tenu de la pollution et du bruit.

C’est ce que prévoit une nouvelle sujétion créée par le règlement « au titre de l’intensité et de l’environnement de travail induisant une pénibilité spécifique pour les agents (…) exposés de manière générale à des niveaux importants de bruit et de pollution atmosphérique et soumis à des conditions de travail particulière du fait de la sursollicitation du territoire et des services publics parisiens liés à l’activité de la ville-capitale ».

Mais la loi ne prévoit pas de dérogation possible à la durée hebdomadaire de travail de 35H pour les fonctionnaires territoriaux, décidée sur le plan national depuis 2001 et réaffirmée le 6 août 2019.

En outre, alors que la loi prévoit une harmonisation obligatoire au 1er janvier 2022 au plus tard, le nouveau règlement de la Ville de Paris décide d’une entrée en vigueur vague et progressive sur le premier semestre de l’année 2022.

Le règlement de la Ville de Paris, qui a la valeur d’un acte administratif, entre directement en violation de la loi du 6 août 2019, qui a par nature une valeur législative et lui est donc supérieure.

Conformément aux pouvoirs qu’il détient de l’article L2131-6 du CGCT et surtout de l’article 72 de la Constitution, le préfet de la région d’Ile-de-France, préfet de Paris, qui a la charge du respect des lois n’a donc pas eu d’autre choix que de déférer le nouveau règlement du temps de travail des personnels de la Ville de Paris au tribunal administratif, au titre du contrôle de légalité.

Le préfet a assorti son recours d'une demande de suspension en référé de l’acte attaqué, dans l’attente du jugement au fond du litige.

Par une ordonnance du 25 octobre 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Paris, a donné raison à l’État en estimant qu’un doute sérieux existait quant à la légalité de deux dispositions du nouveau règlement du temps de travail des agents de la Ville de Paris.

La première porte sur les conditions d’entrée en vigueur progressive de ce règlement, alors même que la loi de transformation de la fonction publique prévoie en effet une entrée en vigueur au plus tard au 1er janvier 2022.

La seconde porte sur l’octroi à la totalité des agents de la Ville de Paris, indépendamment de la nature de leur mission et de la définition des cycles de travail qui en résultent, de 3 jours de congés supplémentaires en raison de la pénibilité de leurs conditions de travail, qui ne résulte d’aucune pièce ni d’aucune étude, si ce n’est cette seule affirmation. Au demeurant, le juge rappelle que même dans l'hypothèse où des agents se voient attribuer des jours de congés excédant le nombre de jours de congés légaux, il appartient à l'autorité compétente de définir une organisation des cycles de travail qui concilie cette décision avec le respect impératif de la durée annuelle de 1 607 heures du temps de travail, à laquelle la collectivité ne peut donc pas porter atteinte.

Il ne fait aucun doute que cette ordonnance de référé sera confirmée au fond. La situation donne en effet à juger une violation élémentaire de la hiérarchie des normes par la Ville de Paris, qui a essayé maladroitement de se défendre en référé en invoquant des difficultés « de paramétrage dans l’outil (informatique) de gestion des temps (de travail) ». On peut toutefois légitimement subodorer que la volonté de faire obstacle à l’application de la loi qui rehausserait le temps de travail des agents de la Ville de Paris est politique, dans le contexte d’une élection présidentielle.

Mais la loi de transformation de la fonction publique ne vient que fixer une date butoir pour corriger un régime illégal qui perdure depuis plus de vingt ans dans de nombreuses collectivités, dont Paris. La loi est la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse, dit notre Déclaration des droits de l’homme. Il serait injuste que certains agents, parce qu’ils habitent la capitale, bénéficient d’un régime très favorable, par rapport aux agents territoriaux de toutes les autres villes de France.

Depuis les vagues de décentralisation, les collectivités territoriales s'administrent librement par des conseils élus et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences. Cependant, cette autonomie ne leur permet pas de s’affranchir de l’application nationale des dispositions législatives. Car si la France est décentralisée, elle est aussi déconcentrée et elle n’est en aucun cas un État fédéral.

Paris, comme les autres collectivités, doit le comprendre.

 
Untitled 1Le samedi 13 novembre 2021, le maire de la commune de Laillé près de Rennes a pris un arrêté interdisant la chasse à proximité des maisons ainsi que l’usage de carabines dans sa commune. Cette mesure radicale fait suite à une multiplication des accidents de chasse sur cette commune rurale, qui ont notamment coûté la vie à un automobiliste (Ouest France).

Mais cet arrêté municipal est-il bien légal ?

Il n’entre pas dans les pouvoirs du maire de réglementer de manière générale et absolue la chasse sur son territoire en l’absence de circonstances particulières. La police de la chasse incombe en effet à l’État et donc au préfet (article L. 420-2 du code de l’environnement).

Il n’en demeure pas moins que le maire dispose de pouvoirs de police et est responsable de l’ordre de public sur le territoire de sa commune (article L. 2212-2 du CGCT). Ceci signifie que, lorsque les circonstances s’y prêtent et qu’un risque en matière de sécurité publique est constaté, le maire est fondé ponctuellement à intervenir.

La multiplication d’accidents de chasse sur une même commune constitue indéniablement un risque en matière de sécurité publique qui justifie l’intervention du maire.

C’est ce qu’a déjà jugé le Conseil d’État :

« à la suite d'incidents ayant opposé des non-chasseurs à un chasseur sur le territoire de sa commune, à proximité d'une habitation, le maire de la commune de Cellieu a (…) interdit par l'arrêté attaqué, en date du 14 novembre 1987, "toute action de chasse, en particulier les tirs, dans un périmètre fixé à 200 mètres des habitations quelles qu'elles soient" (…) le maire n'a, en l'espèce compte-tenu des atteintes déjà portées à la sécurité des habitations de la commune de Cellieu, ni excédé les pouvoirs de police (…) ni pris une mesure disproportionnée par rapport aux risques encourus par les habitants en élargissant de 150 à 200 mètres le périmètre interdit à la chasse autour des habitations » (CE, 13 septembre 1995, n°127553)

Le 25 mai 2021, la Cour administrative d’appel de Douai a également validé un arrêté réglementant la chasse à courre sur le territoire d’une commune compte tenu d’incidents répétés en zone urbanisée (n°20DA00793).

Le juge administratif exige toutefois que la mesure soit circonstanciée, limitée dans le temps et dans l’espace. Ceci se comprend aisément, car elle doit viser à remédier à une situation préoccupante pour la sécurité publique (multiplication des incidents)… jusqu’au retour de l’ordre public.

Si l’intervention du maire de Laillé près de Rennes est justifiée compte tenu de la multiplication des accidents de chasse sur cette commune et de leur gravité, la mesure sera probablement rétoquée dans ses modalités, car elle est trop générale (interdiction illimitée de « l’usage des carabines » sur le territoire de la commune) et prévoit une application infinie dans le temps.

Le texte pourrait être facilement amélioré en limitant l’interdiction à des parties bien définies de la commune, comme les zones urbanisées, avec une application différenciée dans le temps et dans l’espace.

Quant à la réglementation plus générale de la pratique de la chasse qu’appellent de leurs vœux des associations de protection de la nature, elle ne relève pas des pouvoirs du maire, mais de ceux de l’État qui pourrait se saisir de la question.

Untitled 1Présider un bureau de vote, être assesseur, siéger en commission d’appel d’offres… certains conseillers municipaux rechignent parfois à exercer ces fonctions qu’ils estiment ingrates. Mais la sanction peut être lourde, puisque la loi prévoit la démission d’office pour les élus locaux réfractaires.

C’est l’article L. 2121-5 du CGCT qui prévoit que tout membre d'un conseil municipal qui a refusé de remplir une des fonctions qui lui sont dévolues par les lois est déclaré démissionnaire d’office (1). Une stricte procédure doit toutefois être respectée (2) et une excuse valable peut permettre d’excuser l’élu (3).

Si les conditions sont réunies, c’est le tribunal administratif qui prononce la démission d’office du conseiller municipal (4) ce qui emportera des conséquences sur le conseil municipal lui-même (5).

1. La démission d’office doit être justifiée par le refus de remplir une des fonctions dévolues par les lois aux conseillers municipaux

La loi considère que certaines fonctions sont inhérentes à la qualité de conseiller municipal, qui ne peut donc pas s’en affranchir. Elles font partie, en quelque sorte, de l’exercice normal de son mandat. Il s’agit principalement des fonctions suivantes :

- La présidence des bureaux de vote (CE, 20 février 1985, Behuret, n°62778) ;
- La fonction d’assesseur (CE, 26 novembre 2012, n°349510) ;
- La participation à la commission d’appel d’offres (CAA de Douai, 14 décembre 2012, Commune de Quiévy, n°12DA01359).

Le conseiller municipal qui refuse sans excuse valable d’exercer une de ces trois fonctions risque donc la démission d’office.

Mais toutes les fonctions ne sont pas de nature à justifier une telle mesure. Ainsi, n’exposent pas l’élu à la démission d’office :

- Le refus de participer à une séance du conseil municipal (CE, 6 novembre 1985, Ville de Viry-Châtillon, n°68842) ;
- Le refus d’assurer une permanence facultative en mairie (CE, 8 juillet 1987, Commune de Vatilieu c/ Gandaubert, n°73215) ;
- Le refus de participer à une cérémonie commémorative (TA Amiens, 18 juillet 2002, commune de Léglantier, n°021245).

Enfin, le fait pour un élu de mal remplir ses fonctions ne justifie pas une démission d’office.

Une stricte procédure doit être respectée avant de déclarer l’élu démissionnaire d’office.

2. La démission d’office doit être précédée du respect d’une stricte procédure

Parce qu’elle emporte des conséquences exceptionnelles, la démission d’office ne peut être constatée qu’au terme d’une stricte procédure. Le maire doit avoir adressé une vraie convocation préalable à chaque conseiller municipal (2.1) et le conseiller municipal doit avoir réellement refusé d’accomplir une des fonctions dévolues par les lois (2.2).

2.1 Le maire doit avoir adressé une vraie convocation préalable à chaque conseiller municipal

En premier lieu, le maire doit avoir régulièrement convoqué le conseiller municipal concerné à accomplir une de ses fonctions. Par exemple, le maire doit avoir concrètement adressé ou remis en main propre un courrier individuel à chaque conseiller municipal de convocation à exercer la fonction d’assesseur lors d’élections à venir. Le caractère impératif de la convocation doit résulter des termes de ce courrier.

Le maire doit être en mesure de prouver la réalité de cet envoi et sa bonne réception par le conseiller municipal, dans un délai raisonnable permettant à l’intéressé de prendre connaissance de la demande et d’y apporter une réponse sérieuse.

La procédure n’est pas respectée si le maire se borne à adresser un vague courrier général à tous les conseillers municipaux leur demandant leur « disponibilité » pour la constitution des bureaux de vote d’une élection à venir (TA Amiens, 6 mai 2004, Commune de Le Hamel). Il va de soi qu’une demande adressée par SMS par le maire serait également aisément contestable.

2.2 Le conseiller municipal doit avoir réellement refusé d’accomplir une des fonctions dévolues par les lois

L'article L. 2121-5 du CGCT prévoit que le refus du conseiller municipal de remplir une des fonctions dévolues par les lois peut résulter :

- D’une déclaration expresse adressée à qui de droit ou rendue publique par son auteur (refus express) ;
- Ou d’une abstention persistante après avertissement de l'autorité chargée de la convocation (refus implicite).

La première hypothèse ne pose pas de grandes difficultés : le refus du conseiller municipal d’accomplir ses fonctions résulte d’un texte écrit, comme une lettre ou un tract, porté à la connaissance du maire ou du grand public, par quelque moyen que ce soit (courrier postal, courriel, réseaux sociaux, etc.).

La seconde hypothèse, la plus fréquente, est aussi la plus difficile à appréhender : il s’agit de la situation où le conseiller municipal s’abstient de répondre au maire qui l’a régulièrement convoqué pour exercer ses fonctions (silence du conseiller municipal). Dans ce cas de figure, le texte exige que le maire ait adressé un « avertissement » à l’élu concerné et que ce dernier se soit abstenu de manière persistante d’accomplir ses fonctions malgré cet avertissement. L’exigence de l’avertissement est simple à comprendre, car le texte prévoit que l’abstention doit être « persistante ». Il faut donc prévenir le destinataire de la possibilité de la mesure avant de pouvoir l’appliquer. L'avertissement constitue une condition substantielle de la mise en œuvre de l'article L. 2121-5 du CGCT (TA Rouen, 25 octobre 1985, Maire de la commune d'Ezy-sur-Eure). Ici encore, le maire doit être en capacité de prouver la réalité de l’avertissement adressé au conseiller municipal et sa bonne réception par ce dernier. Les termes de l’avertissement ne doivent pas être ambigus et mentionner clairement l’obligation d’accomplir les fonctions et la sanction de démission d’office applicable (CE, 20 février 1985, Behuret, n°62778).

L’avertissement préalable à la mesure ne se confond pas avec la convocation initialement adressée au conseiller municipal : il faut donc deux envois. L’avertissement doit par ailleurs être adressé dans un délai raisonnable c’est-à-dire permettant encore à l’intéressé d’exercer sa fonction (et pas la veille du scrutin ou de la réunion de la commission d’appel d’offres à 22H). Enfin, la procédure n’est pas respectée si le maire prend par exemple acte du refus tacite d’un de ses conseillers d’exercer une de ses fonctions et désigne un autre conseiller à la place pour ce faire.

3. Une excuse valable peut permettre d’excuser l’élu

Seule une « excuse valable » peut permettre au conseiller municipal de refuser de remplir une des fonctions qui lui sont dévolues par les lois (CE, 21 octobre 1992, Alexandre, n° 138437).

Ont été jugées comme des excuses valables à ce titre :

- Une pathologie médicale sérieuse et établie par un certificat médical (CAA Paris, 1er décembre 1998, Maire de Nogent-sur-Marne, n°97PA02557) ;
- Un certificat médical portant arrêt de travail (CAA Versailles, 30 décembre 2004, Mme Chantal X., n° 04VE01719) ;
- Une réunion familiale exceptionnelle prévue de longue date (60 ans de mariage - CAA Nantes, 2 octobre 2007, Chopp, n°07NT01704).

À l’inverse, ne constituent pas des excuses valables à ce titre :

- Des « raisons personnelles » ou de vagues « charges de famille » sans explication (CE, 21 mars 2007, Mme Sofia A., n°278438) ;
- Des certificats médicaux postérieurs ;
- Un refus de vaccination.

Si les conditions sont réunies, c’est le tribunal administratif qui prononce la démission d’office du conseiller municipal.

4. C’est le tribunal administratif qui prononce la démission d’office du conseiller municipal

La démission d'office des membres des conseils municipaux est prononcée par le tribunal administratif.

Le maire ne peut donc pas lui-même prononcer la démission d’office de son conseiller municipal et doit obligatoirement saisir à cet effet le juge administratif dans le strict délai d'un mois à compter du refus du conseiller municipal, à peine de déchéance. L’habilitation du conseil municipal à cet effet n’est pas nécessaire, s’agissant d’un pouvoir propre.

Le tribunal administratif dispose alors d’un délai d’un mois pour statuer, faute de quoi il est automatiquement dessaisi. Le maire a dans cette hypothèse un nouveau délai d'un mois pour saisir la cour administrative d'appel de cette même procédure.

Lorsque le tribunal administratif prononce la démission d'un conseiller municipal, le greffier en chef en informe l'intéressé en lui faisant connaître qu'il a un délai d'un mois pour se pourvoir devant la cour administrative d'appel, qui juge alors en trois mois.

Le conseiller municipal démissionnaire ne peut être réélu de ce même mandat avant un strict délai d'un an (article L. 235 du code électoral).

La démission d’office du conseiller municipal déclarée par le tribunal administratif emportera des conséquences.

5. Les conséquences de la démission d’office du conseiller municipal

Dès lors qu’il est déclaré démissionnaire d’office par le tribunal administratif, le conseiller municipal démissionnaire ne peut plus participer aux séances du conseil municipal. Son siège devient donc vacant au sein du conseil municipal.

Les conséquences diffèrent suivant la densité de la commune :

- Dans les communes de plus de 1 000 habitants, le candidat venant sur une liste immédiatement après le dernier élu est appelé à remplacer le conseiller municipal élu sur cette liste dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit (article L. 270 du code électoral) ;

- Dans les communes de moins de 1 000 habitants, lorsque le conseil municipal a perdu, par l'effet des vacances survenues, le tiers ou plus de ses membres, ou qu'il compte moins de cinq membres il est, dans le délai de trois mois à dater de la dernière vacance, procédé à des élections complémentaires. Toutefois, à partir du 1er janvier de l'année qui précède le renouvellement général des conseils municipaux, les élections complémentaires ne sont obligatoires qu'au cas où le conseil municipal a perdu la moitié ou plus de ses membres ou qu'il compte moins de quatre membres (article L. 258 du code électoral).

Enfin, si le conseiller municipal avait également un mandat de conseiller communautaire, sa démission d’office entraînera également la déchéance de ce second mandat (mais pas l’inverse).

***

Textes de référence :

« Tout membre d'un conseil municipal qui, sans excuse valable, a refusé de remplir une des fonctions qui lui sont dévolues par les lois, est déclaré démissionnaire par le tribunal administratif.
Le refus résulte soit d'une déclaration expresse adressée à qui de droit ou rendue publique par son auteur, soit de l'abstention persistante après avertissement de l'autorité chargée de la convocation.
Le membre ainsi démissionnaire ne peut être réélu avant le délai d'un an ».
« Dans les cas prévus à l'article L. 2121-5, la démission d'office des membres des conseils municipaux est prononcée par le tribunal administratif.
Le maire, après refus constaté dans les conditions prévues par l'article L. 2121-5 saisit dans le délai d'un mois, à peine de déchéance, le tribunal administratif.
Faute d'avoir statué dans le délai fixé à l'alinéa précédent, le tribunal administratif est dessaisi. Le greffier en chef en informe le maire en lui faisant connaître qu'il a un délai d'un mois, à peine de déchéance, pour saisir la cour administrative d'appel.
Lorsque le tribunal administratif prononce la démission d'un conseiller municipal, le greffier en chef en informe l'intéressé en lui faisant connaître qu'il a un délai d'un mois pour se pourvoir devant la cour administrative d'appel.
La contestation est instruite et jugée sans frais par la cour administrative d'appel dans le délai de trois mois ».


En matière de contestation des permis de construire des sociétés, le Conseil d'État juge que la notification prévue à l'article R. 600-1 du code de l’urbanisme peut indifféremment être effectuée à l'adresse indiquée au sein de l'acte attaqué ou au siège social de l'entreprise.

L’article R. 600-1 du code de l’urbanisme fixe une règle très importante : en matière de recours contre un permis de construire (gracieux ou contentieux), l'auteur du recours est tenu de prévenir lui-même l’auteur de la décision (souvent la commune) et le titulaire de l’autorisation (souvent le voisin).

Cette notification doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de 15 jours francs à compter du dépôt du recours.

Il faut se conserver la preuve de ces envois pour pouvoir en justifier auprès du tribunal.

À défaut, l’irrecevabilité du recours sera constatée par le juge, sans examen au fond du dossier.

Une question se pose toutefois fréquemment en pratique lorsque le bénéficiaire du permis de construire est une société, car les sociétés ont souvent plusieurs adresses : alors, où adresser la notification ?

D’autant que certaines juridictions avaient déclaré irrecevables des recours notifiés au siège social de l’entreprise, qui différait de l’adresse mentionnée au sein du permis de construire.

C’est la question à laquelle les juges du Palais Royal ont apporté une réponse précise le 20 octobre 2021.

Le Conseil d’État a ainsi jugé que, pour les sociétés, la notification imposée par l’article R.600-1 du code de l’urbanisme pouvait indifféremment être adressée à l’adresse figurant sur l’acte attaqué ou au siège social de l’entreprise.

L’auteur du recours a donc un choix libre :

  • Soit notifier son recours à l’adresse figurant au sein du permis de construire ;
  • Soit adresser la notification au siège social de l’entreprise.
Les deux options sont parfaitement valables au titre de l’article R.600-1 du code de l’urbanisme.

En pratique, la prudence conduit souvent à procéder à une double notification, aux deux adresses, surtout lorsque l’expiration du délai de notification est proche.

Il est en tout état de cause très important de se conserver une preuve d’envoi des courriers de notification envoyés dans les délais, afin de pouvoir en justifier auprès du juge administratif.

Untitled 1Des infirmiers et auxiliaires de puériculture ont fait valoir devant le Conseil d’État qu’ils n’étaient pas soumis à l’obligation vaccinale contre la covid-19 comme les autres professionnels de santé, car ils ne travaillent pas forcément en hôpital.

Par une ordonnance rendue le 25 octobre 2021, le Conseil d’État leur a donné tort en jugeant que tous les professionnels de santé étaient soumis à cette obligation vaccinale, sans exception selon le lieu d’exercice.

Le cadre juridique de ce litige est simple :

En raison de la dégradation de la situation sanitaire nationale du fait de la diffusion croissante du variant Delta, le législateur a institué une obligation de vaccination pour un certain nombre de professionnels et notamment les « professionnels de santé » et les « personnes exerçant leur activité dans les établissements de santé » (article 12 de la loi du 5 août 2021).

Sur cette base, la ville de Nanterre a indiqué, par des notes de service en date des 20 et 25 août 2021, que tous les personnels travaillant au sein des établissements de la petite enfance de la ville entraient dans le champ de cette obligation vaccinale, infirmiers et auxiliaires de puériculture compris.

Par un référé-liberté porté devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise puis devant le Conseil d’État, le syndicat CFDT des Hauts-de-Seine a fait valoir le contraire et contesté cette mesure au nom d’une trentaine d’agents des crèches de la ville.

Selon le syndicat, l'obligation vaccinale voulue par le législateur ne devrait s’entendre et s’appliquer qu’aux seuls professionnels de santé au contact de personnes vulnérables, ce qui ne serait pas le cas des personnels de la petite enfance comme les infirmiers et auxiliaires de puériculture qui travaillent dans des établissements de la petite enfance et non des établissements de santé.

Par une ordonnance du 25 octobre 2021, le Conseil d’État a rejeté la requête du syndicat CFDT et donné raison à la ville de Nanterre. Selon les juges du Palais Royal, l’obligation vaccinale contre la covid-19 est fondée sur deux critères alternatifs :

  • un critère géographique, à savoir que toutes les personnes exerçant leur activité dans un certain nombre d'établissements, principalement les établissements de santé et des établissements sociaux et médico-sociaux, sont concernées ;
  • et un critère professionnel, incluant tous les professionnels de santé.

Il est important de comprendre que ces deux critères ne sont pas cumulatifs, mais alternatifs (un seul suffit pour emporter obligation).

Or, selon le Conseil d’État, les infirmiers et auxiliaires de puériculture font partie des professionnels de santé régis par la quatrième partie du code de la santé publique. Il s'ensuit que même lorsqu'ils exercent leur profession non pas dans un établissement de santé, mais dans un établissement de la petite enfance, ils entrent quand même dans le champ de l'obligation vaccinale (critère professionnel).

Les infirmiers et auxiliaires de puériculture sont donc bien tous soumis à l’obligation vaccinale contre la covid-19, quel que soit leur lieu d’exercice professionnel, en raison de leur qualité de professionnels de santé.

Dans l’hypothèse d’un non-respect de cette obligation, la suspension des fonctions est encourue avec interruption du versement de la rémunération (article 14 de la loi du 5 août 2021), jusqu’à régularisation du statut vaccinal de l’agent.

La position du Conseil d’État est intéressante, car elle rappelle que, concernant les professionnels de santé, l’obligation de vaccination n’est pas conditionnée à la nature des tâches à accomplir ou au fait de côtoyer des personnes vulnérables.

En quelque sorte, selon le Conseil d’État la qualité de professionnel de santé et l’obligation vaccinale sont indissociables, car les professionnels de santé doivent montrer l’exemple quelles que soient leurs fonctions.

La règle est donc aujourd’hui très claire : un professionnel de santé ne peut pas se soustraire à l’obligation vaccinale contre la covid-19, quels que soient son lieu de travail et ses fonctions, à la seule exception notable d’une contre-indication médicalement reconnue.

Décision : Ordonnance du Conseil d'État du 25 octobre 2021, Syndicat Interco CFDT des Hauts-de-Seine, n°457230 - source https://lesprosdelapetiteenfance.fr/ 

Untitled 1C’est la journaliste Christine KELLY qui a médiatisé cette affaire : dans la nuit du 25 au 26 octobre 2021, le drapeau national bleu-blanc-rouge qui ornait la façade de la Préfecture de Basse-Terre a été « remplacé » par un emblème communautariste guadeloupéen. Ce geste politique visait à remettre en cause l’unité de la Nation française :

Mais peut-on impunément afficher ostensiblement son soutien à une cause indépendantiste au fronton d’un bâtiment public ?

La réponse est évidemment négative et les contrevenants s’exposent à de lourdes sanctions.

De jurisprudence constante, le Conseil d’État considère en effet que le principe de neutralité des services publics s'oppose à ce que soient apposés sur les édifices publics des signes symbolisant la revendication d'opinions politiques, religieuses ou philosophiques (Conseil d’État, 27 juillet 2005, Commune de Sainte-Anne, n°259806).

Le Conseil d’État avait d’ailleurs pris position à propos d’un drapeau indépendantiste martiniquais apposé sur la façade d’une mairie.

Le ministre de l’intérieur a réaffirmé cette interdiction en 2010 dans le cadre d’une réponse ministérielle : « L'apposition de banderoles de revendication sur des édifices publics (...) est contraire (au principe de neutralité) (...) Il revient au responsable des bâtiments concernés de faire retirer ces banderoles, le cas échéant, sous le contrôle du juge administratif. »

De surcroît, l’outrage au drapeau tricolore est puni d’une peine maximale de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende (article R645-15 du Code pénal).

Ces règles s’appliquent à tous les édifices publics de France, et donc à la préfecture de la Guadeloupe, qui ne sont pas des lieux adéquats pour porter des revendications politiques.

Elles protègent nos bâtiments publics de toute récupération politique, philosophique ou religieuse pour les consacrer à l'intérêt général. Et c'est très bien ainsi.


Untitled 1La photo n’a sans doute pas été choisie au hasard. Ce matin, le vice-président du Rassemblement national Jordan BARDELLA a publié sur les réseaux sociaux une photo pour inciter les électeurs à aller voter aux élections régionales.

La polémique a été immédiate, puisque l’assesseur en charge du bureau de vote y apparaît voilée. D’aucuns se sont alors interrogés sur la légalité de cette tenue islamique, pour une personne en charge du bon déroulement des opérations électorales républicaines.

Alors qu’en est-il juridiquement ?


Peuvent avoir la qualité d’assesseur (bénévole) tous les électeurs de la commune ainsi que les conseillers municipaux (Article R44 du Code électoral).

Le Code électoral ne prévoit aucune obligation de neutralité pour les assesseurs des bureaux de vote en son sein.

C’est le Conseil d’État qui est venu préciser, par un arrêt remarqué du 15 novembre 2004 (n°268543) que le président et les membres du bureau de vote sont astreints à une obligation de neutralité, afin de ne pas porter atteinte à la liberté et à la sincérité du vote des électeurs :

« Considérant que l'aménagement des locaux dans lesquels se déroule un scrutin ne doit pas porter atteinte à la liberté et à la sincérité du vote et doit, donc, être neutre ; qu'au cours du déroulement du scrutin, le président et les membres du bureau de vote sont, eux-mêmes, astreints à une obligation de neutralité (...) »

Il ne faut toutefois pas extrapoler cette jurisprudence circonstanciée, qui concerne la neutralité politique des membres de bureaux de vote, et non le principe de laïcité. L’obligation de neutralité posée par le Conseil d’État a ainsi vocation à prohiber l'intervention de tout message à connotation politique dans les locaux aménagés pour le vote et ainsi toute forme de pression ou de propagande sur les électeurs dans la salle de scrutin.

Dans le cadre d’une autre décision, le Conseil d’État avait ainsi sanctionné le maire sortant d’une commune qui avait présidé toute la journée le bureau de vote en arborant une tenue (chemise) partisane. La haute juridiction administrative avait annulé les opérations électorales sur ce fondement, estimant que la tenue avait constitué un moyen de pression sur les électeurs altérant la sincérité du scrutin :

« le maire sortant, M. A..., a voté ceint d'une chemise "paréo" aux couleurs de la "liste d'entente communale de Vairao" et a présidé le bureau de vote toute la journée dans cette tenue ; qu'outre l'attitude partisane ainsi adoptée, le maire sortant a arboré son écharpe tricolore, ce qui dans les circonstances de l'espèce, a constitué un moyen de pression supplémentaire sur les électeurs (...) » (Conseil d'État, 8 mars 2002, n°236291)

Le principe de neutralité politique auquel sont strictement astreints le président et les membres du bureau de vote ne peut donc pas être transposé au voile islamique, en l’état des textes applicables, tels qu’interprétés par le Conseil d’État. Sauf à considérer que le voile islamique constituerait une tenue vestimentaire politique de nature à influencer les électeurs, ce qui paraîtrait pour le moins alambiqué.

Enfin, certains pourraient envisager que cet assesseur aurait la qualité de collaborateur occasionnel du service public ou de fonctionnaire et serait donc soumis à une obligation de neutralité religieuse. Mais :

  • Les collaborateurs occasionnels du service public comme les parents accompagnateurs de sorties scolaires ne sont toujours pas à ce jour astreints à une obligation de neutralité religieuse (Article : "Comprendre la polémique sur les mères voilées accompagnatrices de sorties scolaires") ; 
  • Si les fonctionnaires n’ont pas le droit de manifester leurs croyances religieuses, cette obligation est limitée à l’exercice de leurs fonctions. Or le fonctionnaire qui apporte son concours aux opérations électorales en tenant un bureau de vote comme assesseur le dimanche n’intervient pas en tant que fonctionnaire, mais à titre privé comme bénévole. L’obligation de neutralité ne lui est alors pas opposable (Article : "Un agent public peut-il être licencié pour sa barbe trop imposante ?").

L’assesseur en charge du bureau de vote du candidat Jordan BARDELLA avait donc parfaitement le droit d’être voilée.

Si les règles venaient à changer sur ce point à l'avenir, certaines communes auraient encore plus de difficultés à trouver des assesseurs, qui sont déjà rares à se porter volontaires (BFMTV "Pénurie d'assesseurs à un mois des élections départementales et régionales"pour une fonction non rémunérée qui les mobilise sur deux dimanches de juin...

Lire aussi : "Élections départementales 2021 : une candidate peut-elle faire campagne voilée ?"

Untitled 1Le 27 mai 2021, le législateur a adopté le principe du « pass sanitaire » dans le cadre du projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise sanitaire.

Concrètement, on entend par « pass sanitaire » :

  • le résultat d'un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19,
  • un justificatif de statut vaccinal concernant la covid-19,
  • ou un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la covid-19.
À ce stade, ce « pass sanitaire » n’a pas été généralisé dans la loi. Il n’est en effet applicable qu’aux événements impliquant de grands rassemblements de personnes pour des activités de loisirs, des foires ou des salons professionnels, du 2 juin 2021 et jusqu’au 30 septembre 2021 inclus.

Puisque la loi est limitative, l’exercice des activités qui ne sont pas visées dans le texte ne peut pas à ce stade être conditionné à la présentation d'un « pass sanitaire ». Ce qui ne préjuge pas de l’avenir, si la loi venait à être complétée pour le généraliser.

Or il nous semble que le point très important des activités culturelles a été étrangement oublié dans la loi, ce qui interroge dès lors sur l’exigibilité du « pass sanitaire » en la matière.

Par une décision n° 2021-819 DC du 31 mai 2021, le Conseil constitutionnel a rejeté le recours de 60 députés contre le projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise sanitaire, validant donc le principe d’un « pass sanitaire » pour les activités prévues par la loi (loisirs, foires et salons professionnels).

Les députés avaient notamment fait valoir que la catégorie des « activités de loisirs » prévue par la loi était ambiguë et permettrait l’exigibilité du « pass sanitaire » pour les activités politiques, syndicales ou cultuelles. Rien de tel pour le Conseil constitutionnel, qui a jugé que ces différentes catégories ne pouvaient pas se recouper. C’est un point important, puisque les Sages de la rue de Montpensier ont expressément exclu le « pass sanitaire » pour toute activité politique, syndicale ou cultuelle en l’état actuel des textes applicables. Impossible donc, selon le Conseil constitutionnel, d’exiger un « pass sanitaire » pour un meeting politique, un grand rassemblement syndical ou une cérémonie religieuse.

Mais nous pouvons lire la décision du Conseil constitutionnel dans l’autre sens, qui révèle alors un angle mort du législateur sur le « pass sanitaire ». La loi autorisant le « pass sanitaire » ne fait en effet aucune mention des « activités culturelles » en évoquant que les « activités de loisirs ». Les Sages du Conseil constitutionnel ont pourtant bien précisé, comme nous l’avons vu, que les différentes catégories ne se recoupaient pas. Or peut-on réellement considérer que la culture est un « loisir » comme les autres ? La catégorie des « activités culturelles » peut-elle s’amalgamer aux « activités de loisirs » ?

De grandes institutions comme l’Opéra de Paris ont déjà fait connaître leur intention d’exiger le « pass sanitaire » dès le 15 juin par exemple pour le Ballet « Roméo et Juliette » chorégraphié par Rudolf Noureev. Mais il nous semble que l’absence de référence explicite à la « culture » dans la loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire fragilise l’exigibilité du « pass sanitaire » en la matière.

Dans « La crise de la culture » Hannah Arendt dénonçait la marchandisation de l’art avec ces mots : « La culture se trouve détruite pour engendrer le loisir ». Au regard du principe de sécurité juridique, mais également au nom d’un véritable choix de civilisation, le législateur gagnerait à s’en souvenir en complétant la loi.

Untitled 1Les élections régionales se dérouleront les dimanche 20 et 27 juin 2021 en France Métropolitaine et Outre-mer.
 
Les opérations électorales auront pour objet de pourvoir les sièges des conseillers régionaux dans les 13 régions métropolitaines et 5 régions ultramarines françaises pour une durée de 6 ans (article L336 du Code électoral), avec une particularité pour la Corse, la Martinique et la Guyane qui, depuis la mise en place de la collectivité unique, votent dans le cadre d'une "élection territoriale" organisée toutefois selon les mêmes règles que les élections régionales.

1 910 conseillers régionaux seront élus lors de ce scrutin, au scrutin de liste à deux tours, mêlant scrutin majoritaire et représentation proportionnelle, sans adjonction ni suppression de noms (interdiction du panachage) et sans modification de l'ordre de présentation (pas de vote préférentiel) (article L338 du Code électoral).

Un nombre minimum de sièges de conseillers régionaux par département (article L338-1 du Code électoral) est fixé depuis la réforme de 2015 :

  • Un minimum de deux sièges de conseillers régionaux pour les départements de moins de 100.000 habitants,
  • Et un minimum de quatre sièges de conseillers régionaux pour les départements d’au moins 100.000 habitants.
C’est l’occasion de faire le point sur les possibilités de contester ce scrutin ou ses résultats.

1/ L’intérêt à agir

Aux termes des dispositions de l’article L361 du Code électoral « Les élections au conseil régional peuvent être contestées dans les dix jours suivant la proclamation des résultats par tout candidat ou tout électeur de la région devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux. Le même droit est ouvert au représentant de l'Etat dans la région s'il estime que les formes et conditions légalement prescrites n'ont pas été respectées ».

Il résulte de cet article que les élections régionales peuvent être contestées par :

  • Tout électeur de la région,
  • Les candidats,
  • Et le Préfet (représentant de l’Etat dans la région).
A contrario, les opérations électorales ne peuvent être contestées par les partis politiques (CE, 17 octobre 1986, Elections cantonales de Sevran, n° 70266), les associations, ou la région elle-même.

Par ailleurs, et conformément à la rédaction susvisée, un électeur ou un candidat d’une autre région ne saurait également pouvoir valablement contester le scrutin d’une région qui n'est pas la sienne.

2/ La juridiction compétente

CELa juridiction compétente pour connaître d’un recours contre un scrutin régional est le Conseil d’Etat, statuant en la matière en premier et dernier ressort (article L361 du Code électoral) (article L311-3 2° du Code de Justice Administrative).

Toute protestation contre un scrutin régional déposée devant le Tribunal Administratif sera par conséquent déclarée irrecevable.

3/ Les délais pour agir, et les modalités concrètes d’exercice du recours

S’agissant des modalités concrètes d’exercice du recours, les protestations électorales contre un scrutin régional doivent être déposées au greffe du Conseil d’Etat dans un délai maximum de 10 jours suivant la proclamation des résultats (article L361 du Code électoral), c'est-à-dire au plus tard :

  • le mercredi 30 juin 2021 pour une élection acquise au premier tour,
  • ou le mercredi 7 juillet 2021 pour une élection acquise au second tour.
Ces protestations destinées au Conseil d'Etat peuvent également être déposées à la préfecture ou à la sous-préfecture du domicile du requérant (article R773-4 CJA).

Le Préfet lui-même, s'il estime que les formes et conditions légalement prescrites n'ont pas été respectées, dispose d’un délai de 10 jours pour déférer les opérations électorales au contrôle du Conseil d’Etat (article L361 du Code électoral).

Conformément aux règles traditionnelles de la procédure administrative, le Conseil d’Etat est tenu de notifier la protestation électorale aux conseillers régionaux intéressés (article R611-1 CJA), sans toutefois qu’un délai particulier soit prévu en la matière (à l’inverse du scrutin municipal et départemental).

4/ La présentation de la requête

De manière traditionnelle s'agissant d'un contentieux administratif, la requête en contestation d'un scrutin régional devra impérativement être signée par le requérant (CE, 7 décembre 1983, commune de Briot, n° 51788), comporter ses nom, prénom, et domicile, indiquer de manière précise et non équivoque les demandes (ex: annulation du scrutin et/ou proclamation d'un autre candidat) (CE,  22 juin 1990, commune de Forbach, n° 107768) ainsi que les irrégularités relevées (CE, 9 octobre 2002, commune de Goyave, n° 235362). Le requérant visera également nommément le ou les candidats dont l'élection est contestée dans sa protestation, et on lui conseillera de justifier de sa qualité, lui donnant intérêt à agir dans ce contentieux particulier (électeur de la région, candidat).

Si le recours à un avocat est facultatif en matière électorale devant le Conseil d’Etat (article R432-2 CJA), les conseils du professionnel peuvent néanmoins être efficaces pour contester valablement le scrutin régional, dans un délai restreint.

A noter enfin que le bénéfice de l'aide juridictionnelle peut être sollicité par un justiciable pour engager un contentieux régional (réponse ministérielle, JO Sénat du 27/09/2007, page 1732).

5/ Les moyens invocables

Tout moyen peut être invoqué par les requérants pour démontrer la nullité des opérations électorales. Ainsi, à titre d’exemples, des manœuvres altérant la sincérité du scrutin (ex: diffamation) (CE, 14 novembre 2008, commune du Vauroux, n° 316708 - CE, 16 juin 1972, Élections municipales du Blanc, n° 84204), des éléments matériels démontrant la rupture d'égalité entre les candidats, de l'inscription de faux électeurs, de « l’achat » de votes, de l'absence de signature de l'un des candidats sur la déclaration de candidature (CE, Ass., 21 décembre 1990, Élections municipales Mundolsheim, n° 112221), de l'inéligibilité d'un candidat (CE, 29 juillet 2002, Élections municipales Levallois Perret, n° 240108), des infractions commises lors du déroulement du scrutin, etc.

L'annulation totale du scrutin ne sera toutefois prononcée par le Conseil d’Etat qu'en cas de vice substantiel, ou si le juge ne peut déterminer avec certitude le résultat de l'élection en raison des irrégularités commises.

Un faible écart de voix entre les candidats renforcera, en cas de manœuvres, la propension du juge à annuler le scrutin (CE, 8 juillet 1992, Élection cantonale partielle Saint-Denis-de-la-Réunion, n° 126820).

On précisera enfin que le contentieux de l'élection régionale ne saurait être l'occasion de contester, par voie d'exception, le redécoupage de la carte des régions issue de la loi du 16 janvier 2015.

6/ Les pouvoirs du juges - les conséquences du recours

Le recours exercé contre un scrutin régional est un recours objectif de plein contentieux.

En effet, le juge de l’élection dispose d’un pouvoir très large en la matière et peut notamment :

  • Apprécier la validité des procédures électorales,
  • Contrôler la validité des suffrages émis,
  • Modifier le nombre de suffrages recueillis par un candidat,
  • Rectifier le nombre de sièges obtenus par une liste,
  • Reconnaître l’inéligibilité d’un candidat,
  • Annuler de manière totale (en cas de vice substantiel) ou partielle, le scrutin,
  • Ou proclamer élus certains candidats à la place d’autres (CE 20 octobre 2004, Élections régionales de Picardie, Montès et a., n°266334).
Il conviendra donc d’apporter un soin tout particulier à la rédaction de la requête en matière de contentieux des élections régionales dans la mesure où le juge électoral est tenu par les demandes des parties et ne pourra donc, sauf moyens d’ordre public, prononcer des mesures qui ne lui ont pas été demandées par le requérant (CE, 1er décembre 1989, commune de Seraincourt, n°108998).

Ainsi, à titre d’exemple, une protestation tendant à l'annulation d'une élection régionale, lorsqu'elle est fondée sur des griefs tirés de la discordance entre le nombre de suffrages comptabilisés et le nombre d'émargements, ne saisit le juge que des écarts contestés dans les bureaux de vote mentionnés dans la protestation, et non de ceux des autres bureaux de vote (CE  1er décembre 2010, Élection des membres du conseil régional des Pays-de-Loire, n°337945).

Par ailleurs, si la protestation ne porte que sur les opérations électorales intervenues dans un des départements de la région, et qu'aucun grief n'a été invoqué dans le délai de recours à l'encontre des résultats proclamés dans les autres départements de cette région, il n'appartient pas au Conseil d'État de se saisir des résultats des opérations électorales intervenues dans ces derniers départements (CE  20 octobre 2004, Élections régionales de Picardie, Montès et a., n°266334).

Particularité du scrutin régional, liée au mode de scrutin, on notera par ailleurs que l'annulation partielle de l’élection, dans laquelle l'attribution des sièges constitue une opération indivisible, ne peut être prononcée que si les griefs présentés à l'appui de la protestation portent :

S'agissant d'un scrutin de liste, le juge administratif peut ainsi annuler un seul siège (et non l'élection toute entière). Ce siège sera alors normalement pourvu par la désignation du candidat venant immédiatement après le dernier élu de la liste qui doit disposer de ce siège, en application du Code électoral (article L360 du Code électoral). Lorsque ces dispositions ne peuvent être appliquées (en raison du nombre de voix en présence), le juge électoral constatera la vacance du siège jusqu'au prochain renouvellement du conseil régional (CE, 4 juillet 2011, Elections régionales d’Ile-de-France Mme A., M. M., n°338033).

7/ Les délais de jugement et les possibilités de recours contre la décision rendue

Aucun délai n’est posé par le Code électoral pour que le Conseil d’Etat prononce sa décision en matière de contentieux régional, qui sera notifiée aux parties intéressées.

On notera, à titre d’exemple, que le Conseil d’Etat s’est prononcé le 4 juillet 2011 sur une protestation électorale tendant à l’annulation des opérations électorales s’étant déroulées les 14 et 21 mars 2010 dans la région Ile-de-France, soit un délai de jugement de plus d’un an et demi (CE, 4 juillet 2011, Elections régionales d’Ile-de-France Mme A., M. M., n°338033).

Le conseiller régional dont l'élection est contestée reste en fonction jusqu'à ce qu'il ait été définitivement statué sur la réclamation (article L362 du Code électoral).

La décision rendue par le Conseil d’Etat ne sera susceptible d’aucun recours, hors cas particuliers (recours en révisionrecours en rectification d’erreur matérielleoppositiontierce-opposition).

Enfin, en cas d'annulation de l'ensemble des opérations électorales dans une région, il est procédé à de nouvelles élections dans cette région dans un délai de trois mois (article L363 du Code électoral).
Untitled 1Alors que ce week-end a marqué une nouvelle étape dans l'escalade du conflit israélo-palestinien, le maire de Nice Christian ESTROSI a choisi d'afficher ostensiblement son soutien à l'État d'Israël au fronton de la mairie, en y apposant le drapeau de l'État hébreu :


Mais est-ce bien légal ?

En la matière, la position de la justice administrative est très claire puisque, par un arrêt de principe « Commune de Sainte-Anne » du 27 juillet 2005 (n°259806), le Conseil d’État a décidé que :

« (...) le principe de neutralité des services publics s'oppose à ce que soient apposés sur les édifices publics des signes symbolisant la revendication d'opinions politiques, religieuses ou philosophiques (...) »

Cette décision du Conseil d’État avait été rendue à propos d’un drapeau indépendantiste martiniquais apposé d'ailleurs sur la façade d’une mairie et a été réaffirmée par la suite par le Ministre de l’Intérieur en 2010 dans le cadre d’une réponse ministérielle :
 
« L'apposition de banderoles de revendication sur des édifices publics (...) est contraire à ce principe (de neutralité) (...) Il revient au responsable des bâtiments concernés de faire retirer ces banderoles, le cas échéant, sous le contrôle du juge administratif. »

L’initiative prise par le maire de Nice apparaît donc contestable.

En effet, la décision susvisée du Conseil d’Etat, ainsi que la législation et la réglementation s’appliquent à tous les édifices publics, donc à toutes les mairies de France.

La mairie de Nice est donc tenue, comme tout édifice public, au strict respect du principe de neutralité. Il est par conséquent interdit d’apposer sur sa façade des signes symbolisant la revendication d'opinions politiques, religieuses ou philosophiques, conformément à la position constante du Conseil d’État.

Pour se défendre, le maire de Nice pourrait arguer que le drapeau israélien ne symbolise pas par lui-même la revendication d'opinions politiques. Il arrive en effet à certaines mairies d'arborer un drapeau étranger lors de commémorations, ou pour célébrer un jumelage avec une ville étrangère. Mais le juge administratif n'a pas pour habitude de décontextualiser les cas d'espèce présentés devant lui, et le maire de Nice a publiquement indiqué que l'apposition du drapeau de l'État hébreu était lié au "terrorisme du Hamas". Il y a donc fort à parier que le juge administratif, saisi en référé par tout habitant de la Ville ou par le Préfet, enjoindrait donc au maire de Nice de retirer sans délai le drapeau israélien de la façade de la mairie. 

Libre à chacun de penser ce qu'il veut du conflit israélo-palestinien et de prendre parti. Mais la façade d'une mairie n'est pas le lieu adéquat pour prendre position compte tenu du principe de neutralité applicable aux édifices publics. C'est ce principe essentiel qui protège nos bâtiments publics de toute récupération politique, philosophique ou religieuse pour les consacrer à l'intérêt général. Et c'est très bien ainsi.

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